René Martel, vive la France Libre
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Re: René Martel, vive la France Libre
...Ca se construit lentement mais sûrement dans ma tête, une suite palpitante
... 06 août 1942 - base de , 12 Mosquito du squadron 248 du Coastal Command s'apprêtent à décoller pour un raid très difficile. L'objectif n'est autre que le QG de la Kriesmarine à La Rochelle. Il s'agit d'une ancienne école au centre ville, le bombardement devra être précis. Le commandement du groupe a été attribué depuis peu au Flight Leutnant Oscar "Bob" Roberts. La navigation se fera comme d'habitude à 10 mètres des flots tumultueux du Golf de Gascogne. Mais l'Officier de la RAF et son fidèle second le pilot officer Joshua Fitsalus sont rompus à ce genre de mission. Ils devront placer leurs deux bombes de 250 livres très précisément, car juste à côté, il y a l'Université...
... 06 août 1942 - base de , 12 Mosquito du squadron 248 du Coastal Command s'apprêtent à décoller pour un raid très difficile. L'objectif n'est autre que le QG de la Kriesmarine à La Rochelle. Il s'agit d'une ancienne école au centre ville, le bombardement devra être précis. Le commandement du groupe a été attribué depuis peu au Flight Leutnant Oscar "Bob" Roberts. La navigation se fera comme d'habitude à 10 mètres des flots tumultueux du Golf de Gascogne. Mais l'Officier de la RAF et son fidèle second le pilot officer Joshua Fitsalus sont rompus à ce genre de mission. Ils devront placer leurs deux bombes de 250 livres très précisément, car juste à côté, il y a l'Université...
Dernière édition par le Mar 23 Jan 2007 - 5:06, édité 1 fois
615sqn_Harry- Wing Commander
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Re: René Martel, vive la France Libre
ouai super ,,,,, pourais-je en etre
615sqn_Devarenne- Flying Officer
- Nombre de messages : 2563
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Re: René Martel, vive la France Libre
615sqn_harry a écrit:...Ca se construit lentement mais sûrement dans ma tête, une suite palpitante
[/i]
RTA_Oscarbob- Lt Colonel
- Nombre de messages : 12635
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Date d'inscription : 26/10/2005
Re: René Martel, vive la France Libre
- Ca sera une mission très difficile Sir... Qui voyez-vous pour l'effectuer.
Dans l'ombre d'un bureau enfumé, deux hommes sont penchés sur une grande carte représentant la côte française, plus particulièrement la côte de la Gironde.
Le Group Captain Pikard soupira profondément et s'asseyait.
- Il leur faudra traverser le Golf... puis prendre le cap de St-Nazaire et au dernier moment virer de bord plein gaz en direction de La Rochelle. Larguer et filer... tout ça pendant 4 bonnes heures au radada... sacré sport... le Squadron 248 me semble le plus à même d'effectuer cette mission.
Se redressant sur sa chaise, il fixa le Wing Commander Colman.
- Si vous me posez la question Colman, c'est que vous avez certainement votre petite idée derrière la tête non?
Sans hésitation le Wing Commander répondit:
- Bob... je veux dire le Flight Leutnant Oscar "Bob" Roberts.
Pikard resta un moment pensif.
- Roberts... il est jeune ... c'est vrai qu'il a de l'expérience mais c'est ok pour moi, mais j'aimerais que son second soit ce Néo-Zélandais un peu fou... vous savez celui qui a mené l'attaque dans le brouillard contre le Gneisenau dans le fjord à Trondheim. Il est bon en navigation, il sera d'un précieux secours en cas de mauvais temps. Rappelez-moi son nom.
- C'est le Flying Officer Fitsalus... Oui Sir, c'est une excellente idée Joshua Fitsalus mènera le deuxième Flight.
Trois jour plus tard, les 12 Mosquito codés DM de l'escadrille B du Squadron 248 se posaient sur la base de l'aéroclub de Cadgwith dans le Cornwall. Un vent frais et humide attendait les équipages. Suivant les signes des mécaniciens, les 12 appareils s'alignèrent le long de la piste. L'une après l'autre les trappes d'accès s'ouvrirent, les sacs à effets et les parachutes lancés précédèrent les jambes des membres d'équipages qui une fois au sol, récupérèrent leurs affaires et se réunirent autour de leur leader qui venait d'être rejoint par un Wing Commander, probablement responsable de l'aérodrome.
Remontant le col de son Irwin jacket Joshua Fitsalus s'exclama en maintenant sa casquette contre les bourrasques de vent.
- Dites-moi Sir, qu'est ce qu'on fout ici, c'est quoi ce trou à rat?
L'officier supérieur répondit à la place du Flight Leutnant Roberts.
- Bonjour Messieurs, bienvenue à Cadgwith, je suis le Wing Commander Colman, responsable des opérations spéciales du Coastal Command. Soyez patient Leutnant Fitsalus, vous serez bientôt fixé.
S'adressant à tout le groupe.
- Allez au dispersal, on vous indiquera vos cantonnements. Roberts... Fitsalus, vous, vous venez avec moi.
Les pilotes du Squadron 248 se séparèrent en deux groupes.
Cinq jours auparavant, dans la nuit du 07 ou 08 septembre 1942, il y avait de l'activité dans le secteur de Rouillac en France. Cette nuit là, les maquisards s'affairaient dans un pré éloigné des habitations et se préparaient à extraire deux agents et en accueillir un autre depuis l'Angleterre. Sous les arbres, deux hommes accroupis attendent impatiemment. Le plus grand des deux tient précieusement une serviette sous le bras. Bientôt dans la nuit un ronronnement se fait entendre. Quelques minutes plus tard, des lampes se mettent à briller sporadiquement dans la nuit. Le moteur se tait et le Lysander du squadron 161, fait son approche, moteur au ralenti et se posa. Après s'être immobilisé, les deux hommes accompagnés par des maquisards en armes, prêts à faire feu de leur Sten à la moindre alerte, se précipitèrent vers le petit avion. Un inconnu quitta l'appareil et pendant que les deux hommes embarquaient rapidement, déjà, les membres de la résistance s'évanouissaient dans la nuit avec leur contact. Le Lysander avait déjà fait demi-tour et rapidement s'envola. Trois heures plus tard, il se posait sur un petit aérodrome inconnu d'Angleterre. Soulagés les deux hommes se précipitèrent dans une voiture qui les conduisit au bureau de l'Intelligence Service. Le visage radieux le plus grand des deux hommes déposa la serviette sur le bureau d'un Officier supérieur qui les attendait avec impatience.
- Alors...
- Tout est là Sir. La résistance française a fait un travail magnifique.
Le contenu de la serviette se répandit sur le bureau, des photos et des plans.
L'Officier anglais regardait avec stupéfaction les documents qui s'étalaient devant lui.
- Formidable, incroyable... les plans de la base sous-marine de La Rochelle, je ne peux presque pas y croire.
L'homme qui venait de traverser le Channel avec ces précieux documents, fouilla dans la pile de dossiers et, triomphant, en retira un fin classeur en carton.
- Des copies Sir, pour ne pas réveiller la suspicion des Allemands.
Il lui remit le classeur.
- Et là, les plans du quartier général de l'Amiral Raeder à La Rochelle, rien que ça! Tout y est détaillé, les pièces, les servitudes, même les latrines et la chambre de l'Amiral. Il y a également les tournus de garde, l'heure de la relève, le nom de la garnison et bien entendu, le nombre, les positions et le calibre de la Flack. Un sacré morceau, soit dit en passant.
L'Officier de renseignements se rasseyait.
- Je suis impressionné, excellent travail.Je vais transmettre tout ça au Haut Etat-Major sans attendre...
A Cadgwith, le 13 septembre 1942, dans le bureau de Colman, Oscar "Bob" Roberts et Joshua Fitsalus avaient déposé leur lourde veste au patère qui ployait sous le poids. Ils s'étaient installés de part et d'autre de la table qui occupait le centre de la pièce et sur laquelle il y avait une carte représentant une ville côtière, cependant aucun nom n'y figurait. Cependant le Flight Leutnant Robert reconnu immédiatement le dessin représentant des hangars à sous-marins.
- Hum... on dirait que nous allons chasser le U-Boat dans sa tanière Sir.
Coleman sourit, il alluma posément sa pipe et reprit:
- Bon esprit de déduction Sir Roberts. Vous y êtes presque, en fait c'est ce que les Allemands doivent croire; que vous êtes assez fou pour attaquer une de leur base sous-marine !
D'un bout de sa pipe, il indiqua sur la carte un immeuble au milieu d'une rue, un immeuble qui semblait insignifiant.
- Votre objectif est là Bob. C'est le quartier général de l'Amiral Raeder à La Rochelle.
Les deux pilotes se penchèrent sur la carte. Une multitude de petites croix noires y figuraient. A côté, de petites inscriptions indiquaient, 20, 37 ou 88.
Le Flying Officer Fitsalus répondit rêveur.
- Et bien on dirait que le comité d'accueil est au point. Si je ne m'abuse, il faudra bien à un moment ou à un autre traverser ce bordel...
Coleman reprit:
- Oui, il vous faudra traverser ce bordel comme vous dites Joshua. Il vous faudra non seulement le traverser mais également poser vos bombes exactement sur ce bâtiment,
Il tapota avec le bec de sa pipe sur la carte.
- ...Car il est dans l'enceinte de l'Université et de l'école de la ville et qu'au moment de votre attaque, il y aura des élèves et des professeurs en cours. En plus, il y a un orphelinat dans l'axe Nord-Sud, si vous larguez 1 seconde trop tard, il y aura de la casse.
Le Flight Leutnant Oscar "Bob" Roberts répondit:
- Pffouuu, sacré challenge. Merci de me confier cette mission de l'impossible. Au fait, on n'a qu'à faire l'attaque un samedi après-midi ou un dimanche quand il n'y a personne dans les classes.
Coleman fit la moue.
- On y a pensé... mais on a deux problèmes; de un, Raeder doit rentrer vendredi prochain à Berlin et de deux, la météo risque de se dégrader fortement ces prochains jours.
Il tira une longue bouffée et rejeta la fumée vers la lampe en opaline.
- C'est pour après-demain Bob... jeudi. Chaque Mosquito sera armé avec 2 bombes de 250lbs pour que vous puissiez garder votre vitesse maximum. Bien entendu tout se fera à moins de 50 mètres. Jeudi le temps sera excellent pour ce genre d'opérations. Pratiquement pas de vent, un plafond à 500 pieds. Tout ce qu'il faut pour vous soustraire aux radars et à la Luftwaffe. Pour ce qui est de l'approche de l'objectif, je vous laisse la liberté de l'organiser Roberts.
Il sortit d'une armoire une maquette de l'objectif.
- Construit par les hommes de l'IS sur la base de documents établis par la résistance. Messieurs, la résistance français a effectué un travail de titan pour que nous puissions monter cette opération, il nous faudra être à la hauteur. Cette maquette sera installée, ainsi qu'une carte murale, dans la salle de briefing. Vos équipages seront informés ce soir même. Interdiction jusqu'à jeudi de quitter la base.
Dans le brouhaha habituel des débuts de séances de briefing, les hommes du squadron 248 s'installèrent, impatients de connaître la raison de leur présence dans cet endroit perdu des Cornouailles. Sur l'estrade, il y a une table basse sur laquelle un objet est recouvert d'un drap, probablement une maquette. La carte qui est au mur, est également recouverte d'un rideau. C'est toujours la surprise, parfois mauvaise...
Colman suivit du FL Oscar Roberts et du FO Joshua Fitsalus font leur entrée dans le bâtiment en tôle ondulée que le vent fait grincer sinistrement. A la lumière blafarde, des abats-jour, Roberts ouvre le rideau masquant la carte.
Dans la salle, il y a une exclamation de surprise étouffée. Même sans indications sur la carte, les pilotes et leur navigateur ont compris quel genre d'objectif, ils allaient devoir attaquer ou tout du moins survoler. Après 10 minutes d'explications, alors que les navigateurs prenaient des notes sur leur navigation, la maquette fut à son tour découverte. Les équipages se pressèrent autour.
Après avoir demandé le silence, le FL Oscar "Bob" Roberts reprit:
- Bien les gars, nous allons parler de l'approche de l'objectif. Comme vous pouvez le voir, le coin est hérissé d'affûts de DCA de tout calibre. D'après nos renseignements, le secteur Nord, Nord Ouest semble le moins défendu. C'est par-là que nous allons porter notre attaque. A la tête de Red Group je prendrais l'objectif en numéro 1 par le Nord-Ouest, pendant ce temps, le groupe à Fits fera un passage par le Nord. Il est important de bien synchroniser nos manœuvres pour éviter des collisions sur l'objectif ou le souffle de nos propres bombes. Nous nous séparerons à la pointe de l'île de Ré. Demain matin, après le breakfast, les navigateurs seront avec moi pour préparer cette phase de l'attaque, les pilotes avec Fitsalus pour la préparation du matériel et des appareils. Jeudi matin 15 courant, sauf contre-ordre, démarrage des moteurs à 0600. Nous devrions être sur l'objectif vers 0830.
Les équipages quittèrent la salle en fanfaronnant comme d'habitude, tout en sachant, une boule à l'estomac qu'une baignade dans le Golf de Gascogne serait fatale aux malheureux qui se feraient descendre ou feraient une erreur de pilotage prit dans un rabattant à basse altitude.
La journée suivante passa lentement. Vers 1100, tout était prêt pour le départ. Alors que les hommes du Squadron passaient le reste de la journée en écrivant à leur famille ou en jouant aux cartes ou aux dés au mess, les mécaniciens s'affairaient auprès des Mosquito. Le soir, les pleins étaient faits et les bombes prêtes à chargées dans les soutes.
Jeudi 15 septembre 1942 à 0540, Après un dernier briefing confirmant les dispositions prises le jour avant, les équipages du Squadron 248 se dirigèrent silencieusement vers leur avion. Le vent était tombé, mais un épais brouillard recouvrait la région sur 300 pieds. La météo annonçait un éclaircissement à 8 miles de la côte. Roberts était inquiet, car la moindre erreur de navigation pouvait disséminer la formation sur plusieurs kilomètres et dans le silence radio, il serait difficile voir impossible de se regrouper. Il demanda aux équipages de voler au-dessus de la couche. Par contre si celle-ci devait s'étendre au-delà des côtes, ils devaient descendre et voler sans visibilité. Le cœur battant, il grimpa dans le Mosquito de tête. Derrière lui son coéquipier le Pilot Officer Jan Peer, taciturne mais excellent navigateur grimpa à sa suite. Dans l'habitacle, un mélange d'odeur d'huile froide, de cuir humide et de carburant se faisait sentir. Alors que le FL Roberts faisait le check de son appareil, légèrement décalé sur la droite, le PO Peer rangeait le thermos de café et les sandwichs dans les compartiments réservés à cet effet. Puis, soigneusement, il prépara la carte et les documents qu'il avait établis pour la navigation. Il était sûr de lui, il testat son compas et sa boussole et vérifia les instruments de visée de bombardement. Quand le premier moteur Merlin démarra avec fracas dans le silence ouaté du brouillard matinal, il inscrit l'heure sur son bloc.
Bientôt, un à un les Mosquito s'élancèrent dans le brouillard et se retrouvèrent en formation au-dessus de la couche. Fort heureusement, la météo ne s'était pas trompée. A 8 miles des côtes la couche de nuage se sépara en deux et sans hésiter, le leader plongea. Tentant de percer la couche du regard, le FL Oscar "Bob" Roberts, un oeil sur l'altimètre et sur le compas pour ne pas changer de cap, cherchait à apercevoir la crête des vagues. A 100 mètres, il réduisit les gaz et redressa gentiment. Il grommela:
- Mais où donc est cette fichue flotte.
Fort heureusement, quelques dizaines de mètres plus tard, l'océan apparu. Sur le haut des vagues, de petits ourlets d'écume apparaissaient. Dans l'interphone le PO Peer qui observait pensif, la fantastique étendue grise et verte, murmura:
- Ca va la mer est calme, il ne doit pas y avoir trop de vent. Ca va le faire pour la nav.
L'un après l'autre les Mosquito rejoignèrent la formation. Roberts augmenta la cadence et bientôt les bimoteurs anglais filèrent à 580 km/h au ras de l'eau. Concentrés sur leurs instruments, un oeil en permanence sur son compas et l'altimètre, les équipages restaient rivés derrière leur leader. Après 1h30 de vol, dans l'avion de tête, le navigateur tapota l'épaule de son pilote et lui tendit une tasse de thé.
- Soif Sir?
Roberts prit volontiers le gobelet que lui tendait Peer. Il dégrafa son masque à oxygène inutile à cette altitude, et bu rapidement le breuvage tiède.
- Sandwich?
Robert pris les deux tranches de pains et se mit à manger.
Soudainement, Jan Peer hurla.
- Attention dans nos 11 heures... U-BOAT.
Le long cigare gris naviguait perpendiculairement par rapport à la trajectoire des bombardiers britanniques. Dans un réflexe, lâchant son sandwich, Oscar redressa brutalement le Mosquito, faisant voler le thermos de thé dans l'habitacle. En passant en trombe au-dessus du submersible, le pilote eut le temps d'apercevoir le regard surpris des observateurs dans le kiosque. Visiblement, le ressac avec couvert le bruit des moteurs et les sous-mariniers avaient été complètement surpris par cette brusque apparition.
Oscar jura entre les dents.
- Merde, merde et merde! C'est pas vrai, quand on les cherche, on les trouve presque jamais, et là, il faut qu'on leur tombe dessus alors qu'il nous faut être le plus discret possible. Sûr qu'ils vont signaler notre présence.
S'adressant à son navigateur:
Dans l'ombre d'un bureau enfumé, deux hommes sont penchés sur une grande carte représentant la côte française, plus particulièrement la côte de la Gironde.
Le Group Captain Pikard soupira profondément et s'asseyait.
- Il leur faudra traverser le Golf... puis prendre le cap de St-Nazaire et au dernier moment virer de bord plein gaz en direction de La Rochelle. Larguer et filer... tout ça pendant 4 bonnes heures au radada... sacré sport... le Squadron 248 me semble le plus à même d'effectuer cette mission.
Se redressant sur sa chaise, il fixa le Wing Commander Colman.
- Si vous me posez la question Colman, c'est que vous avez certainement votre petite idée derrière la tête non?
Sans hésitation le Wing Commander répondit:
- Bob... je veux dire le Flight Leutnant Oscar "Bob" Roberts.
Pikard resta un moment pensif.
- Roberts... il est jeune ... c'est vrai qu'il a de l'expérience mais c'est ok pour moi, mais j'aimerais que son second soit ce Néo-Zélandais un peu fou... vous savez celui qui a mené l'attaque dans le brouillard contre le Gneisenau dans le fjord à Trondheim. Il est bon en navigation, il sera d'un précieux secours en cas de mauvais temps. Rappelez-moi son nom.
- C'est le Flying Officer Fitsalus... Oui Sir, c'est une excellente idée Joshua Fitsalus mènera le deuxième Flight.
Trois jour plus tard, les 12 Mosquito codés DM de l'escadrille B du Squadron 248 se posaient sur la base de l'aéroclub de Cadgwith dans le Cornwall. Un vent frais et humide attendait les équipages. Suivant les signes des mécaniciens, les 12 appareils s'alignèrent le long de la piste. L'une après l'autre les trappes d'accès s'ouvrirent, les sacs à effets et les parachutes lancés précédèrent les jambes des membres d'équipages qui une fois au sol, récupérèrent leurs affaires et se réunirent autour de leur leader qui venait d'être rejoint par un Wing Commander, probablement responsable de l'aérodrome.
Remontant le col de son Irwin jacket Joshua Fitsalus s'exclama en maintenant sa casquette contre les bourrasques de vent.
- Dites-moi Sir, qu'est ce qu'on fout ici, c'est quoi ce trou à rat?
L'officier supérieur répondit à la place du Flight Leutnant Roberts.
- Bonjour Messieurs, bienvenue à Cadgwith, je suis le Wing Commander Colman, responsable des opérations spéciales du Coastal Command. Soyez patient Leutnant Fitsalus, vous serez bientôt fixé.
S'adressant à tout le groupe.
- Allez au dispersal, on vous indiquera vos cantonnements. Roberts... Fitsalus, vous, vous venez avec moi.
Les pilotes du Squadron 248 se séparèrent en deux groupes.
Cinq jours auparavant, dans la nuit du 07 ou 08 septembre 1942, il y avait de l'activité dans le secteur de Rouillac en France. Cette nuit là, les maquisards s'affairaient dans un pré éloigné des habitations et se préparaient à extraire deux agents et en accueillir un autre depuis l'Angleterre. Sous les arbres, deux hommes accroupis attendent impatiemment. Le plus grand des deux tient précieusement une serviette sous le bras. Bientôt dans la nuit un ronronnement se fait entendre. Quelques minutes plus tard, des lampes se mettent à briller sporadiquement dans la nuit. Le moteur se tait et le Lysander du squadron 161, fait son approche, moteur au ralenti et se posa. Après s'être immobilisé, les deux hommes accompagnés par des maquisards en armes, prêts à faire feu de leur Sten à la moindre alerte, se précipitèrent vers le petit avion. Un inconnu quitta l'appareil et pendant que les deux hommes embarquaient rapidement, déjà, les membres de la résistance s'évanouissaient dans la nuit avec leur contact. Le Lysander avait déjà fait demi-tour et rapidement s'envola. Trois heures plus tard, il se posait sur un petit aérodrome inconnu d'Angleterre. Soulagés les deux hommes se précipitèrent dans une voiture qui les conduisit au bureau de l'Intelligence Service. Le visage radieux le plus grand des deux hommes déposa la serviette sur le bureau d'un Officier supérieur qui les attendait avec impatience.
- Alors...
- Tout est là Sir. La résistance française a fait un travail magnifique.
Le contenu de la serviette se répandit sur le bureau, des photos et des plans.
L'Officier anglais regardait avec stupéfaction les documents qui s'étalaient devant lui.
- Formidable, incroyable... les plans de la base sous-marine de La Rochelle, je ne peux presque pas y croire.
L'homme qui venait de traverser le Channel avec ces précieux documents, fouilla dans la pile de dossiers et, triomphant, en retira un fin classeur en carton.
- Des copies Sir, pour ne pas réveiller la suspicion des Allemands.
Il lui remit le classeur.
- Et là, les plans du quartier général de l'Amiral Raeder à La Rochelle, rien que ça! Tout y est détaillé, les pièces, les servitudes, même les latrines et la chambre de l'Amiral. Il y a également les tournus de garde, l'heure de la relève, le nom de la garnison et bien entendu, le nombre, les positions et le calibre de la Flack. Un sacré morceau, soit dit en passant.
L'Officier de renseignements se rasseyait.
- Je suis impressionné, excellent travail.Je vais transmettre tout ça au Haut Etat-Major sans attendre...
A Cadgwith, le 13 septembre 1942, dans le bureau de Colman, Oscar "Bob" Roberts et Joshua Fitsalus avaient déposé leur lourde veste au patère qui ployait sous le poids. Ils s'étaient installés de part et d'autre de la table qui occupait le centre de la pièce et sur laquelle il y avait une carte représentant une ville côtière, cependant aucun nom n'y figurait. Cependant le Flight Leutnant Robert reconnu immédiatement le dessin représentant des hangars à sous-marins.
- Hum... on dirait que nous allons chasser le U-Boat dans sa tanière Sir.
Coleman sourit, il alluma posément sa pipe et reprit:
- Bon esprit de déduction Sir Roberts. Vous y êtes presque, en fait c'est ce que les Allemands doivent croire; que vous êtes assez fou pour attaquer une de leur base sous-marine !
D'un bout de sa pipe, il indiqua sur la carte un immeuble au milieu d'une rue, un immeuble qui semblait insignifiant.
- Votre objectif est là Bob. C'est le quartier général de l'Amiral Raeder à La Rochelle.
Les deux pilotes se penchèrent sur la carte. Une multitude de petites croix noires y figuraient. A côté, de petites inscriptions indiquaient, 20, 37 ou 88.
Le Flying Officer Fitsalus répondit rêveur.
- Et bien on dirait que le comité d'accueil est au point. Si je ne m'abuse, il faudra bien à un moment ou à un autre traverser ce bordel...
Coleman reprit:
- Oui, il vous faudra traverser ce bordel comme vous dites Joshua. Il vous faudra non seulement le traverser mais également poser vos bombes exactement sur ce bâtiment,
Il tapota avec le bec de sa pipe sur la carte.
- ...Car il est dans l'enceinte de l'Université et de l'école de la ville et qu'au moment de votre attaque, il y aura des élèves et des professeurs en cours. En plus, il y a un orphelinat dans l'axe Nord-Sud, si vous larguez 1 seconde trop tard, il y aura de la casse.
Le Flight Leutnant Oscar "Bob" Roberts répondit:
- Pffouuu, sacré challenge. Merci de me confier cette mission de l'impossible. Au fait, on n'a qu'à faire l'attaque un samedi après-midi ou un dimanche quand il n'y a personne dans les classes.
Coleman fit la moue.
- On y a pensé... mais on a deux problèmes; de un, Raeder doit rentrer vendredi prochain à Berlin et de deux, la météo risque de se dégrader fortement ces prochains jours.
Il tira une longue bouffée et rejeta la fumée vers la lampe en opaline.
- C'est pour après-demain Bob... jeudi. Chaque Mosquito sera armé avec 2 bombes de 250lbs pour que vous puissiez garder votre vitesse maximum. Bien entendu tout se fera à moins de 50 mètres. Jeudi le temps sera excellent pour ce genre d'opérations. Pratiquement pas de vent, un plafond à 500 pieds. Tout ce qu'il faut pour vous soustraire aux radars et à la Luftwaffe. Pour ce qui est de l'approche de l'objectif, je vous laisse la liberté de l'organiser Roberts.
Il sortit d'une armoire une maquette de l'objectif.
- Construit par les hommes de l'IS sur la base de documents établis par la résistance. Messieurs, la résistance français a effectué un travail de titan pour que nous puissions monter cette opération, il nous faudra être à la hauteur. Cette maquette sera installée, ainsi qu'une carte murale, dans la salle de briefing. Vos équipages seront informés ce soir même. Interdiction jusqu'à jeudi de quitter la base.
Dans le brouhaha habituel des débuts de séances de briefing, les hommes du squadron 248 s'installèrent, impatients de connaître la raison de leur présence dans cet endroit perdu des Cornouailles. Sur l'estrade, il y a une table basse sur laquelle un objet est recouvert d'un drap, probablement une maquette. La carte qui est au mur, est également recouverte d'un rideau. C'est toujours la surprise, parfois mauvaise...
Colman suivit du FL Oscar Roberts et du FO Joshua Fitsalus font leur entrée dans le bâtiment en tôle ondulée que le vent fait grincer sinistrement. A la lumière blafarde, des abats-jour, Roberts ouvre le rideau masquant la carte.
Dans la salle, il y a une exclamation de surprise étouffée. Même sans indications sur la carte, les pilotes et leur navigateur ont compris quel genre d'objectif, ils allaient devoir attaquer ou tout du moins survoler. Après 10 minutes d'explications, alors que les navigateurs prenaient des notes sur leur navigation, la maquette fut à son tour découverte. Les équipages se pressèrent autour.
Après avoir demandé le silence, le FL Oscar "Bob" Roberts reprit:
- Bien les gars, nous allons parler de l'approche de l'objectif. Comme vous pouvez le voir, le coin est hérissé d'affûts de DCA de tout calibre. D'après nos renseignements, le secteur Nord, Nord Ouest semble le moins défendu. C'est par-là que nous allons porter notre attaque. A la tête de Red Group je prendrais l'objectif en numéro 1 par le Nord-Ouest, pendant ce temps, le groupe à Fits fera un passage par le Nord. Il est important de bien synchroniser nos manœuvres pour éviter des collisions sur l'objectif ou le souffle de nos propres bombes. Nous nous séparerons à la pointe de l'île de Ré. Demain matin, après le breakfast, les navigateurs seront avec moi pour préparer cette phase de l'attaque, les pilotes avec Fitsalus pour la préparation du matériel et des appareils. Jeudi matin 15 courant, sauf contre-ordre, démarrage des moteurs à 0600. Nous devrions être sur l'objectif vers 0830.
Les équipages quittèrent la salle en fanfaronnant comme d'habitude, tout en sachant, une boule à l'estomac qu'une baignade dans le Golf de Gascogne serait fatale aux malheureux qui se feraient descendre ou feraient une erreur de pilotage prit dans un rabattant à basse altitude.
La journée suivante passa lentement. Vers 1100, tout était prêt pour le départ. Alors que les hommes du Squadron passaient le reste de la journée en écrivant à leur famille ou en jouant aux cartes ou aux dés au mess, les mécaniciens s'affairaient auprès des Mosquito. Le soir, les pleins étaient faits et les bombes prêtes à chargées dans les soutes.
Jeudi 15 septembre 1942 à 0540, Après un dernier briefing confirmant les dispositions prises le jour avant, les équipages du Squadron 248 se dirigèrent silencieusement vers leur avion. Le vent était tombé, mais un épais brouillard recouvrait la région sur 300 pieds. La météo annonçait un éclaircissement à 8 miles de la côte. Roberts était inquiet, car la moindre erreur de navigation pouvait disséminer la formation sur plusieurs kilomètres et dans le silence radio, il serait difficile voir impossible de se regrouper. Il demanda aux équipages de voler au-dessus de la couche. Par contre si celle-ci devait s'étendre au-delà des côtes, ils devaient descendre et voler sans visibilité. Le cœur battant, il grimpa dans le Mosquito de tête. Derrière lui son coéquipier le Pilot Officer Jan Peer, taciturne mais excellent navigateur grimpa à sa suite. Dans l'habitacle, un mélange d'odeur d'huile froide, de cuir humide et de carburant se faisait sentir. Alors que le FL Roberts faisait le check de son appareil, légèrement décalé sur la droite, le PO Peer rangeait le thermos de café et les sandwichs dans les compartiments réservés à cet effet. Puis, soigneusement, il prépara la carte et les documents qu'il avait établis pour la navigation. Il était sûr de lui, il testat son compas et sa boussole et vérifia les instruments de visée de bombardement. Quand le premier moteur Merlin démarra avec fracas dans le silence ouaté du brouillard matinal, il inscrit l'heure sur son bloc.
Bientôt, un à un les Mosquito s'élancèrent dans le brouillard et se retrouvèrent en formation au-dessus de la couche. Fort heureusement, la météo ne s'était pas trompée. A 8 miles des côtes la couche de nuage se sépara en deux et sans hésiter, le leader plongea. Tentant de percer la couche du regard, le FL Oscar "Bob" Roberts, un oeil sur l'altimètre et sur le compas pour ne pas changer de cap, cherchait à apercevoir la crête des vagues. A 100 mètres, il réduisit les gaz et redressa gentiment. Il grommela:
- Mais où donc est cette fichue flotte.
Fort heureusement, quelques dizaines de mètres plus tard, l'océan apparu. Sur le haut des vagues, de petits ourlets d'écume apparaissaient. Dans l'interphone le PO Peer qui observait pensif, la fantastique étendue grise et verte, murmura:
- Ca va la mer est calme, il ne doit pas y avoir trop de vent. Ca va le faire pour la nav.
L'un après l'autre les Mosquito rejoignèrent la formation. Roberts augmenta la cadence et bientôt les bimoteurs anglais filèrent à 580 km/h au ras de l'eau. Concentrés sur leurs instruments, un oeil en permanence sur son compas et l'altimètre, les équipages restaient rivés derrière leur leader. Après 1h30 de vol, dans l'avion de tête, le navigateur tapota l'épaule de son pilote et lui tendit une tasse de thé.
- Soif Sir?
Roberts prit volontiers le gobelet que lui tendait Peer. Il dégrafa son masque à oxygène inutile à cette altitude, et bu rapidement le breuvage tiède.
- Sandwich?
Robert pris les deux tranches de pains et se mit à manger.
Soudainement, Jan Peer hurla.
- Attention dans nos 11 heures... U-BOAT.
Le long cigare gris naviguait perpendiculairement par rapport à la trajectoire des bombardiers britanniques. Dans un réflexe, lâchant son sandwich, Oscar redressa brutalement le Mosquito, faisant voler le thermos de thé dans l'habitacle. En passant en trombe au-dessus du submersible, le pilote eut le temps d'apercevoir le regard surpris des observateurs dans le kiosque. Visiblement, le ressac avec couvert le bruit des moteurs et les sous-mariniers avaient été complètement surpris par cette brusque apparition.
Oscar jura entre les dents.
- Merde, merde et merde! C'est pas vrai, quand on les cherche, on les trouve presque jamais, et là, il faut qu'on leur tombe dessus alors qu'il nous faut être le plus discret possible. Sûr qu'ils vont signaler notre présence.
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Dernière édition par le Sam 19 Jan 2008 - 22:19, édité 5 fois
615sqn_Harry- Wing Commander
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Re: René Martel, vive la France Libre
- Jan... tu peux m'indiquer notre position sur la carte?
Son n° 2 s'approcha et par la verrière, Roberts put apercevoir le pilote lui faire un signe de "on a eu chaud".
Le PO Peer répondit.
- On est sur un cap 180. Le sous-marin filait... je dirais sur un 280-300. Je pense qu'il prenait la haute-mer. Il a intérêt de rester discret, son capitaine doit penser qu'on le cherche et il doit avoir plongé comme un malade. Je pense qu'il ne donnera pas d'indications nous concernant...
Robert grommela:
- Et comment tu peux être sûr qu'il démarre sa campagne et qu'il n'est pas sur le retour.
Jan Peer sourit:
- Sa coque Sir... sa coque était flambante neuve, fraîchement peinte en gris. Après 1 ou 2 mois de mer, elles sont dans un autre état. De plus, il me semble que les vigies n'avaient pas de barbe, donc à peu près sûr que ce loup gris part en chasse. Il ne rompra jamais le silence radio.
Oscar "Bob" Roberts rigola.
- Tu as pu voir que les gars n'avaient pas de barbe !?!? Tu te fiches de moi ou quoi?A la vitesse à laquelle on est passé et avec leur ciré.
Peer gloussa:
- J'essaye de rester optimiste Sir. Mais par contre, je suis sûr pour la peinture du navire.
- Et bien, l'avenir nous dira si tu as raison.
Et le vol reprit son cours normal toujours à 580 km/h et à 20 mètres de l'océan inhospitalier.
Quarante-cinq minutes plus tard, la voix du PO Peer raisonna dans l'interphone.
- Nous sommes désormais à portée de la chasse ennemie Sir.
Le FL Roberts acquiesça du chef et le regard toujours rivé sur l'horizon tenait fermement son cap. Une nouvelle demi-heure passa quand au loin dans les nuages une bande de terre apparue.
Anxieux, Peer consulta sa carte, puis triomphant il annonça:
- L'île de Ré Sir, regardez la côte... oui c'est ça en plein dessus. Là en face, c'est le phare des Baleines. On prend un cap 120 maintenant.
Le FL Roberts, suivit fidèlement par le reste de son escadrille fit la correction de cap demandée. Il murmura:
- 12 minutes de l'objectif. Pas un chasseur boche, ça va chier.
Derrière lui, le groupe bleu, mené par Joshua Fitsalus se sépara et pris son cap d'approche.
Dix minutes plus tard, le port de La Palice apparut dans la brume matinale.
- Parfait, on est pile à la bonne place, t'es le Dieu des navigateurs Jan....
Son coéquipier rigola doucement.
- Il te reste plus qu'à être le Dieu du pilotage et moi à préparer notre retour au bercail en urgence avec toute la Luftwaffe du secteur au cul.
Il s'installa dans le nez du bombardier.
Concentré, Roberts remontait maintenant en direction de Lagord. Quand les abords de cette ville furent survolés, il effectua un brusque virage à droite. Derrière lui, les 6 Mosquito de son groupe s'étaient placés en ligne arrière.
Il passa au pas de combat et les gaz à fond il se dirigea sur le clocher de l'église de La Rochelle, il savait qu'à 11 heures se trouvait son objectif. Les Mosquito dans le fracas de leurs moteurs poussés à fond, passaient maintenant au ras des toits de La Rochelle.
Depuis son poste Jan Peer pouvait apercevoir les passants courir dans tous les sens, il aperçut également quelques uniformes feldgrau. Il ricana intérieurement.
- Courrez, courrez, bande de nigauds, c'est trop tard.
L'œil rivé au viseur Norden, il identifia la cible, il ne pouvait pas la louper, un bâtiment jaune avec un drapeau nazi contre la façade. Il donnait maintenant de brèves corrections de cap au pilote. Le FL Roberts avait ouvert la soute à bombes.
- Soute à bombes ouverte!
Peer d'une main ferme, il empoigna la commande de largage et le cœur battant, tira un coup sec sur celle-ci.
- Bombes larguées, on décroche!
Les deux bombes quittèrent leur logement dans un sifflement sinistre. Le Mosquito fit un bond dans le ciel.
- Soute à bombes fermée.
Allégé, le bimoteur augmenta sa vitesse. C'est à ce moment seulement que les deux hommes s'aperçurent qu'ils étaient encadrés par une multitude de traçantes. Derrière eux, les explosions des bombes temporisées à 5 secondes ravageaient leur cible.
Péniblement Peer quitta son poste et s'agrippant comme il pouvait dans le bombardier qui bougeait dans tous les sens pour échapper aux chapelets lumineux, s'installa sur son siège et se sangla. Derrière eux, le groupe mené par le FO Fitsalus venait de faire apparition et larguait à son tour ses bombes dans un tonnerre de feu. Pour semer encore plus la confusion, un Mosquito touché par la flack, s'écrasa brutalement dans une gerbe de flammes au milieu des bâtiments.
Oscar "Bob" Roberts s'exclama:
- Merde, bleue 3 vient de s'écraser. Pauvres gars, putain d'enfer, il faut qu'on se sorte de ce merdier et vite Jan, sinon on va se faire laminer.
Au même moment, un bruit sourd suivit d'un craquement terrible se fit entendre dans le Mosquito.
Le temps de reprendre ses esprits, le FL Roberts s'aperçut avec effroi que son moteur gauche était en flamme. Bataillant avec ses commandes pour stabiliser son appareil il hurla dans l'interphone.
-On est touché au moteur gauche! On est touché au moteur gauche. Actionnes les extincteurs Jan vite!
Derrière lui, calmement, le navigateur actionna la commande et une fumée blanche enveloppa le moteur qui s'était arrêté. Le feu s'éteignit, de l'huile brûlante maculait le capot et le dessus de l'aile. Les deux hommes se regardaient anxieux. Le retour sera difficile, très difficile.
Les servants allemands, tenant l'avion blessé dans leur viseur concentraient leurs tirs sur lui.
Faisant preuve d'audace, le pilote plongea entre deux rangées de maisons se mettant momentanément hors de portée de la DCA légère dont les tirs arrachaient les tuiles des faîtes des toits. Quelques secondes plus tard, le Mosquito redressa. Rompant le silence radio! Roberts hurla dans son micro!
- De leader à tous! Cap retour, je répète cap retour! C'est mon second qui prend la direction des opérations, je suis touché, ne m'attendez pas!
La flack avait subitement arrêté de tirer, et pour cause; là haut dans le ciel, de sinistres contacts avaient fait leur apparition. Ils plongeaient sur la formation qui maintenant s'était réunie derrière Joshua Fitsalus qui avait repéré le danger et filait plein gaz en direction des nuages qu'il atteint avec toute la formation avant que les chasseurs allemands ne purent placer un tir.
Roberts soulagé, avait pris un cap Nord Ouest et s'éloignait du secteur, espérant ce soustraire aux Bf109. Mais sa position avait dû être signalée par les unités terrestres car avec angoisse, les deux britanniques virent les avions allemands converger sur eux.
Jan Peer interpella son leader.
- Sir on est foutu, jamais on leur échappera sur un moteur. Virez à gauche dans les nuages et ensuite direction le continent. Ils nous chercheront pas là, on se posera quelque part sur le ventre, la résistance française est très active par ici...
Ce même jour, tôt le matin, Julie Lebour avait pris le train de Rouillac avec sa mère pour aller voir une tante habitant Voutron. Il n'y avait aucun moyen de transport de la gare à la résidence de sa tante. Alors que les deux femmes marchaient, elles entendirent un grondement sourd provenant du Nord Ouest. La mère de Julie s'arrêta:
- On dirait que La Rochelle est sous le feu, non?
Elle avait le sourire, elle savait pourquoi. Julie était inquiète, depuis qu'elle avait appris que son père était un des mentors de la résistance de la région, elle savait qu'ils étaient en danger. Si les Allemands venaient à savoir quelque chose, ils seraient pour sûr, tous arrêtés et fusillés.
Elles reprirent sans un mot leur route vers Voutron. Le ronronnement d'un avion attira bientôt leur attention. A la vue de l'appareil Julie s'exclama:
- Maman! Regardes là-bas! Un bombardier anglais. Il doit avoir des ennuis, il a un moteur qui fume!
Le Mosquito passa à basse vitesse au-dessus des deux femmes. Julie pu distinctement apercevoir le code de l'appareil, DM-A. C'est la première fois qu'elle voyait un avion britannique et son cœur se serra à l'idée que René Martel volait dans un avion portant les mêmes cocardes. Le bimoteur blessé s'éloigna vers le Sud-Est et disparu à l'horizon.
La mère de Julie murmura:
- Il va se poser c'est sûr, il ne peut pas rentrer, pas dans cet état. Je pense qu'il était sur La Rochelle. Viens, on va chez tante Lucie, ensuite on avisera le réseau pour voir si on peut faire quelque chose pour ces Anglais.
Une colonne de véhicules allemands, mené par un Kubelwagen passa en trombe devant les deux femmes qui s'écartèrent prestement de la chaussée.
Julie repris:
- Il y a des chances que les Allemands les prennent avant nous...
Sans un mot elles reprirent leur route.
Dans le Mosquito désemparé, les deux Britanniques avaient semé les Messerschmitt. Ils avaient calculé le carburant qui leur restait, mais le réservoir droit s'était vidé, avec un demi-réservoir gauche, ils leur étaient absolument impossible de tenter un retour sur la Grande-Bretagne. Ils s'étaient résigné à chercher un terrain désert pour se poser. A un moment donné, Roberts aperçu une grande prairie éloignée de toutes habitations.
- C'est là que notre destin se scelle Jan...
Le Mosquito s'approcha de la terre. A 5 mètres du sol, le FL Roberts arrêta le moteur droit et attendit le dernier moment pour plaquer le bimoteur sur le sol tourbeux. L'avion toucha le sol doucement et en moins de 50 mètres s'immobilisa presque intact.
Abasourdis par ce qu'ils leur arrivaient les deux hommes ouvrirent la trappe latérale et quittèrent l'avion. Ils étaient seuls. Oscar retourna dans l'habitacle et saisi un sac contenant divers effets. Il en extirpa une grenade. S'adressant à Peer.
- Pas question de le laisser aux mains des Fritz. Ecartes-toi... vite.
Peer le retint par le bras.
- Non... Attendez... Si vous faites ça l'explosion va s'entendre à des kilomètres sans compter la fumée de l'incendie. On s'en fout de cette breloque, il est irréparable de toute façon et ce n'est pas le premier Mozzie abattu sur sol ennemi. Venez, on va aller se réfugier dans le bois là bas.
Son coéquipier hésita. Peer le secoua par le bras.
- Allez, allez venez. Qu'est ce que vous attendez, vous ne voulez pas attendre que les Fritz se pointent non.
Les deux hommes filèrent au pas de course vers la forêt...
Son n° 2 s'approcha et par la verrière, Roberts put apercevoir le pilote lui faire un signe de "on a eu chaud".
Le PO Peer répondit.
- On est sur un cap 180. Le sous-marin filait... je dirais sur un 280-300. Je pense qu'il prenait la haute-mer. Il a intérêt de rester discret, son capitaine doit penser qu'on le cherche et il doit avoir plongé comme un malade. Je pense qu'il ne donnera pas d'indications nous concernant...
Robert grommela:
- Et comment tu peux être sûr qu'il démarre sa campagne et qu'il n'est pas sur le retour.
Jan Peer sourit:
- Sa coque Sir... sa coque était flambante neuve, fraîchement peinte en gris. Après 1 ou 2 mois de mer, elles sont dans un autre état. De plus, il me semble que les vigies n'avaient pas de barbe, donc à peu près sûr que ce loup gris part en chasse. Il ne rompra jamais le silence radio.
Oscar "Bob" Roberts rigola.
- Tu as pu voir que les gars n'avaient pas de barbe !?!? Tu te fiches de moi ou quoi?A la vitesse à laquelle on est passé et avec leur ciré.
Peer gloussa:
- J'essaye de rester optimiste Sir. Mais par contre, je suis sûr pour la peinture du navire.
- Et bien, l'avenir nous dira si tu as raison.
Et le vol reprit son cours normal toujours à 580 km/h et à 20 mètres de l'océan inhospitalier.
Quarante-cinq minutes plus tard, la voix du PO Peer raisonna dans l'interphone.
- Nous sommes désormais à portée de la chasse ennemie Sir.
Le FL Roberts acquiesça du chef et le regard toujours rivé sur l'horizon tenait fermement son cap. Une nouvelle demi-heure passa quand au loin dans les nuages une bande de terre apparue.
Anxieux, Peer consulta sa carte, puis triomphant il annonça:
- L'île de Ré Sir, regardez la côte... oui c'est ça en plein dessus. Là en face, c'est le phare des Baleines. On prend un cap 120 maintenant.
Le FL Roberts, suivit fidèlement par le reste de son escadrille fit la correction de cap demandée. Il murmura:
- 12 minutes de l'objectif. Pas un chasseur boche, ça va chier.
Derrière lui, le groupe bleu, mené par Joshua Fitsalus se sépara et pris son cap d'approche.
Dix minutes plus tard, le port de La Palice apparut dans la brume matinale.
- Parfait, on est pile à la bonne place, t'es le Dieu des navigateurs Jan....
Son coéquipier rigola doucement.
- Il te reste plus qu'à être le Dieu du pilotage et moi à préparer notre retour au bercail en urgence avec toute la Luftwaffe du secteur au cul.
Il s'installa dans le nez du bombardier.
Concentré, Roberts remontait maintenant en direction de Lagord. Quand les abords de cette ville furent survolés, il effectua un brusque virage à droite. Derrière lui, les 6 Mosquito de son groupe s'étaient placés en ligne arrière.
Il passa au pas de combat et les gaz à fond il se dirigea sur le clocher de l'église de La Rochelle, il savait qu'à 11 heures se trouvait son objectif. Les Mosquito dans le fracas de leurs moteurs poussés à fond, passaient maintenant au ras des toits de La Rochelle.
Depuis son poste Jan Peer pouvait apercevoir les passants courir dans tous les sens, il aperçut également quelques uniformes feldgrau. Il ricana intérieurement.
- Courrez, courrez, bande de nigauds, c'est trop tard.
L'œil rivé au viseur Norden, il identifia la cible, il ne pouvait pas la louper, un bâtiment jaune avec un drapeau nazi contre la façade. Il donnait maintenant de brèves corrections de cap au pilote. Le FL Roberts avait ouvert la soute à bombes.
- Soute à bombes ouverte!
Peer d'une main ferme, il empoigna la commande de largage et le cœur battant, tira un coup sec sur celle-ci.
- Bombes larguées, on décroche!
Les deux bombes quittèrent leur logement dans un sifflement sinistre. Le Mosquito fit un bond dans le ciel.
- Soute à bombes fermée.
Allégé, le bimoteur augmenta sa vitesse. C'est à ce moment seulement que les deux hommes s'aperçurent qu'ils étaient encadrés par une multitude de traçantes. Derrière eux, les explosions des bombes temporisées à 5 secondes ravageaient leur cible.
Péniblement Peer quitta son poste et s'agrippant comme il pouvait dans le bombardier qui bougeait dans tous les sens pour échapper aux chapelets lumineux, s'installa sur son siège et se sangla. Derrière eux, le groupe mené par le FO Fitsalus venait de faire apparition et larguait à son tour ses bombes dans un tonnerre de feu. Pour semer encore plus la confusion, un Mosquito touché par la flack, s'écrasa brutalement dans une gerbe de flammes au milieu des bâtiments.
Oscar "Bob" Roberts s'exclama:
- Merde, bleue 3 vient de s'écraser. Pauvres gars, putain d'enfer, il faut qu'on se sorte de ce merdier et vite Jan, sinon on va se faire laminer.
Au même moment, un bruit sourd suivit d'un craquement terrible se fit entendre dans le Mosquito.
Le temps de reprendre ses esprits, le FL Roberts s'aperçut avec effroi que son moteur gauche était en flamme. Bataillant avec ses commandes pour stabiliser son appareil il hurla dans l'interphone.
-On est touché au moteur gauche! On est touché au moteur gauche. Actionnes les extincteurs Jan vite!
Derrière lui, calmement, le navigateur actionna la commande et une fumée blanche enveloppa le moteur qui s'était arrêté. Le feu s'éteignit, de l'huile brûlante maculait le capot et le dessus de l'aile. Les deux hommes se regardaient anxieux. Le retour sera difficile, très difficile.
Les servants allemands, tenant l'avion blessé dans leur viseur concentraient leurs tirs sur lui.
Faisant preuve d'audace, le pilote plongea entre deux rangées de maisons se mettant momentanément hors de portée de la DCA légère dont les tirs arrachaient les tuiles des faîtes des toits. Quelques secondes plus tard, le Mosquito redressa. Rompant le silence radio! Roberts hurla dans son micro!
- De leader à tous! Cap retour, je répète cap retour! C'est mon second qui prend la direction des opérations, je suis touché, ne m'attendez pas!
La flack avait subitement arrêté de tirer, et pour cause; là haut dans le ciel, de sinistres contacts avaient fait leur apparition. Ils plongeaient sur la formation qui maintenant s'était réunie derrière Joshua Fitsalus qui avait repéré le danger et filait plein gaz en direction des nuages qu'il atteint avec toute la formation avant que les chasseurs allemands ne purent placer un tir.
Roberts soulagé, avait pris un cap Nord Ouest et s'éloignait du secteur, espérant ce soustraire aux Bf109. Mais sa position avait dû être signalée par les unités terrestres car avec angoisse, les deux britanniques virent les avions allemands converger sur eux.
Jan Peer interpella son leader.
- Sir on est foutu, jamais on leur échappera sur un moteur. Virez à gauche dans les nuages et ensuite direction le continent. Ils nous chercheront pas là, on se posera quelque part sur le ventre, la résistance française est très active par ici...
Ce même jour, tôt le matin, Julie Lebour avait pris le train de Rouillac avec sa mère pour aller voir une tante habitant Voutron. Il n'y avait aucun moyen de transport de la gare à la résidence de sa tante. Alors que les deux femmes marchaient, elles entendirent un grondement sourd provenant du Nord Ouest. La mère de Julie s'arrêta:
- On dirait que La Rochelle est sous le feu, non?
Elle avait le sourire, elle savait pourquoi. Julie était inquiète, depuis qu'elle avait appris que son père était un des mentors de la résistance de la région, elle savait qu'ils étaient en danger. Si les Allemands venaient à savoir quelque chose, ils seraient pour sûr, tous arrêtés et fusillés.
Elles reprirent sans un mot leur route vers Voutron. Le ronronnement d'un avion attira bientôt leur attention. A la vue de l'appareil Julie s'exclama:
- Maman! Regardes là-bas! Un bombardier anglais. Il doit avoir des ennuis, il a un moteur qui fume!
Le Mosquito passa à basse vitesse au-dessus des deux femmes. Julie pu distinctement apercevoir le code de l'appareil, DM-A. C'est la première fois qu'elle voyait un avion britannique et son cœur se serra à l'idée que René Martel volait dans un avion portant les mêmes cocardes. Le bimoteur blessé s'éloigna vers le Sud-Est et disparu à l'horizon.
La mère de Julie murmura:
- Il va se poser c'est sûr, il ne peut pas rentrer, pas dans cet état. Je pense qu'il était sur La Rochelle. Viens, on va chez tante Lucie, ensuite on avisera le réseau pour voir si on peut faire quelque chose pour ces Anglais.
Une colonne de véhicules allemands, mené par un Kubelwagen passa en trombe devant les deux femmes qui s'écartèrent prestement de la chaussée.
Julie repris:
- Il y a des chances que les Allemands les prennent avant nous...
Sans un mot elles reprirent leur route.
Dans le Mosquito désemparé, les deux Britanniques avaient semé les Messerschmitt. Ils avaient calculé le carburant qui leur restait, mais le réservoir droit s'était vidé, avec un demi-réservoir gauche, ils leur étaient absolument impossible de tenter un retour sur la Grande-Bretagne. Ils s'étaient résigné à chercher un terrain désert pour se poser. A un moment donné, Roberts aperçu une grande prairie éloignée de toutes habitations.
- C'est là que notre destin se scelle Jan...
Le Mosquito s'approcha de la terre. A 5 mètres du sol, le FL Roberts arrêta le moteur droit et attendit le dernier moment pour plaquer le bimoteur sur le sol tourbeux. L'avion toucha le sol doucement et en moins de 50 mètres s'immobilisa presque intact.
Abasourdis par ce qu'ils leur arrivaient les deux hommes ouvrirent la trappe latérale et quittèrent l'avion. Ils étaient seuls. Oscar retourna dans l'habitacle et saisi un sac contenant divers effets. Il en extirpa une grenade. S'adressant à Peer.
- Pas question de le laisser aux mains des Fritz. Ecartes-toi... vite.
Peer le retint par le bras.
- Non... Attendez... Si vous faites ça l'explosion va s'entendre à des kilomètres sans compter la fumée de l'incendie. On s'en fout de cette breloque, il est irréparable de toute façon et ce n'est pas le premier Mozzie abattu sur sol ennemi. Venez, on va aller se réfugier dans le bois là bas.
Son coéquipier hésita. Peer le secoua par le bras.
- Allez, allez venez. Qu'est ce que vous attendez, vous ne voulez pas attendre que les Fritz se pointent non.
Les deux hommes filèrent au pas de course vers la forêt...
Dernière édition par 615sqn_Harry le Mer 10 Nov 2010 - 23:36, édité 6 fois
615sqn_Harry- Wing Commander
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Re: René Martel, vive la France Libre
Tout simplement fantastique.
Sir Harry, quitte la Police et envoie tout ça a un bon éditeur!!!!
Les gars, je croyais connaître un as du manche à balais, je découvre un génie du récit historique.
Sir Harry, quitte la Police et envoie tout ça a un bon éditeur!!!!
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615sqn_Pyker- Squadron Leader
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Re: René Martel, vive la France Libre
Géniallissime
J'attend la suite comme un gosse ! :saut:
J'attend la suite comme un gosse ! :saut:
RTA_Oscarbob- Lt Colonel
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Re: René Martel, vive la France Libre
Les deux hommes se laissèrent tomber dans les fourrés. Reprenant son souffle Roberts était entrain de se demander comment il avait pu se fourrer dans une situation pareille. Le risque d'être un jour abattu, existait, d'être blessé ou de mourir, ils le savaient tous, mais ils s'efforçaient de ne pas trop y penser. Son coéquipier le regardait:
- Et bien on dirait que notre tour est venu hein Sir.
Oscar "Bob" Roberts restait pensif:
- Ouai, va falloir qu'on fasse preuve d'imagination pour se sortir de ce pétrin. Vous avez une idée à proposer?
Peer s'était brusquement levé.
- Je n'ai pas grand chose à proposer, mais je suggère que nous quittions rapidement ce secteur, les Allemands ne vont pas tarder à rappliquer.
Les deux hommes reprirent leur marche. Ils avaient effectué une cinquantaine de mètres quand un ronronnement retint leur attention. Roberts extirpa de son sac une paire de jumelles et accroupis s'approcha de la lisière du bois. Au travers de ses lunettes, il pouvait voir distinctement la carcasse disloquée de son malheureux Mosquito. Un peu plus loin, au bout d'un petit chemin, un half track suivi de deux motards venait de faire son apparition.
- Merde, ils sont déjà là, allez, on fiche le camp d'ici.
Les deux pilotes de la RAF prirent la fuite en courant dans le sens opposé. Haletant, Jan Peer interpella son camarade.
- Fallais s'y attendre... ils n'allaient pour nous laisser deux heures de battement pour filer. J'espère qu'ils n'ont pas des chiens, sinon on est foutu.
La forêt couvrait une petite colline. Bientôt, ils arrivèrent au sommet, Essoufflés, ils firent une courte pause. Au loin l'aboiement, de chiens leur glaça le sang.
- Merde... des chiens, venez Peer, il ne faut pas perdre de temps...
Les deux britanniques reprirent leur course de plus belle. Ils dévalaient maintenant la pente à toutes jambes. Ils atteignirent la lisière et s'arrêtèrent, indécis quant au chemin à prendre. Derrière eux, l'aboiement des chiens se faisait plus distinct. Impossible de faire demi-tour. Juste après la lisière, il y avait des vignes, avec au bas de la colline un village. Roberts regarda son coéquipier, le visage anxieux.
- On a pas le choix Jan, on file dans les vignes. Allez venez, allons-y.
Ils se mirent à dévaler le coteau, de belles grosses grappes de raisins pendaient aux seppes de vignes. Ils sautèrent un mur de pierres sèches dont la partie basse s'avéra plus haute qu'ils le pensaient. Roberts chuta, alors que Peer l'aidait à se relever, ils constatèrent que des hommes faisant les vendanges les regardaient visiblement surpris pas cette apparition subite. L'un des hommes s'exclama:
- Merde des Anglais, des pilotes anglais, qu'est qu'on fait Edouard?
Celui qui se faisait appeler par ce prénom, était grand, il portait une chemise dont les manches remontaient au-dessus des coudes, n'hésita pas une seconde. Il déposa sa hotte et se précipita vers eux:
- Venez... venez... allez vite.
Les deux britanniques qui ne parlaient pas le français ne se firent pas prier. Derrière, eux dans le bois, les encouragements donnés par les soldats allemands à lleurs chiens, parvenait déjà à leurs oreilles. Le nommé Edouard qui semblait être le chef, apostropha les autres vendangeurs.
- Allez les gars, ne restez pas planter là comme ça, effacez les traces des britanniques... allez vite, les Boches arrivent.
Alors que les vendangeurs piétinaient le passage des deux Anglais. Les trois hommes descendirent les vignes au pas de courses jusqu'à une cabane en surplomb et où les hommes y travaillant devaient y faire leur pause. A l'intérieur, il y avait une table et des chaises que le Français écarta d'un coup de rein. Il s'accroupit et leva trois lourdes planches. D'un signe de la tête, il indiqua aux deux pilotes de se cacher sous le plancher.
- Allez vite, il n'y pas de temps à perdre.
Une fois les deux hommes couchés, il remit les planches en place. Il se rendit dans une armoire, saisit une boite de poivre moulu et en recouvrit le sol. Il remit en place la table et les chaises. Tout c'était passé très vite, Roberts et Peer, coincés dans une position plus qu'inconfortable, attendaient maintenant haletant, essayant de calmer leurs battements de cœur et de reprendre leur souffle. A la lisière de la forêt, les chiens des soldats allemands semblaient hésitants. Un sous-officier, visiblement exaspéré par ce contre-temps, vociférait contre ses hommes et leur bête.
Dans leur cache, le visage couvert de sueur, les deux hommes attendaient.
Les Français avaient repris leur activité comme si de rien n'était. Edouard, appuyé sur le manche d'un piochard, observait maintenant les Allemands comme s'il assistait à un spectacle. Il s'efforçait d'avoir le regard surpris. Bientôt, il fut apostrophé brutalement par le sous-officier.
- Nous recherchons deux pilotes anglais! Les avez-vous vu? Ils doivent être dans le secteur! Nos chiens ont perdu leur trace juste ici en dessus.
Il indiqua la lisière de la forêt.
Très calmement Edouard répondit:
- Désolé M'ssieur le sous-officier, on travaillait la tête dans nos seppes, on a rien vu. Juste entendu du bruit là-haut près du bois, même qu'on a cru que c'était un cerf, hein Baptiste?
Le prénommé Baptiste, une brindille d'herbe dans la bouche, acquiesça de la tête.
Edouard, poursuivit:
- A mon avis, ils ont dû longer la lisière vos fuyards chef!
Les lèvres pincées, le regard sombre, le sous-officier s'approcha:
- Ne vous foutez pas de ma gueule... hein. Appelez vos ouvriers! Ils ont intérêt d'avoir des papiers en ordre, sinon je vous garantie que je n'aurais aucun scrupule à vous remettre à la Gestapo.
S'adressant à un de ses sulbaternes:
- Heinz! Prenez quatre hommes plus les conducteurs de chiens et remontez la lisière!
Alors que la patrouille poursuivait son chemin, il fit son contrôle.
Edouard avait des papiers en ordre ainsi que tous les hommes qui travaillaient avec lui. L'Allemand était visiblement exaspéré. Le Français reprit ses papiers:
- C'est bon sergent! On peut continuer? Je vous rappelle que cette vigne et le produit qui en est retiré "appartiennent" au Général Strub. Je ne suis pas sûr qu'il serait satisfait que nous faisons l'objet de tracasseries de votre part. Nous n'avons rien à voir dans votre histoire de fuyards.
Mais le soldat allemand n'était pas du genre à se laisser impressionner.
- Je sais tout cela M. Martel. Nous allons quand même procéder à une fouille du coin et gare à vous si nous trouvons, ne serait-ce que le moindre indice nous indiquant que vous avez aidé les deux pilotes ennemis que nous recherchons.
Sous le plancher, les deux anglais étaient maintenant très calmes. Ils savaient que leur destin allait se jouer dans les minutes qui allaient suivre. Deux paires de bottes se mirent à arpenter le local au-dessus de leur tête. A travers les fines jointures laissant passer un peu de lumière, à quelques centimètres de leur visage, Roberts et son compagnon d'infortune pouvaient apercevoir la semelle des chaussures de ceux qui les cherchaient. A chaque pas, une fine poussière leur tombait dans les yeux. Ils eurent la même pensée, pourvu qu'aucun des deux n'éternue...
Mais bientôt, les pas s'éloignèrent vers la porte qui se referma. Ils restèrent ainsi dans le silence, sans bouger. Dehors, les intonations des voix étaient indistinctes, mais ils n'arrivaient à déterminer qui parlaient. Ils ne bougeaient pas, bien décidé à rester jusqu'à ce qu'on vienne les chercher, plusieurs jours si nécessaire. Les heures se mirent à s'égrener, interminables. De temps en temps, ils jetaient un coup d'œil à leur montre.
Le dernier Mosquito se posait à Cadgwith. Le visage fatigué, Joshua Fitsalus quitta l'habitacle de son appareil, Il regarda celui de son n° 4, criblé d'impacts, celui de Red 2, dont le capot moteur droit était maculé d'huile et il vit également deux emplacements libres. Bleu 3 était piloté par deux Australiens, les malheureux n'avaient eu aucune chance. Et puis il y avait une autre absence, plus douloureuse celle-là. Le Mosquito codé DM-A n'était pas rentré. Ce soir, les deux amis, ne pourraient pas refaire leur journée autour d'une bonne bière, comme d'habitude. Son second, le Flight Sergent Donohue lui mis la main sur l'épaule:
- Ca devait arriver ... Sir... on le savait tous. On le sait tous qu'un jour on ne peut pas rentrer. Demain ça sera peut-être nous...
FO Fitsalus restait un moment pensif, il murmura:
- Ouai t'as raison... t'as raison, mais enfin, on croit toujours que ça n'arrive qu'aux autres... et puis quand c'est un bon copain... merde quoi.
Son barda sur l'épaule, il s'approcha de Coleman.
- Mission accomplie Sir.. enfin je le crois... nos bombes ont détruit l'objectif.. nous avons deux pertes ... mon n° 3 Cooper et Conaugh et puis... on a perdu Roberts et Peer.
Il avait les larmes aux yeux.
Il avait tout juste 21 ans. Deux ans de guerre avait fait de lui un homme. Il s'était construit une carapace, mais les événements difficiles se chargeaient de lui rappeler régulièrement que la guerre l'avait empêché de profiter de sa jeunesse.
Coleman resta silencieux un instant.
- Bien je vous remercie Joshua. Vous avez fait du bon boulot. Je comprends... Allez boire une bière, vous me ferez votre rapport plus tard.
Le FO Fitsalus le fixa dans les yeux durement.
- Négatif Sir, je dois faire ce rapport maintenant, les pontes de l'IS attendent dessus. Il remit son matériel à Donohue.
- Mettez ça dans mon vestiaire, vous voulez bien?
Il était redevenu un soldat.
- Et bien on dirait que notre tour est venu hein Sir.
Oscar "Bob" Roberts restait pensif:
- Ouai, va falloir qu'on fasse preuve d'imagination pour se sortir de ce pétrin. Vous avez une idée à proposer?
Peer s'était brusquement levé.
- Je n'ai pas grand chose à proposer, mais je suggère que nous quittions rapidement ce secteur, les Allemands ne vont pas tarder à rappliquer.
Les deux hommes reprirent leur marche. Ils avaient effectué une cinquantaine de mètres quand un ronronnement retint leur attention. Roberts extirpa de son sac une paire de jumelles et accroupis s'approcha de la lisière du bois. Au travers de ses lunettes, il pouvait voir distinctement la carcasse disloquée de son malheureux Mosquito. Un peu plus loin, au bout d'un petit chemin, un half track suivi de deux motards venait de faire son apparition.
- Merde, ils sont déjà là, allez, on fiche le camp d'ici.
Les deux pilotes de la RAF prirent la fuite en courant dans le sens opposé. Haletant, Jan Peer interpella son camarade.
- Fallais s'y attendre... ils n'allaient pour nous laisser deux heures de battement pour filer. J'espère qu'ils n'ont pas des chiens, sinon on est foutu.
La forêt couvrait une petite colline. Bientôt, ils arrivèrent au sommet, Essoufflés, ils firent une courte pause. Au loin l'aboiement, de chiens leur glaça le sang.
- Merde... des chiens, venez Peer, il ne faut pas perdre de temps...
Les deux britanniques reprirent leur course de plus belle. Ils dévalaient maintenant la pente à toutes jambes. Ils atteignirent la lisière et s'arrêtèrent, indécis quant au chemin à prendre. Derrière eux, l'aboiement des chiens se faisait plus distinct. Impossible de faire demi-tour. Juste après la lisière, il y avait des vignes, avec au bas de la colline un village. Roberts regarda son coéquipier, le visage anxieux.
- On a pas le choix Jan, on file dans les vignes. Allez venez, allons-y.
Ils se mirent à dévaler le coteau, de belles grosses grappes de raisins pendaient aux seppes de vignes. Ils sautèrent un mur de pierres sèches dont la partie basse s'avéra plus haute qu'ils le pensaient. Roberts chuta, alors que Peer l'aidait à se relever, ils constatèrent que des hommes faisant les vendanges les regardaient visiblement surpris pas cette apparition subite. L'un des hommes s'exclama:
- Merde des Anglais, des pilotes anglais, qu'est qu'on fait Edouard?
Celui qui se faisait appeler par ce prénom, était grand, il portait une chemise dont les manches remontaient au-dessus des coudes, n'hésita pas une seconde. Il déposa sa hotte et se précipita vers eux:
- Venez... venez... allez vite.
Les deux britanniques qui ne parlaient pas le français ne se firent pas prier. Derrière, eux dans le bois, les encouragements donnés par les soldats allemands à lleurs chiens, parvenait déjà à leurs oreilles. Le nommé Edouard qui semblait être le chef, apostropha les autres vendangeurs.
- Allez les gars, ne restez pas planter là comme ça, effacez les traces des britanniques... allez vite, les Boches arrivent.
Alors que les vendangeurs piétinaient le passage des deux Anglais. Les trois hommes descendirent les vignes au pas de courses jusqu'à une cabane en surplomb et où les hommes y travaillant devaient y faire leur pause. A l'intérieur, il y avait une table et des chaises que le Français écarta d'un coup de rein. Il s'accroupit et leva trois lourdes planches. D'un signe de la tête, il indiqua aux deux pilotes de se cacher sous le plancher.
- Allez vite, il n'y pas de temps à perdre.
Une fois les deux hommes couchés, il remit les planches en place. Il se rendit dans une armoire, saisit une boite de poivre moulu et en recouvrit le sol. Il remit en place la table et les chaises. Tout c'était passé très vite, Roberts et Peer, coincés dans une position plus qu'inconfortable, attendaient maintenant haletant, essayant de calmer leurs battements de cœur et de reprendre leur souffle. A la lisière de la forêt, les chiens des soldats allemands semblaient hésitants. Un sous-officier, visiblement exaspéré par ce contre-temps, vociférait contre ses hommes et leur bête.
Dans leur cache, le visage couvert de sueur, les deux hommes attendaient.
Les Français avaient repris leur activité comme si de rien n'était. Edouard, appuyé sur le manche d'un piochard, observait maintenant les Allemands comme s'il assistait à un spectacle. Il s'efforçait d'avoir le regard surpris. Bientôt, il fut apostrophé brutalement par le sous-officier.
- Nous recherchons deux pilotes anglais! Les avez-vous vu? Ils doivent être dans le secteur! Nos chiens ont perdu leur trace juste ici en dessus.
Il indiqua la lisière de la forêt.
Très calmement Edouard répondit:
- Désolé M'ssieur le sous-officier, on travaillait la tête dans nos seppes, on a rien vu. Juste entendu du bruit là-haut près du bois, même qu'on a cru que c'était un cerf, hein Baptiste?
Le prénommé Baptiste, une brindille d'herbe dans la bouche, acquiesça de la tête.
Edouard, poursuivit:
- A mon avis, ils ont dû longer la lisière vos fuyards chef!
Les lèvres pincées, le regard sombre, le sous-officier s'approcha:
- Ne vous foutez pas de ma gueule... hein. Appelez vos ouvriers! Ils ont intérêt d'avoir des papiers en ordre, sinon je vous garantie que je n'aurais aucun scrupule à vous remettre à la Gestapo.
S'adressant à un de ses sulbaternes:
- Heinz! Prenez quatre hommes plus les conducteurs de chiens et remontez la lisière!
Alors que la patrouille poursuivait son chemin, il fit son contrôle.
Edouard avait des papiers en ordre ainsi que tous les hommes qui travaillaient avec lui. L'Allemand était visiblement exaspéré. Le Français reprit ses papiers:
- C'est bon sergent! On peut continuer? Je vous rappelle que cette vigne et le produit qui en est retiré "appartiennent" au Général Strub. Je ne suis pas sûr qu'il serait satisfait que nous faisons l'objet de tracasseries de votre part. Nous n'avons rien à voir dans votre histoire de fuyards.
Mais le soldat allemand n'était pas du genre à se laisser impressionner.
- Je sais tout cela M. Martel. Nous allons quand même procéder à une fouille du coin et gare à vous si nous trouvons, ne serait-ce que le moindre indice nous indiquant que vous avez aidé les deux pilotes ennemis que nous recherchons.
Sous le plancher, les deux anglais étaient maintenant très calmes. Ils savaient que leur destin allait se jouer dans les minutes qui allaient suivre. Deux paires de bottes se mirent à arpenter le local au-dessus de leur tête. A travers les fines jointures laissant passer un peu de lumière, à quelques centimètres de leur visage, Roberts et son compagnon d'infortune pouvaient apercevoir la semelle des chaussures de ceux qui les cherchaient. A chaque pas, une fine poussière leur tombait dans les yeux. Ils eurent la même pensée, pourvu qu'aucun des deux n'éternue...
Mais bientôt, les pas s'éloignèrent vers la porte qui se referma. Ils restèrent ainsi dans le silence, sans bouger. Dehors, les intonations des voix étaient indistinctes, mais ils n'arrivaient à déterminer qui parlaient. Ils ne bougeaient pas, bien décidé à rester jusqu'à ce qu'on vienne les chercher, plusieurs jours si nécessaire. Les heures se mirent à s'égrener, interminables. De temps en temps, ils jetaient un coup d'œil à leur montre.
Le dernier Mosquito se posait à Cadgwith. Le visage fatigué, Joshua Fitsalus quitta l'habitacle de son appareil, Il regarda celui de son n° 4, criblé d'impacts, celui de Red 2, dont le capot moteur droit était maculé d'huile et il vit également deux emplacements libres. Bleu 3 était piloté par deux Australiens, les malheureux n'avaient eu aucune chance. Et puis il y avait une autre absence, plus douloureuse celle-là. Le Mosquito codé DM-A n'était pas rentré. Ce soir, les deux amis, ne pourraient pas refaire leur journée autour d'une bonne bière, comme d'habitude. Son second, le Flight Sergent Donohue lui mis la main sur l'épaule:
- Ca devait arriver ... Sir... on le savait tous. On le sait tous qu'un jour on ne peut pas rentrer. Demain ça sera peut-être nous...
FO Fitsalus restait un moment pensif, il murmura:
- Ouai t'as raison... t'as raison, mais enfin, on croit toujours que ça n'arrive qu'aux autres... et puis quand c'est un bon copain... merde quoi.
Son barda sur l'épaule, il s'approcha de Coleman.
- Mission accomplie Sir.. enfin je le crois... nos bombes ont détruit l'objectif.. nous avons deux pertes ... mon n° 3 Cooper et Conaugh et puis... on a perdu Roberts et Peer.
Il avait les larmes aux yeux.
Il avait tout juste 21 ans. Deux ans de guerre avait fait de lui un homme. Il s'était construit une carapace, mais les événements difficiles se chargeaient de lui rappeler régulièrement que la guerre l'avait empêché de profiter de sa jeunesse.
Coleman resta silencieux un instant.
- Bien je vous remercie Joshua. Vous avez fait du bon boulot. Je comprends... Allez boire une bière, vous me ferez votre rapport plus tard.
Le FO Fitsalus le fixa dans les yeux durement.
- Négatif Sir, je dois faire ce rapport maintenant, les pontes de l'IS attendent dessus. Il remit son matériel à Donohue.
- Mettez ça dans mon vestiaire, vous voulez bien?
Il était redevenu un soldat.
Dernière édition par le Mer 24 Jan 2007 - 14:05, édité 4 fois
615sqn_Harry- Wing Commander
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Date d'inscription : 26/10/2005
Re: René Martel, vive la France Libre
La nuit était tombée. Les deux Anglais étaient toujours sous leur plancher. Ils n'avaient pas échangé le moindre mot. Alors que courbaturé, Roberts hésitait à tenter de sortir seul de la cache. Il perçu un léger grincement. La porte s'ouvrait, elle se referma doucement. Au travers des interstices les deux hommes essayaient de percevoir de la lumière, ils étaient toujours dans les ténèbres. Quelqu'un était là, ils entendaient nettement des pas glissés. La table fut déplacée sans un bruit, ainsi que les chaises. Un léger craquement et une première planche fut dégagée au-dessus d'eux. Une bouffée d'air frais plutôt agréable envahi la cache. Une allumette craqua et le visage d'Edouard apparu dans la lueur hésitante. Il chuchota dans un mauvais anglais:
- Venez.
La longue attente avait tétanisé leurs muscles. C'est avec peine que les deux hommes se redressèrent, leurs uniformes boueux et poussiéreux. Ils aidèrent du mieux qu'ils pouvaient Edouard à remettre les planches, puis la table et les chaises en place. Il s'essayèrent quelques minutes. Le Français leur servit deux grands verres de cidres. Puis il sortit de sa besace un morceau de pain et du fromage. Les deux britanniques affamés se jetèrent sur la nourriture. La fatigue se faisait sentir. Roberts avait des tremblements dans sa jambe droite. Leur hôte ouvrit un grand sac de toile qui était posé dans un coin de la pièce qui maintenant était éclairée par la lune presque pleine.
- Des habits civils... mettez-les et donnez-moi vos uniformes et tout ce qui peut vous relier à la RAF.
Les deux hommes se changèrent silencieusement dans la nuit. Pendant ce temps, le Français enleva une nouvelle fois une planche du plancher et il y glissa le sac contenant les uniformes des deux britanniques. Le Français se retourna vers eux:
- Bon... le réseau local va vous prendre en charge. On a trouvé une cache dans le coin pour vous. Il faudra vous y rendre cette nuit, en vélo. C'est à environ 70 kilomètres d'ici. Un compagnon vous accompagnera. Vous devez impérativement y arriver cette nuit, la journée vous seriez vite repéré. Votre boulot de ce matin a mis la région en émois.
Il ricana:
- Vous avez loupé de peu Raeder, mais la moitié de son Etat-Major y est passé. La salle des opérations a également été complètement détruite. Actuellement, les U-boat sont sans communication depuis La Rochelle.
Roberts inquiet lui demanda:
- Il y a eu beaucoup de pertes civils?
Edouard soupira:
- Quelques-unes, mais les gens du pays ne vous en tiendront pas compte, car votre raid audacieux a mis du baume au cœur. La répression dans la région est très dure, à cause des bases de sous-marins. Les Fritz sont conscient qu'il y a dû y avoir des fuites. Ils vont certainement faire des rafles, les plus faibles parleront. C'est pour cela qu'il faut que vous partiez avant que les contrôles ne se resserrent sur vous. Les Boches sont fous, ils en ont dur après vous.
Les trois hommes quittèrent furtivement la cabane. La nuit était douce. Edouard avançait avec précautions. Quelques centaines de mètres plus loin, ils arrivèrent en bordure d'une petite route. Un homme appuyé contre une bicyclette les attendait. A leur arrivée, il extirpa deux autres vélos des fourrés. Avant d'enfourcher son engin, Roberts retint Edouard par le bras.
- Merci... Edouard... merci pour ce que vous faites et des risques terribles que vous prenez. Si je m'en sors, jamais je ne vous oublierais, comme vous appelez-vous?
- Je ne peux pas vous dire mon nom... j'ai un cousin qui était pilote comme vous dans l'armée française. Il a disparu en mai '40, on a jamais eu de nouvelles. Il s'appelait Martel... René Martel.
Roberts resta un instant indécis. Il rigola doucement.
- Monsieur Edouard... vous voulez que je vous dises... votre cousin là... Martel. Et bien il est vivant, bien vivant, c'est un pilote des forces françaises libres et plutôt un bon, il est connu en Angleterre, il a été décoré de la DSO il y a quelques mois.
Il lui donna une tape dans le dos et enfourcha son vélo. Edouard quelque peu abasourdit par ce qu'il venait d'entendre le retint par le bras.
- Merde alors... bon écoutez avec ce que vous me dites la situation change un peu... cette nuit, c'est à Rouillac que vous allez... vous serez logé chez le père de sa fiancée, oui la fiancée de René Martel, alors pas un mot à son sujet, hein.
Bientôt les trois cyclistes s'enfoncèrent dans la nuit. La route était plate, et ils allaient bon train. Les vélos avaient été modifiés pour que les roues à rochets ne fassent pas de bruit lorsqu'ils roulaient en roue libre. Non seulement, cela leur permettaient de ne pas être repéré, mais en plus de pouvoir percevoir tous les bruits nocturnes. Ils durent ainsi traverser plusieurs villages et dans l'un d'entre eux, se cacher pour laisser passer une patrouille pédestre. Après leur passage, le PO Jan Peer ricana:
- Ben mon vieux heureusement qu'ils marchent comme à la parade militaire, on les entend à 500 mètres à la ronde...
Ils reprirent leur progression silencieuse. Avec les sens sans arrêt à l'affût du moindre bruit suspect, les kilomètres ne se faisaient pas trop sentir. Vers quatre heures du matin, après trois et demie de voyage, ils atteignaient enfin leur point de rendez-vous. Deux hommes sortirent des buissons d'où ils attendaient l'arrivée des fugitifs. Ils posèrent leur bicyclette et partirent à pieds au travers de la campagne. Au loin, une imposante bâtisse se dessinait dans la nuit. L'un des résistants leur dit en indiquant le site:
- C'est l'Abbatiale de Marcillac Lanville... vous y serez caché jusqu'à demain soir, après vous changez de lieu.
Peer répondit:
- Je croyais qu'on serait caché à Rouill...truc un village comme ça...
Le maquisard répondit:
- Rouillac... c'est à quelques kilomètres... mais on a un petit contre-temps avec le chef du réseau qui a été interpellé ce matin par la Gestapo... alors on ne prend pas de risques. On attend que la situation se calme.
Les deux Anglais furent installés dans la sacristie. On leur servir un nouvelle fois de la nourriture. Une fois rassasiés, il s'allongèrent sur deux matelas recouverts de couvertures et s'endormirent d'un sommeil profond.
Ils se réveillèrent tard dans la mâtinée. les deux maquisards montaient toujours la garde.
Roberts murmura:
- C'est incroyable ce que ces gens font pour nous Peer... Vous vous imaginez les risques qu'ils ont pris pour essayer de nous tirer d'affaire...
Bientôt un des hommes s'approcha d'eux:
- Alors... bien dormi? On a une bonne nouvelle, notre chef est de retour à la maison. Les Fritz n'ont heureusement pas été trop durs avec lui. Il n'empêche.. nous avons besoin de lui pour organiser votre extraction. Et comme il est probablement sous surveillance nous devons redoubler de prudence. Le poste radio a été déménagé de sa cache chez un autre compagnon. Jusqu'à ce que tous les codes soient remis à jour, ça prendra quelque temps. Bon en attendant, on vous emmène cette nuit à Rouillac.
Ils passèrent la nuit à imaginer l'hypothétique façon dont ils seraient renvoyés en Angleterre. Peer pensait qu'ils allaient rejoindre l'Espagne et qu'ils les feraient traverser la Méditerranée et qu'ils rejoindraient Maltes ou l'Egypte.
Quelques heures plus tard, ils ramassèrent leur quelques effets et suivirent les résistants dans la nuit. Ils arrivaient bientôt à Rouillac. Des vignes entouraient le village. Jan Peer grommelat:
- Mais c'est incroyable dans ce pays, ils n'ont pas d'herbe pour les vaches? Ils n'ont que du raisins pour faire du vin.
Un des Français qui les accompagnait lui fit un clin d'œil.
- C'est normal mon ami, je vous rappelle que vous êtes dans le berceau du Bordeaux et du Cognac et en plus on est en pleine vendange. Il y a des gens qui viennent de loin pour faire les vendanges, la région est pleine d'inconnus, c'est bien pour vous, si on doit vous évacuer en plein jour, vous passerez plus facilement inaperçu.
Ils pénétrèrent dans un verger. Dans la nuit on pouvait deviner une habitation. Le résistant frappa à la porte.
- Louis... Roger, c'est moi Benoît... ouvrez.
La porte s'ouvrit et les quatre hommes s'engouffrèrent sans plus attendre dans la remise. Une lampe à pétrole diffusa une faible lumière jaunâtre. Un homme d'un certain âge, de haute stature, contemplait les deux pilotes anglais d'un oeil inquisiteur. A côté de lui, il y avait "Monsieur Roger", le greffier du préfet de la région. Louis Lebour s'adressa en mauvais anglais au deux fuyards:
- Venez avec moi.
Toujours à la lueur de la lampe à pétrole, il s'enfonça dans les dédales de plusieurs couloirs avant d'arriver dans ce qui devait être par le passé, une écurie. Il écarta la paille et leva une trappe pratiquement invisible. Un escalier s'enfonçait dans la terre. Il s'y engagea suivit des deux britanniques. Quelques mètres plus bas, ils débouchèrent dans une pièce qui était rudimentairement aménagée. Un homme était assis à une table et il lisait un journal. Il leva à peine la tête à leur arrivée. Monsieur Roger fit de rapides présentations.
- Voilà... deux pilotes de la RAF qui ont participé à l'attaque de La Rochelle il y a deux jours et puis...
Il hésita:
-... un Monsieur que Londres nous a envoyé et qui doit rentrer au pays.
Louis Lebour reprit s'adressant Roberts et Peer.
- Vous avez de la chance, nous avons une liaison aérienne régulière avec Londres, vous pourrez, si tout va bien, très bientôt rentrer en Angleterre.
Les deux Français, laissèrent les trois Britanniques seuls. Peer s'approcha de celui qui allait partager ses prochaines heures les quelques mètres carrés de terre battue de leur chambre.
- Bonsoir, je suis le pilot Officer Peer, navigateur au squadron 248. Et là, le c'est le commandant de l'escadrille, le Flight Leutnant Oscar "Bob" Roberts, nous avons été abattu, il y a deux jours par la flack allemande au-dessus de La Rochelle.
Son interlocuteur garda un visage fermé de toutes expressions. Il répondit de manière abrupte:
- Je suis au courant de vos déboires. Vous coûtez cher au réseau...
Roberts sentit la moutarde lui monter au nez.
- Je vous demande pardon??? Non mais, pour qui vous vous prenez espèce de trou du cul pour nous parler sur ce ton? Si vous êtes ici, c'est bien parce que vous avez également des problèmes non, alors fermez votre grande gueule...
L'homme sourit.
- ... espèce de trou du cul... oh ... vous êtes bien du pays de Galles pour utiliser un langage aussi châtié. Disons que je suis le colonel ... le colonel "G", ça vous va? J'ajouterais que je suis un des responsables du réseau qui s'est occupé de vous jusqu'à présent. J'ajouterai pour conclure que si vous avez pu bombarder le QG de Raeder, c'est grâce aux plans récupérés par "mon" réseau, ok. j'arrête là les présentations, vous êtes satisfaits?
Roberts se calma.
- C'est bon... je vous présente mes excuses, je suis au bout du rouleau et je ne sais pas encore comment je vais rejoindre l'Angleterre...
Le Colonel "G" répondit:
- Vous rentrerez comme un vrai aviateur... en avion Sir Roberts.
Oscar Roberts restait quelque peu perplexe:
- Ouai c'est que les Français m'ont dit, mais je me demande bien comment ils vont faire. Il ne vont tout même pas poser un Blenheim en pleine cambrouse non?
Son interlocuteur s'était de nouveau plongé dans sa lecture et il ne leva même pas la tête pour lui répondre:
- C'est presque cela Sir Roberts... mais je ne vous en dit pas plus. Vous découvriez par vous-même comment nous procédons.
A côté du Flight Leutnant Roberts, Jan Peer dormait déjà. Il décida d'en faire autant...
- Venez.
La longue attente avait tétanisé leurs muscles. C'est avec peine que les deux hommes se redressèrent, leurs uniformes boueux et poussiéreux. Ils aidèrent du mieux qu'ils pouvaient Edouard à remettre les planches, puis la table et les chaises en place. Il s'essayèrent quelques minutes. Le Français leur servit deux grands verres de cidres. Puis il sortit de sa besace un morceau de pain et du fromage. Les deux britanniques affamés se jetèrent sur la nourriture. La fatigue se faisait sentir. Roberts avait des tremblements dans sa jambe droite. Leur hôte ouvrit un grand sac de toile qui était posé dans un coin de la pièce qui maintenant était éclairée par la lune presque pleine.
- Des habits civils... mettez-les et donnez-moi vos uniformes et tout ce qui peut vous relier à la RAF.
Les deux hommes se changèrent silencieusement dans la nuit. Pendant ce temps, le Français enleva une nouvelle fois une planche du plancher et il y glissa le sac contenant les uniformes des deux britanniques. Le Français se retourna vers eux:
- Bon... le réseau local va vous prendre en charge. On a trouvé une cache dans le coin pour vous. Il faudra vous y rendre cette nuit, en vélo. C'est à environ 70 kilomètres d'ici. Un compagnon vous accompagnera. Vous devez impérativement y arriver cette nuit, la journée vous seriez vite repéré. Votre boulot de ce matin a mis la région en émois.
Il ricana:
- Vous avez loupé de peu Raeder, mais la moitié de son Etat-Major y est passé. La salle des opérations a également été complètement détruite. Actuellement, les U-boat sont sans communication depuis La Rochelle.
Roberts inquiet lui demanda:
- Il y a eu beaucoup de pertes civils?
Edouard soupira:
- Quelques-unes, mais les gens du pays ne vous en tiendront pas compte, car votre raid audacieux a mis du baume au cœur. La répression dans la région est très dure, à cause des bases de sous-marins. Les Fritz sont conscient qu'il y a dû y avoir des fuites. Ils vont certainement faire des rafles, les plus faibles parleront. C'est pour cela qu'il faut que vous partiez avant que les contrôles ne se resserrent sur vous. Les Boches sont fous, ils en ont dur après vous.
Les trois hommes quittèrent furtivement la cabane. La nuit était douce. Edouard avançait avec précautions. Quelques centaines de mètres plus loin, ils arrivèrent en bordure d'une petite route. Un homme appuyé contre une bicyclette les attendait. A leur arrivée, il extirpa deux autres vélos des fourrés. Avant d'enfourcher son engin, Roberts retint Edouard par le bras.
- Merci... Edouard... merci pour ce que vous faites et des risques terribles que vous prenez. Si je m'en sors, jamais je ne vous oublierais, comme vous appelez-vous?
- Je ne peux pas vous dire mon nom... j'ai un cousin qui était pilote comme vous dans l'armée française. Il a disparu en mai '40, on a jamais eu de nouvelles. Il s'appelait Martel... René Martel.
Roberts resta un instant indécis. Il rigola doucement.
- Monsieur Edouard... vous voulez que je vous dises... votre cousin là... Martel. Et bien il est vivant, bien vivant, c'est un pilote des forces françaises libres et plutôt un bon, il est connu en Angleterre, il a été décoré de la DSO il y a quelques mois.
Il lui donna une tape dans le dos et enfourcha son vélo. Edouard quelque peu abasourdit par ce qu'il venait d'entendre le retint par le bras.
- Merde alors... bon écoutez avec ce que vous me dites la situation change un peu... cette nuit, c'est à Rouillac que vous allez... vous serez logé chez le père de sa fiancée, oui la fiancée de René Martel, alors pas un mot à son sujet, hein.
Bientôt les trois cyclistes s'enfoncèrent dans la nuit. La route était plate, et ils allaient bon train. Les vélos avaient été modifiés pour que les roues à rochets ne fassent pas de bruit lorsqu'ils roulaient en roue libre. Non seulement, cela leur permettaient de ne pas être repéré, mais en plus de pouvoir percevoir tous les bruits nocturnes. Ils durent ainsi traverser plusieurs villages et dans l'un d'entre eux, se cacher pour laisser passer une patrouille pédestre. Après leur passage, le PO Jan Peer ricana:
- Ben mon vieux heureusement qu'ils marchent comme à la parade militaire, on les entend à 500 mètres à la ronde...
Ils reprirent leur progression silencieuse. Avec les sens sans arrêt à l'affût du moindre bruit suspect, les kilomètres ne se faisaient pas trop sentir. Vers quatre heures du matin, après trois et demie de voyage, ils atteignaient enfin leur point de rendez-vous. Deux hommes sortirent des buissons d'où ils attendaient l'arrivée des fugitifs. Ils posèrent leur bicyclette et partirent à pieds au travers de la campagne. Au loin, une imposante bâtisse se dessinait dans la nuit. L'un des résistants leur dit en indiquant le site:
- C'est l'Abbatiale de Marcillac Lanville... vous y serez caché jusqu'à demain soir, après vous changez de lieu.
Peer répondit:
- Je croyais qu'on serait caché à Rouill...truc un village comme ça...
Le maquisard répondit:
- Rouillac... c'est à quelques kilomètres... mais on a un petit contre-temps avec le chef du réseau qui a été interpellé ce matin par la Gestapo... alors on ne prend pas de risques. On attend que la situation se calme.
Les deux Anglais furent installés dans la sacristie. On leur servir un nouvelle fois de la nourriture. Une fois rassasiés, il s'allongèrent sur deux matelas recouverts de couvertures et s'endormirent d'un sommeil profond.
Ils se réveillèrent tard dans la mâtinée. les deux maquisards montaient toujours la garde.
Roberts murmura:
- C'est incroyable ce que ces gens font pour nous Peer... Vous vous imaginez les risques qu'ils ont pris pour essayer de nous tirer d'affaire...
Bientôt un des hommes s'approcha d'eux:
- Alors... bien dormi? On a une bonne nouvelle, notre chef est de retour à la maison. Les Fritz n'ont heureusement pas été trop durs avec lui. Il n'empêche.. nous avons besoin de lui pour organiser votre extraction. Et comme il est probablement sous surveillance nous devons redoubler de prudence. Le poste radio a été déménagé de sa cache chez un autre compagnon. Jusqu'à ce que tous les codes soient remis à jour, ça prendra quelque temps. Bon en attendant, on vous emmène cette nuit à Rouillac.
Ils passèrent la nuit à imaginer l'hypothétique façon dont ils seraient renvoyés en Angleterre. Peer pensait qu'ils allaient rejoindre l'Espagne et qu'ils les feraient traverser la Méditerranée et qu'ils rejoindraient Maltes ou l'Egypte.
Quelques heures plus tard, ils ramassèrent leur quelques effets et suivirent les résistants dans la nuit. Ils arrivaient bientôt à Rouillac. Des vignes entouraient le village. Jan Peer grommelat:
- Mais c'est incroyable dans ce pays, ils n'ont pas d'herbe pour les vaches? Ils n'ont que du raisins pour faire du vin.
Un des Français qui les accompagnait lui fit un clin d'œil.
- C'est normal mon ami, je vous rappelle que vous êtes dans le berceau du Bordeaux et du Cognac et en plus on est en pleine vendange. Il y a des gens qui viennent de loin pour faire les vendanges, la région est pleine d'inconnus, c'est bien pour vous, si on doit vous évacuer en plein jour, vous passerez plus facilement inaperçu.
Ils pénétrèrent dans un verger. Dans la nuit on pouvait deviner une habitation. Le résistant frappa à la porte.
- Louis... Roger, c'est moi Benoît... ouvrez.
La porte s'ouvrit et les quatre hommes s'engouffrèrent sans plus attendre dans la remise. Une lampe à pétrole diffusa une faible lumière jaunâtre. Un homme d'un certain âge, de haute stature, contemplait les deux pilotes anglais d'un oeil inquisiteur. A côté de lui, il y avait "Monsieur Roger", le greffier du préfet de la région. Louis Lebour s'adressa en mauvais anglais au deux fuyards:
- Venez avec moi.
Toujours à la lueur de la lampe à pétrole, il s'enfonça dans les dédales de plusieurs couloirs avant d'arriver dans ce qui devait être par le passé, une écurie. Il écarta la paille et leva une trappe pratiquement invisible. Un escalier s'enfonçait dans la terre. Il s'y engagea suivit des deux britanniques. Quelques mètres plus bas, ils débouchèrent dans une pièce qui était rudimentairement aménagée. Un homme était assis à une table et il lisait un journal. Il leva à peine la tête à leur arrivée. Monsieur Roger fit de rapides présentations.
- Voilà... deux pilotes de la RAF qui ont participé à l'attaque de La Rochelle il y a deux jours et puis...
Il hésita:
-... un Monsieur que Londres nous a envoyé et qui doit rentrer au pays.
Louis Lebour reprit s'adressant Roberts et Peer.
- Vous avez de la chance, nous avons une liaison aérienne régulière avec Londres, vous pourrez, si tout va bien, très bientôt rentrer en Angleterre.
Les deux Français, laissèrent les trois Britanniques seuls. Peer s'approcha de celui qui allait partager ses prochaines heures les quelques mètres carrés de terre battue de leur chambre.
- Bonsoir, je suis le pilot Officer Peer, navigateur au squadron 248. Et là, le c'est le commandant de l'escadrille, le Flight Leutnant Oscar "Bob" Roberts, nous avons été abattu, il y a deux jours par la flack allemande au-dessus de La Rochelle.
Son interlocuteur garda un visage fermé de toutes expressions. Il répondit de manière abrupte:
- Je suis au courant de vos déboires. Vous coûtez cher au réseau...
Roberts sentit la moutarde lui monter au nez.
- Je vous demande pardon??? Non mais, pour qui vous vous prenez espèce de trou du cul pour nous parler sur ce ton? Si vous êtes ici, c'est bien parce que vous avez également des problèmes non, alors fermez votre grande gueule...
L'homme sourit.
- ... espèce de trou du cul... oh ... vous êtes bien du pays de Galles pour utiliser un langage aussi châtié. Disons que je suis le colonel ... le colonel "G", ça vous va? J'ajouterais que je suis un des responsables du réseau qui s'est occupé de vous jusqu'à présent. J'ajouterai pour conclure que si vous avez pu bombarder le QG de Raeder, c'est grâce aux plans récupérés par "mon" réseau, ok. j'arrête là les présentations, vous êtes satisfaits?
Roberts se calma.
- C'est bon... je vous présente mes excuses, je suis au bout du rouleau et je ne sais pas encore comment je vais rejoindre l'Angleterre...
Le Colonel "G" répondit:
- Vous rentrerez comme un vrai aviateur... en avion Sir Roberts.
Oscar Roberts restait quelque peu perplexe:
- Ouai c'est que les Français m'ont dit, mais je me demande bien comment ils vont faire. Il ne vont tout même pas poser un Blenheim en pleine cambrouse non?
Son interlocuteur s'était de nouveau plongé dans sa lecture et il ne leva même pas la tête pour lui répondre:
- C'est presque cela Sir Roberts... mais je ne vous en dit pas plus. Vous découvriez par vous-même comment nous procédons.
A côté du Flight Leutnant Roberts, Jan Peer dormait déjà. Il décida d'en faire autant...
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Re: René Martel, vive la France Libre
Ils passèrent ainsi cinq jours dans leur trappe. Une fois par jour, Louis Lebour venait les chercher pour qui qu'ils puissent faire un brin de toilette et prendre l'air. Les repas se prenaient dans la cache, de manière à ne laisser aucun indice sur leur présence. Les rasoirs, blaireaux et autres ustensiles servant à leur hygiène personnelle étaient soigneusement répertoriés et Louis Lebour veillait personnellement à ce que rien ne soit oublié. Leur voisin n'était guère causant et pendant que ce dernier passait la journée à lire les journaux de la région ainsi que différents magasines de propagande nazie que Monsieur Roger qui venait tous les deux jours, lui amenait. Parfois à la lecture d'un article, il gloussait.
- Mais quel ramassis de conneries. Et dire que le peuple allemand croit certainement ce que raconte ce fou de Goebbels...
Il parlait sans regarder ses colocataires, puis, silencieux, il reprenait sa lecture. Il était grand et maigre. Il portait une petite moustache fine à la Clark Gable. Derrière ses petites lunettes rondes à montures noires, on pouvait deviner un regard intransigeant. Il parlait parfaitement le français et l'allemand. Roberts et Peer se contentaient d'un minimum de discussion avec l'intéressé, qui de toute façon n'était pas très loquace. Les deux Anglais passaient leur temps à jouer aux cartes ou à discuter de leur famille, des amis, de l'escadrille. Les copains devaient croire qu'ils étaient morts ou prisonniers. Parfois, l'un des deux avaient un coup de bleu au moral. Puis un jour, la trappe s'est ouverte, ce n'était pas Louis Lebour mais ça fille. Oscar "Bob" Roberts la détailla avec attention. Ainsi donc voici la belle Julie Lebour, fiancée de René Martel, pilote des FAFL. Le Colonel "G" semblait la connaître et il ne se formalisa pas de sa présence. Par contre, les deux Anglais avaient bien de la peine à détacher leur regard de l'opulente chevelure blonde et de ses grands yeux bleus, sans compter que la triste et strict robe en laine grise avait bien de la peine à cacher un physique à damner. Les deux pilotes du Mosquito passèrent un peu plus de temps à se laver et se raser que d'habitude. Peer tenta de dire quelques mots en français, mais à part un petit sourire désabusé, il n'eut rien d'autre en réponse. Avant de descendre dans la cache, Roberts lui dit:
- Quand on vous voit madame, on se rend compte combien la guerre nous éloigne de choses aussi et belles et simples que l'amour... Il a une sacré chance René et je vous jure que si j'étais lui je ferais tout ce qu'il faut pour ne pas me faire tuer...
Et sans un regard il rejoint ses deux compagnons d'infortunes. Pensive, Julie refermait la trappe et remettait en place la paille. Le pilote britannique lui avait parlé en Anglais, néanmoins, elle lui semblait bien avoir compris le prénom de René. Troublée, elle mit son châle sur les épaules et monta à la cuisine.
Dans la cache, le Colonel fixait maintenant d'un regard étrange Roberts.
- C'est un hasard où vous savez quelque chose au sujet de René Martel?
L'Officier de la RAF lui dit sur un ton sarcastique :
- C'est son cousin qui nous a aisé à sortir de ce merdier, ce n'est pas le fruit du hasard. Vous voyez mon bon ami, il n'y a pas que vous qui avez de petits secrets.
L'agent se rassied bruyamment.
- Bon écoutez Roberts... et vous aussi Peer... je sais que pour vous cette ambiance intrigante vous exaspère. Mais ici en France, quand on est dans la résistance ou dans l'espionnage, moins on en sait sur le réseau pour lequel on travaille, mieux on se porte. Je ne peux donc ni vous dire mon nom et encore moins le travail que j'effectue en France pour le compte de l'Angleterre ok? Ce n'est pas pour vous ennuyer, mais pour éviter de passer un mauvais moment avec la Gestapo. Imaginez que vous soyez pris hein? Je peux vous dire qu'ils sont passés maître dans l'art de faire parler les plus coriaces. Rien ne les arrête, surtout pas la torture. Si vous êtes capturés et qu'ils ont le moindre doute au sujet d'un éventuel contact avec un agent de sa gracieuse majesté... vous parlerez! Alors un truc les gars, faites gaffe à ce que vous dites. Vous en particulier Roberts. Maintenant, si la fille de notre hôte a compris votre allusion au sujet de Martel, elle va vous relancer à son sujet, c'est inévitable. Si les Allemands savent qu'elle est la fiancée d'un As français de la RAF, ça va chauffer pour son matricule. Evitez de vous exposer inutilement les gars. Et pour conclure dites-vous bien que vous avez une chance incroyable d'être tombé sur Edouard, si tout va bien, dans une dizaine de jours vous pourrez remonter dans votre Mosquito. La plupart des pilotes qui tombent en France sont capturés et envoyés dans des camps en Allemagne ou en Pologne où ils n'ont pas la moindre chance de s'enfuir. Gardez à l'esprit que vous êtes d'extraordinaires privilégiés et que vous bénéficiez d'un traitement de luxe...
Il leur fit un clin d'œil et se coucha sur sa paillasse. Peer donna une tape sur l'épaule de son supérieur.
- Il a raison Sir...
Et il se coucha à son tour. Roberts resta encore quelques instants pensifs dans la nuit, puis, emmitouflé dans sa couverture il s'endormit à son tour.
Le jour suivant, Julie revint pour s'occuper des fugitifs. Alors qu'il se rasait, Roberts sentait le regard d'ange de la jeune fille qui le fixait. Il réalisa combien la situation était finalement désagréable. Il aurait mieux fait de la fermer. N'y tenant plus Julie extirpa de sa poche la photo de René et la présenta à Roberts et s'exprima dans un mauvais anglais.
- Martel... René Martel its my Boyfriends... lui pilote RAF chez vous.
L'officier britannique baissa un regard gêné. Oh et puis zut, qu'est ce que ça changeait. Il lui dit l'air mélancolique avec les quelques mots de français qu'il avait appris à Oxford.
- Oui, c'est René Martel... Flying Leutnant dans la RAF, dans le squadron 615, il pilote un Spitfire. C'est un As, il a 16 victoires.
Il sourit, la fille poursuivit pleine d'espoir:
- Vous.. vous le connaissez.. vous l'avez déjà vu?
Oscar répondit par la négative.
- Non.. juste de réputation.
La discussion s'arrêta là et les trois Anglais rejoignirent la cache.
le lendemain Louis Lebour refit son apparition. Il souriait.
- Messieurs, c'est pour ce soir... préparez-vous!
Quelques heures plus tard, les trois hommes quittaient définitivement leur cachette. Ils avaient revêtu des vestes sombres et un chapeau. Lebour les réunis dans son dépôt. Il parlait à voix basse avec le Colonel "G" qui semblait parfaitement à l'aise et au courant de ce qui allait se passer. Julie Lebour fit son apparition emmitouflée dans son châle. Son rôle était de fermer la porte de l'intérieur une fois qu'ils auraient quitté la maison. Elle s'approcha imperceptiblement de Roberts et lui glissa discrètement une lettre dans la poche. Le pilote anglais la glissa dans sa poche et il lui fit un clin d'œil. Bientôt, accompagnés par un petit groupe de maquisards les trois hommes s'enfoncèrent dans un nuit sans lune. Après quelques minutes il s'immobilisèrent à proximité d'un route. Tapis dans les fourrés, les résistants semblaient attendre quelque chose. Une dizaine de minutes plus tard, le regard anxieux, ils pouvaient voir deux half track surmontés de soldats allemands et se dirigeant vers Rouillac. Lorsque le bruit des moteurs s'étaient complètement estompés dans la nuit, l'un des gars regarda sa montre à gousset.
- Ils sont en retard ce soir... j'espère qu'il n'y a pas un contre-temps.
Il fit signe aux autres de la main.
- Allez les gars on y va, on encore du chemin à faire.
Ils reprirent leur progression au travers de la campagne girondine. Une heure plus tard, alors qu'ils se trouvaient dans un bois, les résistants leur firent signe de s'arrêter une nouvelle fois. Deux hommes s'enfoncèrent dans la nuit en éclaireur. Il revinrent 15 minutes plus tard. S'adressant à Louis Lebour.
- C'est bon chef, tout le matériel est encore là, personne n'y a touché. On y aller.
- Mais quel ramassis de conneries. Et dire que le peuple allemand croit certainement ce que raconte ce fou de Goebbels...
Il parlait sans regarder ses colocataires, puis, silencieux, il reprenait sa lecture. Il était grand et maigre. Il portait une petite moustache fine à la Clark Gable. Derrière ses petites lunettes rondes à montures noires, on pouvait deviner un regard intransigeant. Il parlait parfaitement le français et l'allemand. Roberts et Peer se contentaient d'un minimum de discussion avec l'intéressé, qui de toute façon n'était pas très loquace. Les deux Anglais passaient leur temps à jouer aux cartes ou à discuter de leur famille, des amis, de l'escadrille. Les copains devaient croire qu'ils étaient morts ou prisonniers. Parfois, l'un des deux avaient un coup de bleu au moral. Puis un jour, la trappe s'est ouverte, ce n'était pas Louis Lebour mais ça fille. Oscar "Bob" Roberts la détailla avec attention. Ainsi donc voici la belle Julie Lebour, fiancée de René Martel, pilote des FAFL. Le Colonel "G" semblait la connaître et il ne se formalisa pas de sa présence. Par contre, les deux Anglais avaient bien de la peine à détacher leur regard de l'opulente chevelure blonde et de ses grands yeux bleus, sans compter que la triste et strict robe en laine grise avait bien de la peine à cacher un physique à damner. Les deux pilotes du Mosquito passèrent un peu plus de temps à se laver et se raser que d'habitude. Peer tenta de dire quelques mots en français, mais à part un petit sourire désabusé, il n'eut rien d'autre en réponse. Avant de descendre dans la cache, Roberts lui dit:
- Quand on vous voit madame, on se rend compte combien la guerre nous éloigne de choses aussi et belles et simples que l'amour... Il a une sacré chance René et je vous jure que si j'étais lui je ferais tout ce qu'il faut pour ne pas me faire tuer...
Et sans un regard il rejoint ses deux compagnons d'infortunes. Pensive, Julie refermait la trappe et remettait en place la paille. Le pilote britannique lui avait parlé en Anglais, néanmoins, elle lui semblait bien avoir compris le prénom de René. Troublée, elle mit son châle sur les épaules et monta à la cuisine.
Dans la cache, le Colonel fixait maintenant d'un regard étrange Roberts.
- C'est un hasard où vous savez quelque chose au sujet de René Martel?
L'Officier de la RAF lui dit sur un ton sarcastique :
- C'est son cousin qui nous a aisé à sortir de ce merdier, ce n'est pas le fruit du hasard. Vous voyez mon bon ami, il n'y a pas que vous qui avez de petits secrets.
L'agent se rassied bruyamment.
- Bon écoutez Roberts... et vous aussi Peer... je sais que pour vous cette ambiance intrigante vous exaspère. Mais ici en France, quand on est dans la résistance ou dans l'espionnage, moins on en sait sur le réseau pour lequel on travaille, mieux on se porte. Je ne peux donc ni vous dire mon nom et encore moins le travail que j'effectue en France pour le compte de l'Angleterre ok? Ce n'est pas pour vous ennuyer, mais pour éviter de passer un mauvais moment avec la Gestapo. Imaginez que vous soyez pris hein? Je peux vous dire qu'ils sont passés maître dans l'art de faire parler les plus coriaces. Rien ne les arrête, surtout pas la torture. Si vous êtes capturés et qu'ils ont le moindre doute au sujet d'un éventuel contact avec un agent de sa gracieuse majesté... vous parlerez! Alors un truc les gars, faites gaffe à ce que vous dites. Vous en particulier Roberts. Maintenant, si la fille de notre hôte a compris votre allusion au sujet de Martel, elle va vous relancer à son sujet, c'est inévitable. Si les Allemands savent qu'elle est la fiancée d'un As français de la RAF, ça va chauffer pour son matricule. Evitez de vous exposer inutilement les gars. Et pour conclure dites-vous bien que vous avez une chance incroyable d'être tombé sur Edouard, si tout va bien, dans une dizaine de jours vous pourrez remonter dans votre Mosquito. La plupart des pilotes qui tombent en France sont capturés et envoyés dans des camps en Allemagne ou en Pologne où ils n'ont pas la moindre chance de s'enfuir. Gardez à l'esprit que vous êtes d'extraordinaires privilégiés et que vous bénéficiez d'un traitement de luxe...
Il leur fit un clin d'œil et se coucha sur sa paillasse. Peer donna une tape sur l'épaule de son supérieur.
- Il a raison Sir...
Et il se coucha à son tour. Roberts resta encore quelques instants pensifs dans la nuit, puis, emmitouflé dans sa couverture il s'endormit à son tour.
Le jour suivant, Julie revint pour s'occuper des fugitifs. Alors qu'il se rasait, Roberts sentait le regard d'ange de la jeune fille qui le fixait. Il réalisa combien la situation était finalement désagréable. Il aurait mieux fait de la fermer. N'y tenant plus Julie extirpa de sa poche la photo de René et la présenta à Roberts et s'exprima dans un mauvais anglais.
- Martel... René Martel its my Boyfriends... lui pilote RAF chez vous.
L'officier britannique baissa un regard gêné. Oh et puis zut, qu'est ce que ça changeait. Il lui dit l'air mélancolique avec les quelques mots de français qu'il avait appris à Oxford.
- Oui, c'est René Martel... Flying Leutnant dans la RAF, dans le squadron 615, il pilote un Spitfire. C'est un As, il a 16 victoires.
Il sourit, la fille poursuivit pleine d'espoir:
- Vous.. vous le connaissez.. vous l'avez déjà vu?
Oscar répondit par la négative.
- Non.. juste de réputation.
La discussion s'arrêta là et les trois Anglais rejoignirent la cache.
le lendemain Louis Lebour refit son apparition. Il souriait.
- Messieurs, c'est pour ce soir... préparez-vous!
Quelques heures plus tard, les trois hommes quittaient définitivement leur cachette. Ils avaient revêtu des vestes sombres et un chapeau. Lebour les réunis dans son dépôt. Il parlait à voix basse avec le Colonel "G" qui semblait parfaitement à l'aise et au courant de ce qui allait se passer. Julie Lebour fit son apparition emmitouflée dans son châle. Son rôle était de fermer la porte de l'intérieur une fois qu'ils auraient quitté la maison. Elle s'approcha imperceptiblement de Roberts et lui glissa discrètement une lettre dans la poche. Le pilote anglais la glissa dans sa poche et il lui fit un clin d'œil. Bientôt, accompagnés par un petit groupe de maquisards les trois hommes s'enfoncèrent dans un nuit sans lune. Après quelques minutes il s'immobilisèrent à proximité d'un route. Tapis dans les fourrés, les résistants semblaient attendre quelque chose. Une dizaine de minutes plus tard, le regard anxieux, ils pouvaient voir deux half track surmontés de soldats allemands et se dirigeant vers Rouillac. Lorsque le bruit des moteurs s'étaient complètement estompés dans la nuit, l'un des gars regarda sa montre à gousset.
- Ils sont en retard ce soir... j'espère qu'il n'y a pas un contre-temps.
Il fit signe aux autres de la main.
- Allez les gars on y va, on encore du chemin à faire.
Ils reprirent leur progression au travers de la campagne girondine. Une heure plus tard, alors qu'ils se trouvaient dans un bois, les résistants leur firent signe de s'arrêter une nouvelle fois. Deux hommes s'enfoncèrent dans la nuit en éclaireur. Il revinrent 15 minutes plus tard. S'adressant à Louis Lebour.
- C'est bon chef, tout le matériel est encore là, personne n'y a touché. On y aller.
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Re: René Martel, vive la France Libre
Le petit groupe rejoint un terrain plat entre deux collines.
Jan Peer regarda surpris Oscar Roberts. Il chuchota.
- Ne me dites pas qu'ils vont faire poser un avion ici.
Le Colonel "G", lui répondit.
- Ben quoi, vous croyez qu'on vous a emmené ici pourquoi? Ramasser des fraises des bois? Vous pensiez rentrer à bicyclette en Angleterre ou quoi?
Il rigola doucement.
Les maquisards s'étaient placés le long du pré, ils portaient tous une lampe tempête. Ils s'accroupirent, le regard anxieux vers le ciel.
Pour la première fois, les deux Anglais virent leur compatriote perdre un peu de sa prestance. Il paraissait tendu.
- C'est maintenant l'heure de vérité. Il a une heure pour venir, il a jusqu'à 4h30 pour se poser. Sinon, il doit faire demi-tour et on est bon pour attendre la prochaine lune noire, un mois, ça fait une paye dans le trois étoiles du père Lebour.
Peer murmura:
- Ca arrive souvent qu'il loupe le rendez-vous?
- Non normalement pas, les pilotes sont des as rompus à ce genre de mission, mais il suffit que le temps ait été mauvais où qu'il soit tombé sur un chasseur de nuit.
La demie-heure suivante se passa dans le silence. Roberts commençait de désespérer lorsque enfin le ronronnement d'un moteur d'avion tournant au ralenti se fit entendre. Un ordre fusa dans la nuit et les lampes tempêtes furent allumées par les résistants. Le bruit du moteur disparu. Les deux britanniques pensèrent que l'avion s'était perdu, mais soudainement le froissement caractéristique du flux d'air dans les volets précédé du battement d'un hélice dans l'air se fit entendre et le Lysander se posa sans un rebond sur la piste de fortune. Les lampes s'éteignirent instantanément, quatre hommes se précipitèrent vers la queue de l'avion pour l'aider à faire demi-tour et être prêt à décoller. Le moteur tournait au ralenti. Roberts avait l'impression que le bruit devait s'entendre à des kilomètres à la ronde. Un poigne ferme le tira par le bras.
- Venez!
Les trois Anglais se mirent à courir vers le petit appareil. Peer s'inquiéta.
- On tient à trois passagers la dedans?
Le Colonel "G" les aidait à grimper dans l'avion.
- Oui, sans problème, on sera un peu serré mais ça ira.
Tremblant les deux membres du squadron 248 s'installèrent du mieux qu'ils pouvaient sur les banquettes de toile. A peine étaient-ils assis que le pilote sans un mot mit les gaz et le Lysander calé sur son cap roula dans la nuit noire, à l'aveugle. Après quelques rebonds, le pilote décollait enfin. Le Colonel "G" les aida à fermer l'imposante verrière et à se sangler. Il reprit ensuite sa place derrière le pilote. Le canopy était large et descendait bas sur le fuselage. Les passagers pouvaient ainsi apercevoir des ombres sur le sol. Le Colonel "G" se retourna.
- Essayez de garder un oeil vers l'arrière... à cause des chasseurs de nuit. A l'aller le pilote a été surpris par des projecteurs de recherche. Il est vraisemblable que la chasse de nuit soit sur le qui vive dans le secteur.
Anxieux, les deux hommes se mirent à scruter les ténèbres. Le pilote du Lysander changeait régulièrement d'altitude pour tromper les éventuels radars qui suivraient sa progression. Trente minutes plus tard, il fit signe de la main vers le sol, le petit appareil volant bas, depuis l'habitacle, des ourlets d'écume étaient visibles, ils survolaient enfin l'Atlantique. Jan Peer regarda soulagé la mince bande noire de la côte s'effacer à l'horizon. C'est au même moment qu'il aperçu comme des petites lucioles s'évanouir dans la nuit. Il comprit très vite qu'elles provenaient des échappements d'un avion qu'il devinait légèrement décalé sur leur 5 heures. Il hurla:
- Attention! Chasseur de nuit, break... break droit.
Le pilote réagit instantanément et pendant que deux traçantes blanches encadraient le Lysander, il bascula brutalement sur l'aile, effectuant un virage serré à droite. Au-dessus d'eux, dont un vrombissement sourd, le chasseur de nuit allemand overshootait sa cible. L'expérience du navigateur de Mosquito venait probablement de leur sauver la vie. Roberts et Peer scrutaient maintenant avec attention les ténèbres, mais le chasseur ennemi ne réapparu plus. Visiblement le Colonel n'aimait pas trop les montagnes russes et son visage prit une teinte verdâtre. Roberts ne put s'empêcher.
- C'est la trouille ou le mal de l'air Sir?
Il ricana:
- Allez vous faire voir chez les Grecs Roberts...
Peer regarda Roberts.
- Bf110 Sir?
Oscar fit la moue.
- Non je plancherais plutôt pour un Ju88, ils ont ça dans la région. Des versions avec des canons dans le nez, très dangereux pour nos Sunderland ou Hallifax chasseurs de sous-marin. Dommage que je ne sois pas aux commandes d'un de nos Mosquito FB, je lui donnerai bien une petite leçon à ce vautour...
Mais l'avion allemand ne revint plus. Bientôt le jour pointa à l'horizon.
Le pilote qui n'avait jusque là pas dit un mot se retourna.
- On a encore trois heures de route. Nous allons voler très bas. On est en plein Golf de Gascogne, les Ju88 du KG44 patrouillent régulièrement dans le coin, restez attentif...
Peer le pouce l'air fit un clin d'œil au pilote.
- Le vol ras des vagues à 600 km/h on connaît, vous pouvez y aller.
Par rapport au Mosquito le Lysander était affreusement lent. Le plafond était à environ 2000 pieds. Les 4 hommes ne parlaient plus. Robert rêvait d'un bon bain et d'un bon lit. Il était très mal assis, l'assise du siège en bandelettes de tissus n'avait qu'un demi-dossier, il était assis face à Peer qui lui, pouvait au moins s'appuyer mais sa place était tout aussi inconfortable car il devait courber la tête faute de place sous la verrière. Deux heures plus tard, 8 contacts firent leur apparition au loin. Le pilote les montra du doigt:
- Beaufighter! Ce sont les gars du 238, ils viennent pour nous escorter. Nous nous poserons sur l'île de Wight dans une quarantaine de minutes. Nous ferons le plein et ensuite je vous ramène à Cadgwith, c'est ok?
Les Beaufighter encadraient maintenant le petit monomoteur.
Les deux membres de l'escadrille 248 furent un peu surpris. Voilà 12 jours que la mission avait eu lieu, et les voilà de retour après une odyssée incroyable en France, comme si de rien n'était. Roberts donna une tape amicale sur l'épaule de son navigateur.
- On dirait qu'on est bientôt à la maison hein Peer.
Puis au Colonel:
- C'est curieux qu'on soit déposé à Cadgwith Colonel, je pensais que les renseignements britanniques seraient intéressés par notre aventure, on ne doit pas rendre de comptes?
Le Colonel "G" qui avait l'air d'aller beaucoup mieux le fixa au travers de ses lunettes rondes.
- Si, vous serez entendu à ce sujet. Cadgwith est une base où sont affectés des membres de l'IS. Car nous l'utilisons justement pour des missions du genre de celle que vous avez effectuée il y a deux semaines. Ah oui, ne vous attendez pas à retrouver votre unité, il est fort probable qu'elle ait repris ses quartiers à Goxhill.
Peer grommela:
- Pff... on dirait que ça lui fait plaisir qu'on soit emmerdé par ses collègues de l'IS...
Enfin, la côte anglaise fut en vue. Roberts ne put s'empêcher de s'exclamer.
- Je n'ai jamais vu la côte avec autant de plaisir!
Une fois sur l'île de Wight, des trois passagers profitèrent de la pause pour se dégourdir les jambes. Ils purent même prendre un rapide repas au mess de la base. Le pilote du Lysander avait un certain âge et comme tous les hommes qui travaillaient pour le "réseau" il était extrêmement peu bavard. Il s'approcha tout de même de Peer
- Ah au fait, merci pour cette nuit, sans vos yeux d'aviateurs confirmés, il y a bien des chances que le chasseur de nuit allemand nous ait eu. Si à votre place il y aurait eu un des civils que je transporte d'habitude, et qui passent leur temps à vomir dans un cornet, on était cuit!
Il rigola et grimpa dans l'habitacle du Lysander.
L'avion quitta l'île de Wight, un soleil inhabituel à cette période de l'année éclairait le ciel entre deux couches de nuages gris. Roberts et Peer réalisaient enfin qu'ils avaient eu une chance incroyable, tant dans le crash de leur Mosquito que leur folle cavalcade. La bande grise de Cadgwith se dessinait sur la terre des Cornouailles. Alors que le petit avion de transport effectuait son approche, nos deux amis eurent le plaisir de constater qu'un douzaine de Mosquito étaient stationnés au Nord de la piste. Visiblement, le squadron 248 était toujours là. Ils étaient impatient d'annoncer leur retour.
Dans son bureau, le chef ad interim du squadron 248 le FO Joshua Fitsalus ne prêta que peu d'attention à l'avion qui se posait. Sur un coin de la table, il y avait deux lettres, deux lettres adressées aux familles de Jan Peer et d'Oscar "Bob" Roberts. Il n'avait pu se résigner à les envoyer, comme si un infime espoir de les revoir un jour existait. Oui cet espoir existait, car personne n'avait vu le Mosquito DM-A s'écraser. Donc il y avait une chance qu'ils aient survécu. Il avait d'ailleurs écrit les lettres dans ce sens, il fallait que les familles gardent un espoir.
La porte du bureau s'ouvrit avec fracas sur le Sergent Dan Yoses que tout le monde surnommait Yoyo, c'était un jeune pilote fougueux, insouciant et prêt à prend tous les risques en l'air mais dont les frasques sur terre avaient l'art d'exaspérer ses supérieurs hiérarchiques.
- SIR, VENEZ ! C'EST INCROYABLE!
Le Flying Officer Fitsalus s'emporta!
- Ah mais c'est pas vrai! Yoyo, mille milliard... On ne vous a donc jamais appris à frapper à une porte ?
Yoses avait le visage tout rouge.
- Mais venez voir Sir, je vous dit que c'est incroyable!
Finalement, Fitsalus se leva et s'approcha de la porte. Il vit effectivement deux hommes qui cheminaient en compagnie de Coleman vers le mess. Il fronça les sourcils, il avait de la peine à croire ce qu'il voyait. Il fila au pas de course vers son vieil ami.
- Nom de nom, Peer Roberts ... heu Sir, mais qu'est ce qu'il vous est arrivés? Tout le monde vous croyait mort.. sauf moi, ah ce que j'ai bien fait d'avoir retenu le courrier pour vos famille. C'est incroyable ce retour... c'est... c'est fantastique.
Les deux hommes souriaient. Dans leurs habits civils trop grands, ils avaient maigri, ils étaient fatigués, mais ils étaient chez eux, ils étaient à la maison...
Coleman s'interposa.
- Vous vous voudrez bien nous excuser Joshua, mais Roberts et Peer doivent être entendu par les services de renseignements, je comprends votre impatience, mais il va falloir attendre jusqu'à ce soir.
Fitsalus s'en fichait, il était heureux de retrouver son vieux compagnons d'arme et une larme au coin de l'œil, il étreignait son bras. Roberts lui donna à son tour une tape amicale.
- Ca va mon vieux, on aura le temps de discuter plus tard ok.
Puis plus discrètement:
- A au fait, jusqu'à ce soir, j'aurais une petite requête à vous demander Fits. Pourriez-vous voir où est basé le squadron 615 svp?
Jan Peer regarda surpris Oscar Roberts. Il chuchota.
- Ne me dites pas qu'ils vont faire poser un avion ici.
Le Colonel "G", lui répondit.
- Ben quoi, vous croyez qu'on vous a emmené ici pourquoi? Ramasser des fraises des bois? Vous pensiez rentrer à bicyclette en Angleterre ou quoi?
Il rigola doucement.
Les maquisards s'étaient placés le long du pré, ils portaient tous une lampe tempête. Ils s'accroupirent, le regard anxieux vers le ciel.
Pour la première fois, les deux Anglais virent leur compatriote perdre un peu de sa prestance. Il paraissait tendu.
- C'est maintenant l'heure de vérité. Il a une heure pour venir, il a jusqu'à 4h30 pour se poser. Sinon, il doit faire demi-tour et on est bon pour attendre la prochaine lune noire, un mois, ça fait une paye dans le trois étoiles du père Lebour.
Peer murmura:
- Ca arrive souvent qu'il loupe le rendez-vous?
- Non normalement pas, les pilotes sont des as rompus à ce genre de mission, mais il suffit que le temps ait été mauvais où qu'il soit tombé sur un chasseur de nuit.
La demie-heure suivante se passa dans le silence. Roberts commençait de désespérer lorsque enfin le ronronnement d'un moteur d'avion tournant au ralenti se fit entendre. Un ordre fusa dans la nuit et les lampes tempêtes furent allumées par les résistants. Le bruit du moteur disparu. Les deux britanniques pensèrent que l'avion s'était perdu, mais soudainement le froissement caractéristique du flux d'air dans les volets précédé du battement d'un hélice dans l'air se fit entendre et le Lysander se posa sans un rebond sur la piste de fortune. Les lampes s'éteignirent instantanément, quatre hommes se précipitèrent vers la queue de l'avion pour l'aider à faire demi-tour et être prêt à décoller. Le moteur tournait au ralenti. Roberts avait l'impression que le bruit devait s'entendre à des kilomètres à la ronde. Un poigne ferme le tira par le bras.
- Venez!
Les trois Anglais se mirent à courir vers le petit appareil. Peer s'inquiéta.
- On tient à trois passagers la dedans?
Le Colonel "G" les aidait à grimper dans l'avion.
- Oui, sans problème, on sera un peu serré mais ça ira.
Tremblant les deux membres du squadron 248 s'installèrent du mieux qu'ils pouvaient sur les banquettes de toile. A peine étaient-ils assis que le pilote sans un mot mit les gaz et le Lysander calé sur son cap roula dans la nuit noire, à l'aveugle. Après quelques rebonds, le pilote décollait enfin. Le Colonel "G" les aida à fermer l'imposante verrière et à se sangler. Il reprit ensuite sa place derrière le pilote. Le canopy était large et descendait bas sur le fuselage. Les passagers pouvaient ainsi apercevoir des ombres sur le sol. Le Colonel "G" se retourna.
- Essayez de garder un oeil vers l'arrière... à cause des chasseurs de nuit. A l'aller le pilote a été surpris par des projecteurs de recherche. Il est vraisemblable que la chasse de nuit soit sur le qui vive dans le secteur.
Anxieux, les deux hommes se mirent à scruter les ténèbres. Le pilote du Lysander changeait régulièrement d'altitude pour tromper les éventuels radars qui suivraient sa progression. Trente minutes plus tard, il fit signe de la main vers le sol, le petit appareil volant bas, depuis l'habitacle, des ourlets d'écume étaient visibles, ils survolaient enfin l'Atlantique. Jan Peer regarda soulagé la mince bande noire de la côte s'effacer à l'horizon. C'est au même moment qu'il aperçu comme des petites lucioles s'évanouir dans la nuit. Il comprit très vite qu'elles provenaient des échappements d'un avion qu'il devinait légèrement décalé sur leur 5 heures. Il hurla:
- Attention! Chasseur de nuit, break... break droit.
Le pilote réagit instantanément et pendant que deux traçantes blanches encadraient le Lysander, il bascula brutalement sur l'aile, effectuant un virage serré à droite. Au-dessus d'eux, dont un vrombissement sourd, le chasseur de nuit allemand overshootait sa cible. L'expérience du navigateur de Mosquito venait probablement de leur sauver la vie. Roberts et Peer scrutaient maintenant avec attention les ténèbres, mais le chasseur ennemi ne réapparu plus. Visiblement le Colonel n'aimait pas trop les montagnes russes et son visage prit une teinte verdâtre. Roberts ne put s'empêcher.
- C'est la trouille ou le mal de l'air Sir?
Il ricana:
- Allez vous faire voir chez les Grecs Roberts...
Peer regarda Roberts.
- Bf110 Sir?
Oscar fit la moue.
- Non je plancherais plutôt pour un Ju88, ils ont ça dans la région. Des versions avec des canons dans le nez, très dangereux pour nos Sunderland ou Hallifax chasseurs de sous-marin. Dommage que je ne sois pas aux commandes d'un de nos Mosquito FB, je lui donnerai bien une petite leçon à ce vautour...
Mais l'avion allemand ne revint plus. Bientôt le jour pointa à l'horizon.
Le pilote qui n'avait jusque là pas dit un mot se retourna.
- On a encore trois heures de route. Nous allons voler très bas. On est en plein Golf de Gascogne, les Ju88 du KG44 patrouillent régulièrement dans le coin, restez attentif...
Peer le pouce l'air fit un clin d'œil au pilote.
- Le vol ras des vagues à 600 km/h on connaît, vous pouvez y aller.
Par rapport au Mosquito le Lysander était affreusement lent. Le plafond était à environ 2000 pieds. Les 4 hommes ne parlaient plus. Robert rêvait d'un bon bain et d'un bon lit. Il était très mal assis, l'assise du siège en bandelettes de tissus n'avait qu'un demi-dossier, il était assis face à Peer qui lui, pouvait au moins s'appuyer mais sa place était tout aussi inconfortable car il devait courber la tête faute de place sous la verrière. Deux heures plus tard, 8 contacts firent leur apparition au loin. Le pilote les montra du doigt:
- Beaufighter! Ce sont les gars du 238, ils viennent pour nous escorter. Nous nous poserons sur l'île de Wight dans une quarantaine de minutes. Nous ferons le plein et ensuite je vous ramène à Cadgwith, c'est ok?
Les Beaufighter encadraient maintenant le petit monomoteur.
Les deux membres de l'escadrille 248 furent un peu surpris. Voilà 12 jours que la mission avait eu lieu, et les voilà de retour après une odyssée incroyable en France, comme si de rien n'était. Roberts donna une tape amicale sur l'épaule de son navigateur.
- On dirait qu'on est bientôt à la maison hein Peer.
Puis au Colonel:
- C'est curieux qu'on soit déposé à Cadgwith Colonel, je pensais que les renseignements britanniques seraient intéressés par notre aventure, on ne doit pas rendre de comptes?
Le Colonel "G" qui avait l'air d'aller beaucoup mieux le fixa au travers de ses lunettes rondes.
- Si, vous serez entendu à ce sujet. Cadgwith est une base où sont affectés des membres de l'IS. Car nous l'utilisons justement pour des missions du genre de celle que vous avez effectuée il y a deux semaines. Ah oui, ne vous attendez pas à retrouver votre unité, il est fort probable qu'elle ait repris ses quartiers à Goxhill.
Peer grommela:
- Pff... on dirait que ça lui fait plaisir qu'on soit emmerdé par ses collègues de l'IS...
Enfin, la côte anglaise fut en vue. Roberts ne put s'empêcher de s'exclamer.
- Je n'ai jamais vu la côte avec autant de plaisir!
Une fois sur l'île de Wight, des trois passagers profitèrent de la pause pour se dégourdir les jambes. Ils purent même prendre un rapide repas au mess de la base. Le pilote du Lysander avait un certain âge et comme tous les hommes qui travaillaient pour le "réseau" il était extrêmement peu bavard. Il s'approcha tout de même de Peer
- Ah au fait, merci pour cette nuit, sans vos yeux d'aviateurs confirmés, il y a bien des chances que le chasseur de nuit allemand nous ait eu. Si à votre place il y aurait eu un des civils que je transporte d'habitude, et qui passent leur temps à vomir dans un cornet, on était cuit!
Il rigola et grimpa dans l'habitacle du Lysander.
L'avion quitta l'île de Wight, un soleil inhabituel à cette période de l'année éclairait le ciel entre deux couches de nuages gris. Roberts et Peer réalisaient enfin qu'ils avaient eu une chance incroyable, tant dans le crash de leur Mosquito que leur folle cavalcade. La bande grise de Cadgwith se dessinait sur la terre des Cornouailles. Alors que le petit avion de transport effectuait son approche, nos deux amis eurent le plaisir de constater qu'un douzaine de Mosquito étaient stationnés au Nord de la piste. Visiblement, le squadron 248 était toujours là. Ils étaient impatient d'annoncer leur retour.
Dans son bureau, le chef ad interim du squadron 248 le FO Joshua Fitsalus ne prêta que peu d'attention à l'avion qui se posait. Sur un coin de la table, il y avait deux lettres, deux lettres adressées aux familles de Jan Peer et d'Oscar "Bob" Roberts. Il n'avait pu se résigner à les envoyer, comme si un infime espoir de les revoir un jour existait. Oui cet espoir existait, car personne n'avait vu le Mosquito DM-A s'écraser. Donc il y avait une chance qu'ils aient survécu. Il avait d'ailleurs écrit les lettres dans ce sens, il fallait que les familles gardent un espoir.
La porte du bureau s'ouvrit avec fracas sur le Sergent Dan Yoses que tout le monde surnommait Yoyo, c'était un jeune pilote fougueux, insouciant et prêt à prend tous les risques en l'air mais dont les frasques sur terre avaient l'art d'exaspérer ses supérieurs hiérarchiques.
- SIR, VENEZ ! C'EST INCROYABLE!
Le Flying Officer Fitsalus s'emporta!
- Ah mais c'est pas vrai! Yoyo, mille milliard... On ne vous a donc jamais appris à frapper à une porte ?
Yoses avait le visage tout rouge.
- Mais venez voir Sir, je vous dit que c'est incroyable!
Finalement, Fitsalus se leva et s'approcha de la porte. Il vit effectivement deux hommes qui cheminaient en compagnie de Coleman vers le mess. Il fronça les sourcils, il avait de la peine à croire ce qu'il voyait. Il fila au pas de course vers son vieil ami.
- Nom de nom, Peer Roberts ... heu Sir, mais qu'est ce qu'il vous est arrivés? Tout le monde vous croyait mort.. sauf moi, ah ce que j'ai bien fait d'avoir retenu le courrier pour vos famille. C'est incroyable ce retour... c'est... c'est fantastique.
Les deux hommes souriaient. Dans leurs habits civils trop grands, ils avaient maigri, ils étaient fatigués, mais ils étaient chez eux, ils étaient à la maison...
Coleman s'interposa.
- Vous vous voudrez bien nous excuser Joshua, mais Roberts et Peer doivent être entendu par les services de renseignements, je comprends votre impatience, mais il va falloir attendre jusqu'à ce soir.
Fitsalus s'en fichait, il était heureux de retrouver son vieux compagnons d'arme et une larme au coin de l'œil, il étreignait son bras. Roberts lui donna à son tour une tape amicale.
- Ca va mon vieux, on aura le temps de discuter plus tard ok.
Puis plus discrètement:
- A au fait, jusqu'à ce soir, j'aurais une petite requête à vous demander Fits. Pourriez-vous voir où est basé le squadron 615 svp?
Dernière édition par le Ven 9 Fév 2007 - 22:26, édité 2 fois
615sqn_Harry- Wing Commander
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RTA_Oscarbob- Lt Colonel
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Re: René Martel, vive la France Libre
Il était tard dans l'après-midi lorsque Roberts et Peer quittaient enfin les bureaux de l'IS. Les deux hommes marquèrent un temps d'arrêt pour s'allumer une cigarette. Cette cigarette c'était celle de liberté. Peer envoyait des bouffées de fumée rageuses. Il était remonté:
- Non mais, vous avez entendu ça Sir? A croire qu'on a fait exprès de se crasher en France. On aurait dit qu'ils regrettaient presque notre retour... y sont malades ces types.
Roberts était trop content de s'en être sorti à si bon compte pour se plaindre. Il donna une tape amicale sur l'épaule de son coéquipier.
- C'est normal Peer, imaginez un peu le bordel qu'on a mis dans leur précieux réseau. Ils mettent des mois à mettre en place une structure de renseignements en France et voilà que deux braves types de la RAF débarquent en courant dans leur organisation avec deux escouades de la Feldpolizei sur leurs talons. Y a de quoi les rendre nerveux vou sne trouvez pas?
Il rigola doucement en se remémorant leur course effrénée au travers du bois puis des vignes. Il imaginait la surprise des bons vendangeurs français, lorsqu'ils sont apparus, sautant par-dessus les murets, roulant dans la poussière entre les seppes.
- Allez venez Peer allons au mess, ils doivent nous attendre avec impatience.
L'arrivée des deux hommes provoqua un brouhaha intense. Les tournées au bar commençaient de s'aligner l'une derrière elle. Les pilotes du squadron les pressaient de questions. Mais l'IS avait demandé à Roberts et Peer de rester discret sur la manière dont ils avaient été extraits depuis la France. Ils s'étaient consultés pour avoir une version plus ou moins identique et avait convenu pour un petit chalutier qui les avaient ramené jusqu'à l'île de Wight. Cependant, personne n'était dupe dans le mess, ils avaient tous vu le Lysander au camouflage marron et noir se poser sur la base et ils savaient que ces avions survolaient la France de nuit pour de mystérieuses missions. Au bout d'un moment les pilotes respectèrent le silence de leur leader et de son navigateur se résignant à accepter la version donnée. Après une petite heure, se faufilant au travers de la foule qui entouraient les deux héros du jour, Joshua Fitsalus s'approcha de Roberts.
- Ben mon vieux, c'est pas facile de te rejoindre.
S'adressant aux hommes.
- Bon les gars vous l'avez vu, c'est bon, vous nous laissez un peu respirer maintenant ok? Allez, allez.
La troupe se dispersa en râlant.
Les trois hommes s'asseyèrent à une table un peu isolée. Fitsalus extirpa de sa vareuse son paquet de cigarettes et s'en alluma une. Il replongea la main dans sa poche intérieure et en sortit un papier qu'il tendit à Oscar "Bob" Roberts.
- Tiens, j'ai ton renseignement. Je ne sais pas ce que tu veux en faire, je m'en fout, je ne préfère pas savoir...
Oscar rigola.
- Meu non te fait pas de mourron, ça n'a rien à voir avec l'IS ou un truc comme ça. Je dois juste apporter un message à un gars qui est dans cette escadrille.
Sur le billet, il pouvait lire "sqn 615 - Manston".
Le FO Fitsalus ajouta:
- Si tu veux rencontrer les gars de cette escadrille, t'as intérêt de te dépêcher, parce que le gars du Fighter Command que j'ai eu au bout de fil m'a dit que ce squadron devait partir pour la Birmanie ces prochaines semaines.
Roberts mit le précieux bout de papier dans sa poche et se leva.
- Bon c'est pas tout ça, mais moi je vais me coucher. Une chambre pour moi tout seul avec un vrai lit ça se respecte.
Fitsalus le regardait avec des yeux ronds:
- Ben quoi, tu t'en va déjà dormir? Il est à peine 21h00.
Le FL Roberts posa 2 penny sur la table.
- Oui mon petit Joshua, je vais dormir. Je suis mort de fatigue. La tournée est pour moi, allez les gars bonne nuit et à demain.
Le PO Jan Peer ne tarda pas à l'accompagner.
Le lendemain matin, après le breakfast, Roberts s'approcha de Coleman.
Il frappa à la porte de son bureau, il entra.
- Bonjour Sir, belle journée n'est-il pas?
- Bonjour Roberts, oui belle journée... j'allais vous convoquer car finalement plus ne vous retient ici. Vous avez terminé votre mission avec succès, je vous ai d'ailleurs proposé pour une barre à votre DFC, Peer aussi.
Il se rendit auprès de son poêle sur lequel une vieille théière en cuivre avait été déposée. Un fumet odorant s'en échappait.
- Thé?... Mon père était dans la compagnie des Indes et nous avons heureusement encore un peu de réserve. Foutue guerre.
Roberts accepta un peu à contre cœur une tasse du breuvage. Il dû admettre que celui-ci était excellent. Coleman poursuivit:
- Votre escadrille va donc pouvoir rejoindre Goxhill. C'est Joshua qui mènera la formation. Vous et Peer, avez droit à une semaine de permission. Comme vous êtes de Carlisle dans le Nord, un Anson vous y emmènera.
Roberts répondit quelque peu hésitant:
- Je suis de Blackford c'est plus au Nord de Carlisle...j'accepte avec plaisir la permission Sir, cependant j'aurais souhaité rejoindre d'abord Goxhill où je dois heu... régler quelques petites affaires. Et puis je vous informe que je suis tout à fait capable de prendre la direction de mon escadrille et de la ramener à la base.
Convaincu qu'il s'agissait d'une affaire de cœur, Coleman rigola.
- Ah... oui, bien sûr... je vois. Bien., alors d'accord, vous et Peer prendrez le Mosquito de réserve,. ça vous va comme ça?
Roberts s'en réjoui:
- Impeccable Sir! Nous partons quand?
- Et bien dès que vos équipages auront terminé leur service de parc, rangé leurs affaires et que les mécaniciens auront terminé de préparer les avions.
Il consulta sa montre:
- Je dirais... en début d'après midi, départ à 14h00 ça devrait jouer.
Les pilotes du Squadron 248 étaient contents de quitter la base de Cadgwith. Elle avait un aspect un peu lugubre avec ses bâtiments gris qui apparaissaient comme des fantômes dans le brouillard qui recouvrait régulièrement la région durant l'automne. La plupart des employés faisaient partie de l'intelligence service, aussi, il y avaient toujorus cet espèce de mystère qui les entouraient. Peu bavards, on ne savait pas qui était qui, qui faisait quoi. Cette ambiance faite de secrets et d'interdits n'étaient pas pour plaire à des gars qui avaient l'habitude d'affronter la mort en direct au quotidien.
Lorsque le premier Mosquito s'ébroua, roula sur la piste et pris son envol, à l'intérieur de l'habitacle Jan Peer regardait sans regret la base qui s'éloignait maintenant sous leurs ailes.
- Pfff quelle aventure... je ne suis pas mécontent de me barrer d'ici. Qu'ils aillent au diable avec leurs secrets à la noix, je préfère la guerre comme nous la faisons. Si nous devons un jour mourir dans cette vieille carcasse en bois, Au moins nous saurons pourquoi.
Une heure plus tard les Mosquito du Squadron 248 étaient de retour à Goxhill. Comme d'habitude les mécaniciens de la base les attendaient, faisant signe à chaque pilote, ils guidaient les avions jusqu'aux hangars. Comme d'habitude, une fois les moteurs à l'arrêt, ils plaçaient le petit escabeau sous l'habitacle, la trappe s'ouvrait et l'équipage mettait pieds à terre. Alors un des mécaniciens l'aidait à se défaire de leur parachute et posait la sempiternelle question:
- Alors Sir vous avez fait bon vol?
Comme d'habitude.
- Non mais, vous avez entendu ça Sir? A croire qu'on a fait exprès de se crasher en France. On aurait dit qu'ils regrettaient presque notre retour... y sont malades ces types.
Roberts était trop content de s'en être sorti à si bon compte pour se plaindre. Il donna une tape amicale sur l'épaule de son coéquipier.
- C'est normal Peer, imaginez un peu le bordel qu'on a mis dans leur précieux réseau. Ils mettent des mois à mettre en place une structure de renseignements en France et voilà que deux braves types de la RAF débarquent en courant dans leur organisation avec deux escouades de la Feldpolizei sur leurs talons. Y a de quoi les rendre nerveux vou sne trouvez pas?
Il rigola doucement en se remémorant leur course effrénée au travers du bois puis des vignes. Il imaginait la surprise des bons vendangeurs français, lorsqu'ils sont apparus, sautant par-dessus les murets, roulant dans la poussière entre les seppes.
- Allez venez Peer allons au mess, ils doivent nous attendre avec impatience.
L'arrivée des deux hommes provoqua un brouhaha intense. Les tournées au bar commençaient de s'aligner l'une derrière elle. Les pilotes du squadron les pressaient de questions. Mais l'IS avait demandé à Roberts et Peer de rester discret sur la manière dont ils avaient été extraits depuis la France. Ils s'étaient consultés pour avoir une version plus ou moins identique et avait convenu pour un petit chalutier qui les avaient ramené jusqu'à l'île de Wight. Cependant, personne n'était dupe dans le mess, ils avaient tous vu le Lysander au camouflage marron et noir se poser sur la base et ils savaient que ces avions survolaient la France de nuit pour de mystérieuses missions. Au bout d'un moment les pilotes respectèrent le silence de leur leader et de son navigateur se résignant à accepter la version donnée. Après une petite heure, se faufilant au travers de la foule qui entouraient les deux héros du jour, Joshua Fitsalus s'approcha de Roberts.
- Ben mon vieux, c'est pas facile de te rejoindre.
S'adressant aux hommes.
- Bon les gars vous l'avez vu, c'est bon, vous nous laissez un peu respirer maintenant ok? Allez, allez.
La troupe se dispersa en râlant.
Les trois hommes s'asseyèrent à une table un peu isolée. Fitsalus extirpa de sa vareuse son paquet de cigarettes et s'en alluma une. Il replongea la main dans sa poche intérieure et en sortit un papier qu'il tendit à Oscar "Bob" Roberts.
- Tiens, j'ai ton renseignement. Je ne sais pas ce que tu veux en faire, je m'en fout, je ne préfère pas savoir...
Oscar rigola.
- Meu non te fait pas de mourron, ça n'a rien à voir avec l'IS ou un truc comme ça. Je dois juste apporter un message à un gars qui est dans cette escadrille.
Sur le billet, il pouvait lire "sqn 615 - Manston".
Le FO Fitsalus ajouta:
- Si tu veux rencontrer les gars de cette escadrille, t'as intérêt de te dépêcher, parce que le gars du Fighter Command que j'ai eu au bout de fil m'a dit que ce squadron devait partir pour la Birmanie ces prochaines semaines.
Roberts mit le précieux bout de papier dans sa poche et se leva.
- Bon c'est pas tout ça, mais moi je vais me coucher. Une chambre pour moi tout seul avec un vrai lit ça se respecte.
Fitsalus le regardait avec des yeux ronds:
- Ben quoi, tu t'en va déjà dormir? Il est à peine 21h00.
Le FL Roberts posa 2 penny sur la table.
- Oui mon petit Joshua, je vais dormir. Je suis mort de fatigue. La tournée est pour moi, allez les gars bonne nuit et à demain.
Le PO Jan Peer ne tarda pas à l'accompagner.
Le lendemain matin, après le breakfast, Roberts s'approcha de Coleman.
Il frappa à la porte de son bureau, il entra.
- Bonjour Sir, belle journée n'est-il pas?
- Bonjour Roberts, oui belle journée... j'allais vous convoquer car finalement plus ne vous retient ici. Vous avez terminé votre mission avec succès, je vous ai d'ailleurs proposé pour une barre à votre DFC, Peer aussi.
Il se rendit auprès de son poêle sur lequel une vieille théière en cuivre avait été déposée. Un fumet odorant s'en échappait.
- Thé?... Mon père était dans la compagnie des Indes et nous avons heureusement encore un peu de réserve. Foutue guerre.
Roberts accepta un peu à contre cœur une tasse du breuvage. Il dû admettre que celui-ci était excellent. Coleman poursuivit:
- Votre escadrille va donc pouvoir rejoindre Goxhill. C'est Joshua qui mènera la formation. Vous et Peer, avez droit à une semaine de permission. Comme vous êtes de Carlisle dans le Nord, un Anson vous y emmènera.
Roberts répondit quelque peu hésitant:
- Je suis de Blackford c'est plus au Nord de Carlisle...j'accepte avec plaisir la permission Sir, cependant j'aurais souhaité rejoindre d'abord Goxhill où je dois heu... régler quelques petites affaires. Et puis je vous informe que je suis tout à fait capable de prendre la direction de mon escadrille et de la ramener à la base.
Convaincu qu'il s'agissait d'une affaire de cœur, Coleman rigola.
- Ah... oui, bien sûr... je vois. Bien., alors d'accord, vous et Peer prendrez le Mosquito de réserve,. ça vous va comme ça?
Roberts s'en réjoui:
- Impeccable Sir! Nous partons quand?
- Et bien dès que vos équipages auront terminé leur service de parc, rangé leurs affaires et que les mécaniciens auront terminé de préparer les avions.
Il consulta sa montre:
- Je dirais... en début d'après midi, départ à 14h00 ça devrait jouer.
Les pilotes du Squadron 248 étaient contents de quitter la base de Cadgwith. Elle avait un aspect un peu lugubre avec ses bâtiments gris qui apparaissaient comme des fantômes dans le brouillard qui recouvrait régulièrement la région durant l'automne. La plupart des employés faisaient partie de l'intelligence service, aussi, il y avaient toujorus cet espèce de mystère qui les entouraient. Peu bavards, on ne savait pas qui était qui, qui faisait quoi. Cette ambiance faite de secrets et d'interdits n'étaient pas pour plaire à des gars qui avaient l'habitude d'affronter la mort en direct au quotidien.
Lorsque le premier Mosquito s'ébroua, roula sur la piste et pris son envol, à l'intérieur de l'habitacle Jan Peer regardait sans regret la base qui s'éloignait maintenant sous leurs ailes.
- Pfff quelle aventure... je ne suis pas mécontent de me barrer d'ici. Qu'ils aillent au diable avec leurs secrets à la noix, je préfère la guerre comme nous la faisons. Si nous devons un jour mourir dans cette vieille carcasse en bois, Au moins nous saurons pourquoi.
Une heure plus tard les Mosquito du Squadron 248 étaient de retour à Goxhill. Comme d'habitude les mécaniciens de la base les attendaient, faisant signe à chaque pilote, ils guidaient les avions jusqu'aux hangars. Comme d'habitude, une fois les moteurs à l'arrêt, ils plaçaient le petit escabeau sous l'habitacle, la trappe s'ouvrait et l'équipage mettait pieds à terre. Alors un des mécaniciens l'aidait à se défaire de leur parachute et posait la sempiternelle question:
- Alors Sir vous avez fait bon vol?
Comme d'habitude.
Dernière édition par le Dim 11 Fév 2007 - 5:32, édité 3 fois
615sqn_Harry- Wing Commander
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Re: René Martel, vive la France Libre
Le Flight Leutnant Roberts ne perdit pas de temps, il fit un rapide passage au dispersal où il annonça le retour du 248 et la prise de quartiers de ses pilotes. Après avoir reçu le laisser passer qui confirmait qu'il était bien en permission, il fonça jusqu'à sa chambre pour vêtir son uniforme de sortie. A chaque fois qu'il le passait, il se regardait dans la glace en se demandant s'il allait pouvoir le remettre un jour. Sur sa poitrine deux petits morceaux de tissu récompensant ses actions de guerre; la médaille du mérite et la DFC. Bientôt une petite barre oblique allait s'ajouter au ruban pourpre. Il ajusta sa casquette et quitta sa chambre en emportant son sac à effets. D'un pas rapide il se dirigea vers la sortie de la base et retrouva avec plaisir sa petite Wolseley Hornet. Il enleva la bâche, brancha la batterie et d'un coup manivelle énergique, mit le moteur en marche qui démarra dans un bruit sport. Il s'installa dans l'habitacle et laissa le moteur chauffer. Alors que les aiguilles s'animaient dans les cadrans de tableau de bord et que le capot vibrait à chaque sollicitation de la pédale des gaz. Roberts soupira, l'odeur de cuir et d'huile chaude lui donnaient la nostalgie, elles lui rappelaient des souvenirs vécu à grande vitesse au volant de cette voiure, souvenirs qui semblaient si lointains mais pourtant si proches. Voilà trois ans qu'il avait abandonné sa jeunesse en s'engageant dans la RAF. Vingt quatre ans à peine et il était déjà considéré comme un vétéran. Vingt quatre ans et déjà à la tête d'une escadrille composée de trente-deux appareils et 48 hommes d'équipage, dont il avait parfois la vie entre les mains. Lourde responsabilité pour un jeune homme que la guerre avait empêché de terminer ses études de médecine à Cambridge.
Il s'alluma une cigarette, consulta la carte; Manston, ce n'était pas la porte à côté, 400 kilomètres au moins, il prévoyait deux jours pour rejoindre la base qui se trouvait dans le Kent. Sur le chemin, il avait décidé de s'arrêter à Horningsea dans la banlieue de Cambridge où il avait logé pendant ses années d'études chez Miss Pidley. Il enclencha la marche arrière et après une courte manœuvre, il démarra en trombe. Bientôt Goxhill et ses Mosquito étaient derrière lui. La campagne anglaise défilait de part et d'autre du capot de la voiture de sport. Roberts avait remplacé sa casquette de la RAF pour une casquette en flanelle de laine écossaise. Il avait mis ses lunettes de vol et le nez derrière le petit saute vent, il s'enivrait des montées en régime de son bolide, le vent balayant son visage, il souriait. A l'entrée des petits villages il saluait les habitants qui le regardait un peu surpris, d'un double débrayage nerveux, tout en descendant d'un rapport, il ralentissait, traversait l'agglomération à vitesse modérée et puis dès que la chaussée se dégageait devant lui, le son à l'échappement caverneux passait à un registre plus aigu, les vitesses passaient à la volée. Chaque mur, talus ou tunnel était prétexte pour profiter des mélopées rageuses évacuées par l'échappement libre. Après une heure trente de route à bon rythme, il s'arrêta à Skegness dans la baie de Wash au bord de la mer. La petite ville côtière semblait avoir été épargnée par la guerre. Seuls deux destroyers mouillaient au milieu des petits chalutiers, désormais obligés de rester au port. Il trouva un petit pub et immobilisa sa Wolseley. Il essuya soigneusement son visage poussiéreux et après avoir installé le tonneau cover, pénétra dans l'établissement. C'était un pub de port typiquement anglais comme on peu les imaginer dans les contes d'Oscar Wilde. Un escalier de quatre larges marches permettait d'accéder à la salle de débit basse de plafond et enfumée. Le deuxième étage en mezzanine où l'on servait à manger était occupé par quelques clients qui mangeaient en silence. Roberts se faufila entre les tables et les colones en bois et s'installa au fond où il avait tout loisir pour observer la salle et ses occupants. Une accorte serveuse aux cheveux marron s'approcha avec un grand sourire.
- Qu'est-ce que je peux vous servir monsieur l'officier?
Il réfléchit un instant puis se décida pour une bière rousse. Alors que la serveuse s'apprêtait à repartir derrière son comptoir, il la héla:
- heu... mademoiselle... fraîche ma bière svp!
Il lui fit un clin d'oeil.
Elle rougit et lorsqu'elle lui ramenait un grand verre remplit d'un liquide doré surmonté d'une finie couche de mousse. De la condensation perlait sur le verre. La serveuse essuya la table devant lui et déposa la bière.
- Qu'est-ce qui vous amène par ici? On a pas souvent des pilotes à Skegnees.
Elle rougit une nouvelle fois.
Oscar sourit:
- Et bien mademoiselle, voyez-vous je suis en permission, et comme un ami m'a parlé d'une serveuse fort jolie travaillant dans ce pub, je m'y suis arrêté.
Il s'approcha l'air malicieux et lui chuchota l'air mystérieux.
- Avez-vous une idée de qui il pourrait s'agir, car mise à par vous je ne vois que des marins barbus et malodorants.
Elle rigola, ses joues avaient passées du rouge au pourpre.
- Et bien dites-donc vous. Je savais que les pilotes de la RAF étaient des coquins, mais je ne pensais pas que c'était aussi vrai.
Elle s'éloigna d'un pas provocateur en jouant des hanches.
Oscar soupira un grand coup. Ah les femmes, voilà bien longtemps qu'il n'y avait plus songé. Et celle-là n'était pas pour lui déplaire, bien au contraire. Il s'alluma une cigarette et bu lentement sa bière. Il apprit que la serveuse s'appelait Colleen Whitney mais que tout le monde l'appelait "Molly". Il bu lentement sa bière et en commanda une autre ainsi qu'un repas chaud composé de bacon et de lentilles. C'était tout ce que le pub pouvait proposer en cette période de restrictions. Molly se plaignait, mais Roberts eut vite fait de constater que c'était plus un prétexte pour discuter avec lui qu'autre chose. Il lui donna ses coordonnées. Une heure plus tard, il se leva et paya à regret. La belle serveuse semblait contrariée par son départ.
- Pourquoi faut-il que lorsque je rencontre un homme intelligent, gentil et drôle, il prend presque systématiquement la route ou la mer...
Roberts qui était sur le pas de porte marqua un temps d'arrêt. Puis sans trop savoir pourquoi il fit demi-tour et s'approcha de Molly.
- Je reviendrai... promis. Ca va comme ça.
Il lui caressa affectueusement la joue et l'embrassa doucement sous le regard courroucé des clients jaloux il quitta enfin le pub. Après avoir lancé le moteur, il s'installa au volant de sa Wolseley et reprit sa route en direction de Cambridge. Lorsque le brouillard ne couvrait pas l'Angleterre, l'automne rendait la campagne chatoyante. Les couleurs des forêts traversées par Roberts étaient absolument magnifiques, un doux mélange de vert, d'ocre et de rouge. Les yeux rêveurs, un bleu à l'âme, le pilote anglais roulait moins vite. La guerre lui avait presque fait oublier l'amour et la sensualité. La rencontre avec Coollen l'avait troublé. La fille n'était pas super belle, ce n'était pas un mannequin, juste une fille avec du charme, quelque chose de troublant, quelque chose qui ne le laissait pas indifférent. Il frissona, un courant d'air humide tourbillonait dans l'habitacle dépourvu de toutes protections. Il s'arrêta pour revêtir son Irvin jacket qu'il avait pris avec lui à toutes fins utiles, il se félicita de cette décision. En cette fin d'après-midi, la température commençait de se faire fraîche. Il alluma les deus gros phares Lucas recouvert des caches imposés par la guerre et il arriva enfin à Horningsea. La coquette maison en briques rouges de Miss Pidley n'avait pas changé. Lorsqu'il pénétra dans la petite court dans le halo faiblards de ses projecteurs bridés, les rideaux bougèrent derrière la fenêtre au cadre de bois blanc. Il s'avança doucement vers le perron. Il savait que Miss Pidley allait arriver. Elle ouvra doucement la porte aux gonds bien graissés. Elle était comme il l'avait quittée trois ans auparavant. Rondelette, le visage encadré par ses cheveux gris et son éternelle tablier en dentelle blanche. Lorsqu'elle le vit, elle mit la main à la bouche:
- Oh mon Dieux, Oscar c'est vous? Mais qu'est ce que vous venez faire par ici.
Roberts n'était plus le fringant officier de la RAF, il était, un instant, redevenu l'étudiant studieux qui lorsqu'il rentrait trop tard se faisait sermonner par tante Pidley comme l'appelait affectueusement les étudiants qu'elle hébergeait.
Il bafouilla:
- Je... je dois aller à Manston et comme la route était longue depuis Goxhill .. je me suis dit que je pouvais passer vous dire un petit bonjour et peut-être que vous auriez de quoi me loger juste cette nuit...
Derrière ses petites lunettes, la bonne Miss Pidley avait les larmes aux yeux. Roberts en était troublé.
Elle s'effaça du pas de porte.
- Mais que'est-ce que attends allez entre vite vient à l'intérieur. tu vas prendre froid. Je vais te préparer un repas et ta chambre est toujours libre, tu pourras y dormir autant que tu voudras.
Oscar entra dans le vestibule. Comme autre fois, ça sentait bon la cire pour meuble et le thé à la cannelle. Les porcelaines et les portraits des aïeux étaient toujours à la même place, les boules en cuivre de la rambarde d'escalier, toujours aussi brillantes et encaustiquées. Miss Pidley s'affairait à petits pas. Les tasses tintaient dans la cuisine. Sans un mot, Oscar s'installa à la grande table. Elle déposa une tasse fumante et quelques biscuits au beurre. Elle le regardait l'air inquiète.
- Tu as mauvaise mine mon garçon? Si ta mère te voyait dans cet état elle aurait du souci... au fait tu es déjà allé voir ta mère j'espère?
Roberts était gêné, non il n'y était pas encore allé, il avait un peu honte, mais il voulait d'abord se rendre à Manston rapidement. Dans la poche intérieure de sa vareuse, il avait toujours la lettre de Julie Lebours et il devait la remettre à René Martel avant que son squadron ne parte pour la Birmanie.
Il s'alluma une cigarette, consulta la carte; Manston, ce n'était pas la porte à côté, 400 kilomètres au moins, il prévoyait deux jours pour rejoindre la base qui se trouvait dans le Kent. Sur le chemin, il avait décidé de s'arrêter à Horningsea dans la banlieue de Cambridge où il avait logé pendant ses années d'études chez Miss Pidley. Il enclencha la marche arrière et après une courte manœuvre, il démarra en trombe. Bientôt Goxhill et ses Mosquito étaient derrière lui. La campagne anglaise défilait de part et d'autre du capot de la voiture de sport. Roberts avait remplacé sa casquette de la RAF pour une casquette en flanelle de laine écossaise. Il avait mis ses lunettes de vol et le nez derrière le petit saute vent, il s'enivrait des montées en régime de son bolide, le vent balayant son visage, il souriait. A l'entrée des petits villages il saluait les habitants qui le regardait un peu surpris, d'un double débrayage nerveux, tout en descendant d'un rapport, il ralentissait, traversait l'agglomération à vitesse modérée et puis dès que la chaussée se dégageait devant lui, le son à l'échappement caverneux passait à un registre plus aigu, les vitesses passaient à la volée. Chaque mur, talus ou tunnel était prétexte pour profiter des mélopées rageuses évacuées par l'échappement libre. Après une heure trente de route à bon rythme, il s'arrêta à Skegness dans la baie de Wash au bord de la mer. La petite ville côtière semblait avoir été épargnée par la guerre. Seuls deux destroyers mouillaient au milieu des petits chalutiers, désormais obligés de rester au port. Il trouva un petit pub et immobilisa sa Wolseley. Il essuya soigneusement son visage poussiéreux et après avoir installé le tonneau cover, pénétra dans l'établissement. C'était un pub de port typiquement anglais comme on peu les imaginer dans les contes d'Oscar Wilde. Un escalier de quatre larges marches permettait d'accéder à la salle de débit basse de plafond et enfumée. Le deuxième étage en mezzanine où l'on servait à manger était occupé par quelques clients qui mangeaient en silence. Roberts se faufila entre les tables et les colones en bois et s'installa au fond où il avait tout loisir pour observer la salle et ses occupants. Une accorte serveuse aux cheveux marron s'approcha avec un grand sourire.
- Qu'est-ce que je peux vous servir monsieur l'officier?
Il réfléchit un instant puis se décida pour une bière rousse. Alors que la serveuse s'apprêtait à repartir derrière son comptoir, il la héla:
- heu... mademoiselle... fraîche ma bière svp!
Il lui fit un clin d'oeil.
Elle rougit et lorsqu'elle lui ramenait un grand verre remplit d'un liquide doré surmonté d'une finie couche de mousse. De la condensation perlait sur le verre. La serveuse essuya la table devant lui et déposa la bière.
- Qu'est-ce qui vous amène par ici? On a pas souvent des pilotes à Skegnees.
Elle rougit une nouvelle fois.
Oscar sourit:
- Et bien mademoiselle, voyez-vous je suis en permission, et comme un ami m'a parlé d'une serveuse fort jolie travaillant dans ce pub, je m'y suis arrêté.
Il s'approcha l'air malicieux et lui chuchota l'air mystérieux.
- Avez-vous une idée de qui il pourrait s'agir, car mise à par vous je ne vois que des marins barbus et malodorants.
Elle rigola, ses joues avaient passées du rouge au pourpre.
- Et bien dites-donc vous. Je savais que les pilotes de la RAF étaient des coquins, mais je ne pensais pas que c'était aussi vrai.
Elle s'éloigna d'un pas provocateur en jouant des hanches.
Oscar soupira un grand coup. Ah les femmes, voilà bien longtemps qu'il n'y avait plus songé. Et celle-là n'était pas pour lui déplaire, bien au contraire. Il s'alluma une cigarette et bu lentement sa bière. Il apprit que la serveuse s'appelait Colleen Whitney mais que tout le monde l'appelait "Molly". Il bu lentement sa bière et en commanda une autre ainsi qu'un repas chaud composé de bacon et de lentilles. C'était tout ce que le pub pouvait proposer en cette période de restrictions. Molly se plaignait, mais Roberts eut vite fait de constater que c'était plus un prétexte pour discuter avec lui qu'autre chose. Il lui donna ses coordonnées. Une heure plus tard, il se leva et paya à regret. La belle serveuse semblait contrariée par son départ.
- Pourquoi faut-il que lorsque je rencontre un homme intelligent, gentil et drôle, il prend presque systématiquement la route ou la mer...
Roberts qui était sur le pas de porte marqua un temps d'arrêt. Puis sans trop savoir pourquoi il fit demi-tour et s'approcha de Molly.
- Je reviendrai... promis. Ca va comme ça.
Il lui caressa affectueusement la joue et l'embrassa doucement sous le regard courroucé des clients jaloux il quitta enfin le pub. Après avoir lancé le moteur, il s'installa au volant de sa Wolseley et reprit sa route en direction de Cambridge. Lorsque le brouillard ne couvrait pas l'Angleterre, l'automne rendait la campagne chatoyante. Les couleurs des forêts traversées par Roberts étaient absolument magnifiques, un doux mélange de vert, d'ocre et de rouge. Les yeux rêveurs, un bleu à l'âme, le pilote anglais roulait moins vite. La guerre lui avait presque fait oublier l'amour et la sensualité. La rencontre avec Coollen l'avait troublé. La fille n'était pas super belle, ce n'était pas un mannequin, juste une fille avec du charme, quelque chose de troublant, quelque chose qui ne le laissait pas indifférent. Il frissona, un courant d'air humide tourbillonait dans l'habitacle dépourvu de toutes protections. Il s'arrêta pour revêtir son Irvin jacket qu'il avait pris avec lui à toutes fins utiles, il se félicita de cette décision. En cette fin d'après-midi, la température commençait de se faire fraîche. Il alluma les deus gros phares Lucas recouvert des caches imposés par la guerre et il arriva enfin à Horningsea. La coquette maison en briques rouges de Miss Pidley n'avait pas changé. Lorsqu'il pénétra dans la petite court dans le halo faiblards de ses projecteurs bridés, les rideaux bougèrent derrière la fenêtre au cadre de bois blanc. Il s'avança doucement vers le perron. Il savait que Miss Pidley allait arriver. Elle ouvra doucement la porte aux gonds bien graissés. Elle était comme il l'avait quittée trois ans auparavant. Rondelette, le visage encadré par ses cheveux gris et son éternelle tablier en dentelle blanche. Lorsqu'elle le vit, elle mit la main à la bouche:
- Oh mon Dieux, Oscar c'est vous? Mais qu'est ce que vous venez faire par ici.
Roberts n'était plus le fringant officier de la RAF, il était, un instant, redevenu l'étudiant studieux qui lorsqu'il rentrait trop tard se faisait sermonner par tante Pidley comme l'appelait affectueusement les étudiants qu'elle hébergeait.
Il bafouilla:
- Je... je dois aller à Manston et comme la route était longue depuis Goxhill .. je me suis dit que je pouvais passer vous dire un petit bonjour et peut-être que vous auriez de quoi me loger juste cette nuit...
Derrière ses petites lunettes, la bonne Miss Pidley avait les larmes aux yeux. Roberts en était troublé.
Elle s'effaça du pas de porte.
- Mais que'est-ce que attends allez entre vite vient à l'intérieur. tu vas prendre froid. Je vais te préparer un repas et ta chambre est toujours libre, tu pourras y dormir autant que tu voudras.
Oscar entra dans le vestibule. Comme autre fois, ça sentait bon la cire pour meuble et le thé à la cannelle. Les porcelaines et les portraits des aïeux étaient toujours à la même place, les boules en cuivre de la rambarde d'escalier, toujours aussi brillantes et encaustiquées. Miss Pidley s'affairait à petits pas. Les tasses tintaient dans la cuisine. Sans un mot, Oscar s'installa à la grande table. Elle déposa une tasse fumante et quelques biscuits au beurre. Elle le regardait l'air inquiète.
- Tu as mauvaise mine mon garçon? Si ta mère te voyait dans cet état elle aurait du souci... au fait tu es déjà allé voir ta mère j'espère?
Roberts était gêné, non il n'y était pas encore allé, il avait un peu honte, mais il voulait d'abord se rendre à Manston rapidement. Dans la poche intérieure de sa vareuse, il avait toujours la lettre de Julie Lebours et il devait la remettre à René Martel avant que son squadron ne parte pour la Birmanie.
Dernière édition par le Dim 11 Fév 2007 - 12:35, édité 1 fois
615sqn_Harry- Wing Commander
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Re: René Martel, vive la France Libre
Le lendemain matin, Oscar se leva à l'aube. Aux premières lueurs du jour il sauta de son lit. Sa chambre se trouvait sous les toits et par la fenêtre, il pouvait voir les maisons avoisinantes. Un épais brouillard recouvrait la région. Il ouvrit la fenêtre et respira à grandes bouffées l'air humide. De la cuisine émanaient de délicieuses odeurs de lard grillé, d'œufs et de pain toast. Il retrouva son uniforme brossé, sa chemise et sa cravate repassées, ses chaussures cirées. Sacrée Mme Pidley. Elle l'attendait rayonnante dans sa cuisine, la table était mise. Oscar la salua gaiement avant de s'asseoir en regardant avec envie les morceaux de lard et les petites saucisses griller dans la poêle. Il engloutit le petit déjeuner et but deux grands bols de thé. Lorsque l'heure de partir fut venue, miss Pidley l'accompagna en trottinant derrière lui. Dans le vestibule elle ajusta une dernière fois sa cravate et épousta de quelques gestes nerveux de la main sa veste d'uniforme. Elle était un peu émue, mais elle ne le laissait pas apparaître.
- Allez va mon grand et soit prudent.
Alors qu'il s'installait au volant elle courut vers lui un petit sac à la main:
- ... attends, tiens des cookies au beurre, j'en ai fait ce matin avant que tu te lèves, il y a aussi une bouteille de thé... et n'oublies pas d'aller voir tes parents!
Oscar prit le sac et Après lui avoir promis une dernière fois qu'il serait prudent, il reprit, nostalgique, sa route vers Manston. Il avait quitté la côte et s'enfonçait dans le pays. Les villes du Cambridgeshire et leurs zones industrielles toutes vouées à l'effort de guerre défilaient l'une après l'autre. Il dut se soumettre à plusieurs contrôles. Il arriva enfin dans la région tenue par le groupe 11; le fameux groupe, qui, en 1940, commandé par le Vice-Air Marshal Keith Park avait supporté l'assaut principal des attaques de la Luftwaffe pendant la bataille d'Angleterre. Ca et là, des traces des combats violents qui s'étaient déroulées dans ce secteur, étaient encore visibles. Régulièrement, des bâtiments détruits, des usines calcinées, des carcasses d'avions partiellement démontées pour en récupérer le précieux aluminium, parsemaient son chemin. Enfin, vers le milieu de l'après-midi, il aperçut enfin les longs hangars en béton de la base de Manston. Il rstationna sa Wolseley à l'entrée de la base et s'approcha du poste de garde.
Après quelques hésitations, le planton de garde accepta de le laisser entrer. Un soldat accompagna le FL Roberts jusqu'au dispersal où un officier de renseignements le reçu.
- Hum, oui je vois, il va falloir un peu de patience, le FO Martel mène une patrouille de surveillance au-dessus du Chanel, il devrait revenir d'ici une vingtaine de minutes. Vous pouvez rejoindre le mess des officiers si le cœur vous en dit.
Oscar s'installa au bar du mess. Il était désert à cette heure, aussi il prit son thé et s'installa à l'extérieur. Une dizaine de minute plus tard, il remarqua une forte animation du côté d'un des hangars. Des véhicules du feu et des ambulances foncèrent en direction de la piste en faisant sonner leurs cloches. Au loin, le vrombissement de plusieurs avions se fit entendre. Un officier quitta la salle de contrôle et la main en visière devant sa casquette observait le groupe rentrant. Roberts s'approcha.
- La patrouille s'est mal passée?
L'officier le contempla, un peu surpris par sa présence. Puis rassuré par les galons et les décorations de son interlocuteur, répondit nerveusement:
- Oui... ce sont les gars du 615, ils ont été accrochés. Il y a de la casse.
Au loin, une des silhouettes traînait derrière elle un long panache de fumée noire.
L'officier observait maintenant la scène dans une paire de jumelles, ajouta:
- C'est le n° 5, Stevenson, son moteur cafouille.
Le Spitfire blessé s'approchait.
Oscar "Bob" Roberts avait commencé dans la RAF en pilotant un Hurricane MkIIc dans le squadron 51 attaché à la défense du territoire. Il savait que le Spitfire arrivait beaucoup trop vite pour se poser sans casse. La gorge serrée, il voyait maintenant le chasseur s'approcher du seuil de la piste. Le train n'était pas sorti. Le préposé à l'alarme couru sur la piste et tira une fusée pour signaler l'oubli. L'Officier l'interpella.
- Laissez tomber sergent, il n'a plus d'hydraulique, il va se poser sur le ventre.
Le long de la piste les pompiers attendaient.
Roberts s'approcha et dit doucement.
- Plus d'hydraulique? Ca veut dire pas de train, pas de flaps...
L'officier répondit:
- Oui et plus de pas d'hélice... de l'huile plein le pare-brise...
Le Spitfire s'approchait maintenant le moteur au ralenti, alors qu'il se trouvait à quelques mètres du sol le pilote coupa net le moteur. Le chasseur franchi le pas de la piste, passa à leur hauteur à grande vitesse et s'affala d'un coup sur la piste en béton dans un terrible fracas. Il glissa une bonne cinquantaine de mètres sur le ventre avant de s'immobiliser. Immédiatement un incendie se déclara au niveau du moteur.
Les véhicules de pompier qui avaient accompagné tant bien que mal le Spitfire désemparé pendant son approche sur la piste, se ruaient vers la carcasse enflammée. Fort heureusement, avant que le feu ne ravage le cockpit une épaisse couche de mousse recouvra l'avion. Avant même que le feu se soit complètement éteint, les sauveteurs se précipitèrent vers la verrière qui fut brisé en quelques coups de haches. Soigneusement, se donnant des ordres brefs, ils extirpèrent le corps inanimé du malheureux pilote. Oscar pu voir sa tenue de vol maculée d'huile et noircie par la fumée. Visiblement il n'avait pas trop souffert du feu, par contre, une vilaine blessure étai visible à sa jambe droite, voilà donc la raison qui l'avait sans doute empêché de sauter. Alors qu'un bulldozer évacuait déjà la carcasse du Spitfire de la piste et que qu'une ambulance emportait le malheureux vers une clinique, Oscar "Bob" Roberts aperçu un petit groupe de pilotes qui attendaient devant le dispersal. Il s'agissait des pilotes rescapés de la patrouille, il aperçut parmi eux, un homme de taille moyenne et de corpulence athlétique, il regarda son visage. Il avait quelque chose de familier. Le nez, oui il avait le même nez qu'Edouard Martel l'illustre cousin.
- Sir Martel... René Martel?
Le pilote français qui discutait des raisons de la tragédie qui venait de se dérouler sous leurs yeux, marqua un temps d'arrêt, un peu surpris d'être interpellé par cet officier de la RAF qui lui était complètement inconnu.
- Oui... c'est moi, heu je n'ai pas l'honneur de vous connaître Sir...?
Roberts se repris:
- ... oui excusez-moi, j'aurais dû commencer par me présenter, je suis le Flight Leutnant Oscar "Bob" Robert du squadron 248... nos Mosquito sont basés à Goxhill. J'aimerais vous voir quelques instants... plus tard naturellement... c'est possible... au mess?
Martel semblait un peu étonné par cette demande:
- C'est un truc officiel Sir?
Roberts était un peu gêné par la présence des autres pilotes:
- Non.. non, c'est heu... personnel.
Pour couper court à toutes discussions il consulta sa montre:
- Je dirais à 17h30 au mess des officiers? Ca vous laisse le temps de faire votre rapport.
René Martel inquiet par l'air mystérieux de son interlocuteur remit ses affaires à François Devarenne.
- Attendez Sir Roberts, je suis à vous dans 5 minutes.
Il s'adressa à Devarenne et Volta en français:
- François tu peux déposer mes affaires dans ma chambre. Emil, tu fais le rapport de combat, je ferais celui de l'accident de Stevenson plus tard. J'irais le voir à la clinique quand j'en aurais finis avec Monsieur.
Le PO Volta acquiesca et entra dans le dispersal
Reprenant en Anglais, il s'adressa à Roberts:
- Venez, je vais me changer et nous allons directement au mess.
Martel y déposa sa mae west ainsi que sa veste de vol, il changea ses bottes de vol contre une paire de chaussures de ville, lissa ses pantalons et quitta le vestiaire. Roberts l'attendait à l'extérieur et les deux hommes se dirigèrent vers le mess. Oscar était tendu.
Martel donna quelques détails sur sa patrouille:
- On s'est accroché avec les gars de la JG26 de Beaumont-le Roger. Ils savent manier leur FW190. Ils nous donnent du fil à retordre. Nous en avons descendu 2, mais leur leader a descendu Stevenson.
Ils s'installèrent tous les deux au bar. Martel qui commençait d'être impatient l'interpella.
- Bon Sir Roberts, si vous me disiez maintenant la raison de votre visite.
Robert soupira profondément.
- Bien...il y a un mois, mon escadrille a été choisie pour exécuter une mission sur la France occupée... La Rochelle. Le QG de la Kriegsmarine... vous en avez peut-être entendu parler.
Martel acquiesça du chef, oui il en avait entendu parlé. Il avait un intérêt particulier sur tout ce qui se passait dans ce secteur, pour une raison bien compréhensible. Il n'estima pas nécessaire de le dire à Roberts.
- .. voilà, c'est moi qui conduisait la formation, alors qu'on avait largué nos bombes, mon Mosquito a été gravement touché par la flack...
René qui était entrain de boire sa bière interrompit son geste. Les sourcils froncés, il auscultait maintenant Roberts.
- ... vous êtes de la Gironde n'est-ce pas?
Martel acquiesça:
- Oui... pourquoi ça a de l'importance.
Roberts conscient et gêné de l'effet que son histoire provoquait chez le pilote français poursuivit rapidement:
- Lorsque j'ai réalisé que mon avion ne me ramènerait pas en Angleterre, j'ai piqué à l'intérieur des terres pour me soustraire aux chasseurs de la Luftwaffe. J'ai fini par me poser sur le ventre en plein en campagne.
La mâchoire crispée, les sourcils froncés, Martel avait cessé de siroter sa bière.
- Allez-y Roberts je vous écoute...
-Et bien dès que notre appareil s'est immobilisé, avec mon navigateur nous avons pris la fuite et nous sommes arrivés au milieu d'une vigne. Un vendangeur qui travaillait là nous a caché dans une petite cabane.
Roberts décrit avec détail la cabane et l'homme qui les avait aidé...
Martel murmura:
- C'était la vigne de mon oncle Roger... et l'homme qui vous a aidé... mon cousin Edouard... n'est-ce pas?
- Oui... c'est fou d'ailleurs ce que vous lui ressemblez Martel. Lui et ses hommes nous ont caché. Edouard nous a donné des habits civils, puis nous sommes partis dans un petit village... en vélo... Rouillac.
René avait de la peine à contenir son émotion.
- Roberts je vous en conjure ne vous foutez pas de ma gueule...
- Non non, je vous dit la stricte vérité. Nous avons été cachés dans un vieux château...
René répondit
- Ce n'est pas un château c'est l'abbatiale de Marcillac Lanville.. j'y allais dans le temps, j'y allais avec... continuez Roberts.
- Nous avons été cachés quelques temps là, puis on est venu nous chercher... nous avons été logés chez ... chez... Louis Lebour
René était rêveur:
-... alors vous l'avez vue? Hein, c'est ça la raison de votre visite Roberts?
Il plongea son regard embué dans le fond de son verre
- ... comment va t'elle?
Oscar lui donna une tape amicale sur l'épaule.
- Elle va bien Martel... elle va bien et elle toujours aussi belle...
Il plongea la main dans sa vareuse et en extirpa la lettre. L'enveloppe était froissée.
- La voilà, la raison de ma visite...
Tremblant Martel pris la lettre.
Roberts poursuivit
- ... Julie Lebour me la remise... pour vous... lorsqu'Edouard m'a parlé d'un cousin pilote qui portait le même nom que lui, j'ai immédiatement pensé à vous. Vous êtes connu et on avait parlé de vous dans la presse quelques semaines auparavant lorsque vous avez eu la DSO. Votre cousin m'a demandé de ne rien dire à Julie à votre sujet. Mais pour une raison qui m'échappe, elle savait que vous étiez en Angleterre que vous faisiez partie des FAFL... elle avait même une photo découpée dans un journal anglais...elle m'a parlé de vous et j'ai dû admettre que je vous connaissais de réputation... alors un matin elle m'a donné cette lettre... et me voilà.
Nerveusement, il s'alluma maladroitement une cigarette.
Martel restait les yeux fixés sur l'enveloppe, n'osant y croire, il ne pouvait pas l'ouvrir.
Roberts était gêné, ceci d'autant qu'en cette fin de soirée, le mess se remplissait gentiment des pilotes qui avaient terminé leur journée. Il sentait qu'on les observait. Il descendit de la chaise de bar et mis sa casquette sur la tête.
- Bien... bon ben voilà j'ai fait ma commission...maintenant, je crois que je vais vous laisser Martel, je doit y aller...
Il fit un pas, mais René Martel le retint.
- NON... heu excusez-moi.. non... attendez, ne partez pas comme ça.
Roberts repris sa place sur le tabouret du bar.
- ... Parlez-moi d'elle... comment était-elle, ses habits? sa coiffure? son parfum?
- Haem, écoutez Martel, je suis conscient que ma visite vous trouble, mais je doit vraiment y aller, je n'ai pas de chambre et il faut que je trouve un hôtel avant la nuit.
- Nous vous logerons ici, nous avons des chambres, tiens celle de ce malheureux Stevenson, elle est libre maintenant, vous pourrez dormir là, Emil... je veux dire le Pilot Officer Volta a certainement organisé le transfert de ses affaires à la clinique où il est soigné... je vous en prie Roberts... restez.
Le pilote de Mosquito devait la vie à la famille de René Martel, aussi il décida de rester à Manston.
- Elle est vraiment très belle Martel, l'une des plus belles femmes qu'il m'ait été donné de voir...
Et jusque tard dans la nuit, il raconta ce qu'il avait vu et vécu pendant sa terrible escapade.
- Allez va mon grand et soit prudent.
Alors qu'il s'installait au volant elle courut vers lui un petit sac à la main:
- ... attends, tiens des cookies au beurre, j'en ai fait ce matin avant que tu te lèves, il y a aussi une bouteille de thé... et n'oublies pas d'aller voir tes parents!
Oscar prit le sac et Après lui avoir promis une dernière fois qu'il serait prudent, il reprit, nostalgique, sa route vers Manston. Il avait quitté la côte et s'enfonçait dans le pays. Les villes du Cambridgeshire et leurs zones industrielles toutes vouées à l'effort de guerre défilaient l'une après l'autre. Il dut se soumettre à plusieurs contrôles. Il arriva enfin dans la région tenue par le groupe 11; le fameux groupe, qui, en 1940, commandé par le Vice-Air Marshal Keith Park avait supporté l'assaut principal des attaques de la Luftwaffe pendant la bataille d'Angleterre. Ca et là, des traces des combats violents qui s'étaient déroulées dans ce secteur, étaient encore visibles. Régulièrement, des bâtiments détruits, des usines calcinées, des carcasses d'avions partiellement démontées pour en récupérer le précieux aluminium, parsemaient son chemin. Enfin, vers le milieu de l'après-midi, il aperçut enfin les longs hangars en béton de la base de Manston. Il rstationna sa Wolseley à l'entrée de la base et s'approcha du poste de garde.
Après quelques hésitations, le planton de garde accepta de le laisser entrer. Un soldat accompagna le FL Roberts jusqu'au dispersal où un officier de renseignements le reçu.
- Hum, oui je vois, il va falloir un peu de patience, le FO Martel mène une patrouille de surveillance au-dessus du Chanel, il devrait revenir d'ici une vingtaine de minutes. Vous pouvez rejoindre le mess des officiers si le cœur vous en dit.
Oscar s'installa au bar du mess. Il était désert à cette heure, aussi il prit son thé et s'installa à l'extérieur. Une dizaine de minute plus tard, il remarqua une forte animation du côté d'un des hangars. Des véhicules du feu et des ambulances foncèrent en direction de la piste en faisant sonner leurs cloches. Au loin, le vrombissement de plusieurs avions se fit entendre. Un officier quitta la salle de contrôle et la main en visière devant sa casquette observait le groupe rentrant. Roberts s'approcha.
- La patrouille s'est mal passée?
L'officier le contempla, un peu surpris par sa présence. Puis rassuré par les galons et les décorations de son interlocuteur, répondit nerveusement:
- Oui... ce sont les gars du 615, ils ont été accrochés. Il y a de la casse.
Au loin, une des silhouettes traînait derrière elle un long panache de fumée noire.
L'officier observait maintenant la scène dans une paire de jumelles, ajouta:
- C'est le n° 5, Stevenson, son moteur cafouille.
Le Spitfire blessé s'approchait.
Oscar "Bob" Roberts avait commencé dans la RAF en pilotant un Hurricane MkIIc dans le squadron 51 attaché à la défense du territoire. Il savait que le Spitfire arrivait beaucoup trop vite pour se poser sans casse. La gorge serrée, il voyait maintenant le chasseur s'approcher du seuil de la piste. Le train n'était pas sorti. Le préposé à l'alarme couru sur la piste et tira une fusée pour signaler l'oubli. L'Officier l'interpella.
- Laissez tomber sergent, il n'a plus d'hydraulique, il va se poser sur le ventre.
Le long de la piste les pompiers attendaient.
Roberts s'approcha et dit doucement.
- Plus d'hydraulique? Ca veut dire pas de train, pas de flaps...
L'officier répondit:
- Oui et plus de pas d'hélice... de l'huile plein le pare-brise...
Le Spitfire s'approchait maintenant le moteur au ralenti, alors qu'il se trouvait à quelques mètres du sol le pilote coupa net le moteur. Le chasseur franchi le pas de la piste, passa à leur hauteur à grande vitesse et s'affala d'un coup sur la piste en béton dans un terrible fracas. Il glissa une bonne cinquantaine de mètres sur le ventre avant de s'immobiliser. Immédiatement un incendie se déclara au niveau du moteur.
Les véhicules de pompier qui avaient accompagné tant bien que mal le Spitfire désemparé pendant son approche sur la piste, se ruaient vers la carcasse enflammée. Fort heureusement, avant que le feu ne ravage le cockpit une épaisse couche de mousse recouvra l'avion. Avant même que le feu se soit complètement éteint, les sauveteurs se précipitèrent vers la verrière qui fut brisé en quelques coups de haches. Soigneusement, se donnant des ordres brefs, ils extirpèrent le corps inanimé du malheureux pilote. Oscar pu voir sa tenue de vol maculée d'huile et noircie par la fumée. Visiblement il n'avait pas trop souffert du feu, par contre, une vilaine blessure étai visible à sa jambe droite, voilà donc la raison qui l'avait sans doute empêché de sauter. Alors qu'un bulldozer évacuait déjà la carcasse du Spitfire de la piste et que qu'une ambulance emportait le malheureux vers une clinique, Oscar "Bob" Roberts aperçu un petit groupe de pilotes qui attendaient devant le dispersal. Il s'agissait des pilotes rescapés de la patrouille, il aperçut parmi eux, un homme de taille moyenne et de corpulence athlétique, il regarda son visage. Il avait quelque chose de familier. Le nez, oui il avait le même nez qu'Edouard Martel l'illustre cousin.
- Sir Martel... René Martel?
Le pilote français qui discutait des raisons de la tragédie qui venait de se dérouler sous leurs yeux, marqua un temps d'arrêt, un peu surpris d'être interpellé par cet officier de la RAF qui lui était complètement inconnu.
- Oui... c'est moi, heu je n'ai pas l'honneur de vous connaître Sir...?
Roberts se repris:
- ... oui excusez-moi, j'aurais dû commencer par me présenter, je suis le Flight Leutnant Oscar "Bob" Robert du squadron 248... nos Mosquito sont basés à Goxhill. J'aimerais vous voir quelques instants... plus tard naturellement... c'est possible... au mess?
Martel semblait un peu étonné par cette demande:
- C'est un truc officiel Sir?
Roberts était un peu gêné par la présence des autres pilotes:
- Non.. non, c'est heu... personnel.
Pour couper court à toutes discussions il consulta sa montre:
- Je dirais à 17h30 au mess des officiers? Ca vous laisse le temps de faire votre rapport.
René Martel inquiet par l'air mystérieux de son interlocuteur remit ses affaires à François Devarenne.
- Attendez Sir Roberts, je suis à vous dans 5 minutes.
Il s'adressa à Devarenne et Volta en français:
- François tu peux déposer mes affaires dans ma chambre. Emil, tu fais le rapport de combat, je ferais celui de l'accident de Stevenson plus tard. J'irais le voir à la clinique quand j'en aurais finis avec Monsieur.
Le PO Volta acquiesca et entra dans le dispersal
Reprenant en Anglais, il s'adressa à Roberts:
- Venez, je vais me changer et nous allons directement au mess.
Martel y déposa sa mae west ainsi que sa veste de vol, il changea ses bottes de vol contre une paire de chaussures de ville, lissa ses pantalons et quitta le vestiaire. Roberts l'attendait à l'extérieur et les deux hommes se dirigèrent vers le mess. Oscar était tendu.
Martel donna quelques détails sur sa patrouille:
- On s'est accroché avec les gars de la JG26 de Beaumont-le Roger. Ils savent manier leur FW190. Ils nous donnent du fil à retordre. Nous en avons descendu 2, mais leur leader a descendu Stevenson.
Ils s'installèrent tous les deux au bar. Martel qui commençait d'être impatient l'interpella.
- Bon Sir Roberts, si vous me disiez maintenant la raison de votre visite.
Robert soupira profondément.
- Bien...il y a un mois, mon escadrille a été choisie pour exécuter une mission sur la France occupée... La Rochelle. Le QG de la Kriegsmarine... vous en avez peut-être entendu parler.
Martel acquiesça du chef, oui il en avait entendu parlé. Il avait un intérêt particulier sur tout ce qui se passait dans ce secteur, pour une raison bien compréhensible. Il n'estima pas nécessaire de le dire à Roberts.
- .. voilà, c'est moi qui conduisait la formation, alors qu'on avait largué nos bombes, mon Mosquito a été gravement touché par la flack...
René qui était entrain de boire sa bière interrompit son geste. Les sourcils froncés, il auscultait maintenant Roberts.
- ... vous êtes de la Gironde n'est-ce pas?
Martel acquiesça:
- Oui... pourquoi ça a de l'importance.
Roberts conscient et gêné de l'effet que son histoire provoquait chez le pilote français poursuivit rapidement:
- Lorsque j'ai réalisé que mon avion ne me ramènerait pas en Angleterre, j'ai piqué à l'intérieur des terres pour me soustraire aux chasseurs de la Luftwaffe. J'ai fini par me poser sur le ventre en plein en campagne.
La mâchoire crispée, les sourcils froncés, Martel avait cessé de siroter sa bière.
- Allez-y Roberts je vous écoute...
-Et bien dès que notre appareil s'est immobilisé, avec mon navigateur nous avons pris la fuite et nous sommes arrivés au milieu d'une vigne. Un vendangeur qui travaillait là nous a caché dans une petite cabane.
Roberts décrit avec détail la cabane et l'homme qui les avait aidé...
Martel murmura:
- C'était la vigne de mon oncle Roger... et l'homme qui vous a aidé... mon cousin Edouard... n'est-ce pas?
- Oui... c'est fou d'ailleurs ce que vous lui ressemblez Martel. Lui et ses hommes nous ont caché. Edouard nous a donné des habits civils, puis nous sommes partis dans un petit village... en vélo... Rouillac.
René avait de la peine à contenir son émotion.
- Roberts je vous en conjure ne vous foutez pas de ma gueule...
- Non non, je vous dit la stricte vérité. Nous avons été cachés dans un vieux château...
René répondit
- Ce n'est pas un château c'est l'abbatiale de Marcillac Lanville.. j'y allais dans le temps, j'y allais avec... continuez Roberts.
- Nous avons été cachés quelques temps là, puis on est venu nous chercher... nous avons été logés chez ... chez... Louis Lebour
René était rêveur:
-... alors vous l'avez vue? Hein, c'est ça la raison de votre visite Roberts?
Il plongea son regard embué dans le fond de son verre
- ... comment va t'elle?
Oscar lui donna une tape amicale sur l'épaule.
- Elle va bien Martel... elle va bien et elle toujours aussi belle...
Il plongea la main dans sa vareuse et en extirpa la lettre. L'enveloppe était froissée.
- La voilà, la raison de ma visite...
Tremblant Martel pris la lettre.
Roberts poursuivit
- ... Julie Lebour me la remise... pour vous... lorsqu'Edouard m'a parlé d'un cousin pilote qui portait le même nom que lui, j'ai immédiatement pensé à vous. Vous êtes connu et on avait parlé de vous dans la presse quelques semaines auparavant lorsque vous avez eu la DSO. Votre cousin m'a demandé de ne rien dire à Julie à votre sujet. Mais pour une raison qui m'échappe, elle savait que vous étiez en Angleterre que vous faisiez partie des FAFL... elle avait même une photo découpée dans un journal anglais...elle m'a parlé de vous et j'ai dû admettre que je vous connaissais de réputation... alors un matin elle m'a donné cette lettre... et me voilà.
Nerveusement, il s'alluma maladroitement une cigarette.
Martel restait les yeux fixés sur l'enveloppe, n'osant y croire, il ne pouvait pas l'ouvrir.
Roberts était gêné, ceci d'autant qu'en cette fin de soirée, le mess se remplissait gentiment des pilotes qui avaient terminé leur journée. Il sentait qu'on les observait. Il descendit de la chaise de bar et mis sa casquette sur la tête.
- Bien... bon ben voilà j'ai fait ma commission...maintenant, je crois que je vais vous laisser Martel, je doit y aller...
Il fit un pas, mais René Martel le retint.
- NON... heu excusez-moi.. non... attendez, ne partez pas comme ça.
Roberts repris sa place sur le tabouret du bar.
- ... Parlez-moi d'elle... comment était-elle, ses habits? sa coiffure? son parfum?
- Haem, écoutez Martel, je suis conscient que ma visite vous trouble, mais je doit vraiment y aller, je n'ai pas de chambre et il faut que je trouve un hôtel avant la nuit.
- Nous vous logerons ici, nous avons des chambres, tiens celle de ce malheureux Stevenson, elle est libre maintenant, vous pourrez dormir là, Emil... je veux dire le Pilot Officer Volta a certainement organisé le transfert de ses affaires à la clinique où il est soigné... je vous en prie Roberts... restez.
Le pilote de Mosquito devait la vie à la famille de René Martel, aussi il décida de rester à Manston.
- Elle est vraiment très belle Martel, l'une des plus belles femmes qu'il m'ait été donné de voir...
Et jusque tard dans la nuit, il raconta ce qu'il avait vu et vécu pendant sa terrible escapade.
Dernière édition par le Mer 28 Nov 2007 - 0:52, édité 1 fois
615sqn_Harry- Wing Commander
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Date d'inscription : 26/10/2005
Re: René Martel, vive la France Libre
Superbe .... comme d'hab aurais je tendance a dire, je reprends les textes a chaques fosi dans word, une petite mise en page .. il ne manque que quelques images triée du jeu , de shoot de film pour l'ambiance visuelle (presque pas besoin tellement l'imagination travaille en te lisant) et c'est éditable.
hihi,.... un mot -> encore
hihi,.... un mot -> encore
Re: René Martel, vive la France Libre
Bravo Harry c'est magnifique , chui fan !
RTA_Sam- 2nd Lieutnant
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Localisation : Geneve
Date d'inscription : 21/12/2005
Re: René Martel, vive la France Libre
Le lendemain, avant de se séparer, les deux hommes se promirent de se revoir. Martel ne détourna son regard de la voiture de Roberts qu'une fois celle-ci disparue au bout de la route.
Il soupira profondément. Il avait maintenant rendez-vous avec le Group Captain Warwick et il savait que son entretien serait difficile. D'un pas décidé, il traversa la base en direction du quartier général.
Il se présenta devant la porte du bureau du Group Captain Warwick, après avoir frappé deux coups discrets, la réponse de se fit pas attendre, la voix de stentor de l'Officier supérieur anglais résonna de l'autre côté de la porte:
- Entrez!
Martel avait revêtu son uniforme le plus propre, il avait parfaitement ajusté sa casquette et il fait effectua un salut parfait:
- Flying Officer Martel à vos ordres Sir.
Warwik était resté assis, les mains jointes sous son menton. Il observa le pilote français quelques secondes avant de l'inviter à s'asseoir.
- Prenez place Martel.
Il ajusta de petites lunettes de lecture et consulta rapidement la lettre qui était posée sur son bureau avant de la reposer et d'à nouveau regarder Martel en faisant en gros soupir.
- Votre demande m'ennuie Lieutenant... Vous vous rendez compte si chaque pilote de la RAF commençait de soumettre ses désirs à l'Etat-Major, où irait-on?
Martel se dandinait mal à l'aise sur sa chaise.
- Ecoutez Sir, je sais que le Général de Gaule essaye de mettre en place une escadrille complète composée de pilotes français. Vous pensez bien que cela m'intéresse, maintenant si je vais avec le 615 aux Indes, je serais trop loin pour revenir et je risque d'être coincé là-bas, c'est la raison de ma demande.
Warwik se leva et tout en arpentant la pièce, alluma sa pipe. Pensif, il s'immobilisa devant la fenêtre qui donnait sur l'aérodrome. Au bout de la piste, la patrouille du matin prenait l'air dans le grondement sourd des moteurs des Spitfire MkIX dont le Squadron venait d'être rééquipé:
- Oui j'avais compris cela Martel, je suis au courant de cette escadrille que votre Général aimerait mettre en route, je connais même le numéro de ce squadron; 340. Je connais aussi le front sur lequel il sera envoyé et le type d'avions que le Fighter Command aimeraient y affecter. Franchement Martel, je ne sais pas si vous faites un bon choix en rejoignant ce groupe, dans l'immédiat en tout cas.
Martel répondit:
- Ah bon! Et où ce Squadron est censé aller?
Tout en curant sa pipe Warwick s'appuya nonchalamment contre un gros secrétaire ventru et répondit.
- Si vous vous allez affronter des Bf109G et FW190 en P40 en Afrique, rejoignez cette escadrille.
Martel était déçu, pour lui, le P40 s'était le vieux Tomahawk de 1941 utilisés par les Australiens des sqn 112 et 250, il n'avait pas connaissance que Curtiss avait depuis, produit de nouveaux modèles plus performants.
- Des... des P40...
Il resta silencieux quelques secondes. L'Afrique, ça faisait quand même une trotte, et puis le Curtiss. Il se souvient des P40 prêtés par les Américains et qui étaient à North Wealt. Un pilote du squadron 62 qui les avait essayés, en avait une piètre opinion et c'était en 1941, alors aujourd'hui avec les nouvelles montures de la Luftwaffe, autant signer tout de suite son arrêt de mort. Il répondit résolument.
- Sir, je vous remercie de ces informations. L'Afrique, passe encore, mais me passer du Spitfire pour voler sur un Curtiss; non merci!
Il se leva.
- Je suis désolé de vous avoir dérangé Sir, je suivrais le squadron 615 vaille que vaille.
Il s'apprêtait à partir quand le Group Captain Warwick. L'interpella.
- Attendez Martel, j'ai peut-être une solution pour vous. Le127..., je veux dire le squadron 127, est équipé de Spitfire, ça vous dit?
Martel le regarda un peu surpris:
- Le 127? Je ne connais pas cette escadrille.
Le regard malicieux, Warwick le coupa:
- ... je répète, ils ont des Spitfire. Ainsi, quoi qu'il arrive vous ne serez pas trop loin de votre escadrille française et vous pourrez toujours changer d'avis plus tard.
Il se rendit près de son secrétaire, fouilla dans un classeur suspendu tout en grommelant en mordillant sa pipe.
- Alors..... 127... 127... aah le voilà, il me semblait que j'avais encore la demande quelque part...
Il extirpa une feuille d'engagement qu'il remplit partiellement à la main. Après l'avoir signée, il la tendit à Martel.
- Voilà complétez et...
Indiquant l'emplacement avec le bec de sa pipe.
- ... signez ... ici.
Le FO Martel était heureux et signa sans discuter et surtout sans lire tout le document, notamment la deuxième page que Warwick s'empressa de reprendre.
- Merci Sir, je n'en demandais pas tant, vous êtes chics, je commençais de croire que les Anglais abusaient un peu des volontaires français.
Warwick épongea l'encre de l'épitaphe avec un buvard.
- Bien je suis content que vous ayez accepté de rester dans la RAF. Le commandant du 127 est pour vous, une vieille connaissance, il s'agit du Wing Commander Harry J. Flower. Je crois que vous avez volé avec lui pendant la Bataille d'Angleterre. Vous le rejoindrez dans 3 jours à Huddersfield près de Manchester.
Martel fut un peu surpris.
- Huddersfield? Près de Manchester? Mais c'est tout au Nord du pays ça?
Warwick sembla un peu gêné.
- Oui heu.. c'est que vous allez toucher de nouveaux avions, des Spitfire je vous rassure, et qu'il y une petite conversion à faire et du matériel spécifique à toucher avant d'être opérationnel.
Alors qu'il allait quitter le bureau. Warwik le rappela:
- Ah oui, j'allais oublier, je vous remercie sincèrement d'avoir accepté ce poste. Nous avions de la peine à trouver des volontaires pour cette escadrille...
Martel se figea instantanément:
- Comment ça des volontaires???
Warwick fit des yeux étonnés.
- Ah... je ne vous l'avais pas dit... ça a dû m'échapper... le squadron 127 fait partie du Wing 76 stationné en Afrique du Nord.
Martel, réalisant qu'il avait été dupé, s'emporta:
- Quoi! Comment ça en Afrique? Vous voulez dire que je pars en Afrique, c'est bien ça.
René était un gars calme et intelligent, mais il n'était pas du genre à être abusé et pris pour un idiot sans réagir.
- Sir! Lorsque vous m'avez parlé du squadron 127, il n'a jamais été question d'Afrique! Vous m'avez trompé! Rendez-moi immédiatement mon ordre de transfert!
Il s'avança menaçant vers le bureau de Warwick. Celui-ci alluma sa pipe nonchalamment.
- Voyons, voyons Martel, calmez-vous, je vous en prie. Vous ne voudriez quand même pas rejoindre Le Caire à fond de cales non?
René Martel s'immobilisa hésitant. Il n'allait quand même pas frapper un officier supérieur de sa Gracieuse Majesté. Warwick poursuivit:
- De quoi vous plaignez-vous Martel, vous n'allez plus en Birmanie, vous conservez votre Spitfire et vous vous rapprochez de l'escadrille française que De Gaule est entrain de mettre en place.
Le pilote français resta un moment silencieux. Warwick n'avait pas tout tort.
- C'est... c'est dégueulasse, vous m'avez abusé. Si vous vouliez que je rejoigne le 127, il y avait qu'à me présenter les choses honnêtement, certainement que j'aurais accepté...
Et il s'en alla en tapant violemment la porte. La tête émaciée du Lieutenant Scrodge, la secrétaire particulière de Warwick, apparu au guichet, la cinquantaine tapante, les cheveux colorés en gris argent avec reflets bleutés, la plus ancienne WAAF de la base faisait assez régulièrement l'objet de quolibets de la part des pilotes. Un rictus sévère soulignait son regard réprobateur.
- Et bien que ce passe t-il ici? En voilà des façons de quitter le bureau d'un officier supérieur de la RAF!
Martel très énervé n'avait pas envie de se confondre en explications. Il s'arrêta à la hauteur du guichet!
- Désolé la vieille chouette. Y avait un vent de révolte qui souffle. Je vous conseille d'ailleurs de réintégrer votre charmant bureau avant que la porte de votre guichet ne se ferme à son tour de manière brutale sur votre joli nez crochu!
Il avait parlé en Français. Miss Scrodge réintégra son bureau sans insister.
C'était jour de repos pour l'escadrille "B" dont faisait partie Martel et ses camarades français. Il rejoignit d'un pas nerveux le mess des officiers et s'assied au bar sans un mot. Emil Volta faisait des mots croisés dans un coin et Louis Kierkegaard s'appliquait, la langue dehors à écrire une lettre. L'arrivée de Martel les intrigua et ils le rejoignèrent au bar. En deux mots René leur expliqua la situation.
- ... et voilà je quitte la base pour Huddersfield dans deux jours.
Le lendemain, après une dernière patrouille ennuyeuse sur le Channel, Le F/O Martel prépara, mélancolique, ses affaires. Trois ans qu'il avait quitté la France pour rejoindre la RAF dans des conditions épiques avec Louis. Qu'il combattait aux côtés de François Devarenne, Louis Kierkegaard et Emil Volta. Trois ans... et en deux jours, deux nouvelles importantes venaient chambouler le train train quotidien de la vie du squadron 615. La visite de Roberts qui lui a remis la lettre de Julie et son transfert vers l'Afrique. Il plissa sa combinaison de vol et la rangea soigneusement dans son sac à effets. Le jour suivant, au petit matin, après un dernier regards sur sa chambre vide, il ferma doucement la porte et dans la brume matinale, se rendit au mess pour un dernier petit déjeuner qu'il englouti rapidement. Il salua le cuisinier et le personnel intendant et pris la direction du quartier général pour annoncer son départ. Sans un mot, les yeux gonflés par la fatigue, le caporal timbra son ordre de départ et René Martel tourna résolument le dos au gros bâtiment gris. Tout en cheminant vers la sortie de la base de Manston, son regard se fixa sur les Spitfire qui avaient été sortis des hangars et que l'on préparait pour la première patrouille du matin. Il s'approcha. Le codé KW- E, son avion attitré était là. On avait effacé ses marques de victoires sous le hood, un autre le prendrait ce matin. Il n'aurait pas cru que cette séparation l'affecterait autant. Les mécaniciens qui le connaissaient le saluèrent et se retiraient quelques instants. Martel caressa l'aile elliptique du chasseur anglais. Il soupira un grand coup:
- ...le prolongement de mon corps... j'espère que ton successeur pourra me rendre autant de service que toi vieux frère.
Les yeux humides, sans un mot, il quitta les abords du taxiway et se dirigea résolument vers la sortie. Il était un peu triste car il n'avait pas pu dire correctement au revoir à ses camarades français. Ceux-ci avaient curieusement disparu le jour avant et Volta qui devait être son ailier dans la patrouille avait même réussi à se faire remplacer. Probablement inquiet de porter la guigne pour un dernier vol, par contre, autant lui que Devarenne et Kierkegaard n'avaient pas apparu au mess le soir alors que normalement, ils ne loupaient jamais l'occasion de venir boire un dernier thé avant d'aller se coucher. C'est ainsi, avec un petit bleu à l'âme qu'il se retrouva de la porte principale de la base, à attendre le camion Austin qui tout les matins conduits les permissionnaires ou les pilotes transférés à la gare de Manston. Bientôt, le bruit d'un véhicule arrivant à vive allure se fit entendre au loin dans la brume. Martel fronça les sourcils. Le son du moteur de cet engin ressemblait plus à celui d'un gros Diesel marin que celui crépitant d'un camion Austin. Bientôt deux gros phares suivis d'un long capot et de deux grandes ailes noires faisaient leur apparition. D'un coup de frein énergique, le conducteur immobilisa la grosse Daimler V12. Martel observait, maintenant, incrédule, le long véhicule de luxe. Le gros échappement laissait échapper un borborygme grave et une odeur qui ne laissait aucun doute quant à l'origine de l'essence utilisée dans le monstre; carburant aviation. La porte arrière s'ouvrit silencieusement et François Devarenne, la veste de sortie ouverte au premier bouton, la casquette de travers, tenant une bouteille de champagne dans la main, quitta l'habitacle:
- Les passagers à destination d' Huddersfield sont priés de monter à bord!
Les yeux ronds d'étonnement, René s'approcha de François, la vitre côté conducteur se baissa et le bras à la portière Emil Volta le regarda avec un petit sourire, tout en tapotant la portière, il s'adressa à Martel.
- Allez mon petit René, tu viens on y va. C'est un prêt d'une gentille dame aisée qui tient une maison hautement recommandée de Canterbury et qui a une attirance particulière pour les beaux pilotes de la RAF, surtout ceux qui parlent français. Elle me l'a prêtée à condition que je lui trouve de l'essence, ce qui ne fut pas difficile tu penses bien, pour un démerde comme moi.
Martel était bouche bée.
- Vous... vous êtes allés dans un lupanar?
Devarenne le regardait avec une petite étincelle lubrique qui brillait dans ses yeux vitreux.
- Ouai et je te dis pas le programme. De la haute voltige avec ma..âme Suzanne. Elle m'a fait des trucs que je pensais même pas que ça existaient... ouai!
René ne savait plus quoi dire:
- Et vous avez demandé une perm pour me conduire à Huddersfield, c'est chic les gars.
Louis Kierkegaard qui était à moitié endormi enfoncé dans les moelleux sièges en velours pourpre de la Daimler émergea de sa cuite:
- Une permission... tu... tu rigoles! On vient avec toi en Afrique Re... René! Hier on est allé voir Warwick, on lui a demandé de nous transférer au squadron 127, comme il a été d'accord, on est parti fêter ça chez Dame Callbridge à Canterbury. Allez monte, je ne peux plus la voir en peinture cette base de Manston, on a de la route à faire et si on veut être à l'heure, faut se dépêcher...
Le F/O Martel ne savait pas s'il devait rire ou pleurer. Emil qui semblait être le seul à peu près en état, sortit de la limousine sportive et ouvrit le coffre partiellement encombré avec une grosse nourrice d'essence. Il lui fit un clin d'oeil.
- C'est que ça boit ce briquet, j'ai dû prévoir un peu de réserve. Vas-y déposes tes bagages. Vu l'état de nos deux gais lurons tu t'assiéras à ma gauche. L'arrière n'est pas encore très fréquentable.
- Vous êtes fous les gars, vous êtes complètement fous, mais je vous adore!
Il soupira profondément. Il avait maintenant rendez-vous avec le Group Captain Warwick et il savait que son entretien serait difficile. D'un pas décidé, il traversa la base en direction du quartier général.
Il se présenta devant la porte du bureau du Group Captain Warwick, après avoir frappé deux coups discrets, la réponse de se fit pas attendre, la voix de stentor de l'Officier supérieur anglais résonna de l'autre côté de la porte:
- Entrez!
Martel avait revêtu son uniforme le plus propre, il avait parfaitement ajusté sa casquette et il fait effectua un salut parfait:
- Flying Officer Martel à vos ordres Sir.
Warwik était resté assis, les mains jointes sous son menton. Il observa le pilote français quelques secondes avant de l'inviter à s'asseoir.
- Prenez place Martel.
Il ajusta de petites lunettes de lecture et consulta rapidement la lettre qui était posée sur son bureau avant de la reposer et d'à nouveau regarder Martel en faisant en gros soupir.
- Votre demande m'ennuie Lieutenant... Vous vous rendez compte si chaque pilote de la RAF commençait de soumettre ses désirs à l'Etat-Major, où irait-on?
Martel se dandinait mal à l'aise sur sa chaise.
- Ecoutez Sir, je sais que le Général de Gaule essaye de mettre en place une escadrille complète composée de pilotes français. Vous pensez bien que cela m'intéresse, maintenant si je vais avec le 615 aux Indes, je serais trop loin pour revenir et je risque d'être coincé là-bas, c'est la raison de ma demande.
Warwik se leva et tout en arpentant la pièce, alluma sa pipe. Pensif, il s'immobilisa devant la fenêtre qui donnait sur l'aérodrome. Au bout de la piste, la patrouille du matin prenait l'air dans le grondement sourd des moteurs des Spitfire MkIX dont le Squadron venait d'être rééquipé:
- Oui j'avais compris cela Martel, je suis au courant de cette escadrille que votre Général aimerait mettre en route, je connais même le numéro de ce squadron; 340. Je connais aussi le front sur lequel il sera envoyé et le type d'avions que le Fighter Command aimeraient y affecter. Franchement Martel, je ne sais pas si vous faites un bon choix en rejoignant ce groupe, dans l'immédiat en tout cas.
Martel répondit:
- Ah bon! Et où ce Squadron est censé aller?
Tout en curant sa pipe Warwick s'appuya nonchalamment contre un gros secrétaire ventru et répondit.
- Si vous vous allez affronter des Bf109G et FW190 en P40 en Afrique, rejoignez cette escadrille.
Martel était déçu, pour lui, le P40 s'était le vieux Tomahawk de 1941 utilisés par les Australiens des sqn 112 et 250, il n'avait pas connaissance que Curtiss avait depuis, produit de nouveaux modèles plus performants.
- Des... des P40...
Il resta silencieux quelques secondes. L'Afrique, ça faisait quand même une trotte, et puis le Curtiss. Il se souvient des P40 prêtés par les Américains et qui étaient à North Wealt. Un pilote du squadron 62 qui les avait essayés, en avait une piètre opinion et c'était en 1941, alors aujourd'hui avec les nouvelles montures de la Luftwaffe, autant signer tout de suite son arrêt de mort. Il répondit résolument.
- Sir, je vous remercie de ces informations. L'Afrique, passe encore, mais me passer du Spitfire pour voler sur un Curtiss; non merci!
Il se leva.
- Je suis désolé de vous avoir dérangé Sir, je suivrais le squadron 615 vaille que vaille.
Il s'apprêtait à partir quand le Group Captain Warwick. L'interpella.
- Attendez Martel, j'ai peut-être une solution pour vous. Le127..., je veux dire le squadron 127, est équipé de Spitfire, ça vous dit?
Martel le regarda un peu surpris:
- Le 127? Je ne connais pas cette escadrille.
Le regard malicieux, Warwick le coupa:
- ... je répète, ils ont des Spitfire. Ainsi, quoi qu'il arrive vous ne serez pas trop loin de votre escadrille française et vous pourrez toujours changer d'avis plus tard.
Il se rendit près de son secrétaire, fouilla dans un classeur suspendu tout en grommelant en mordillant sa pipe.
- Alors..... 127... 127... aah le voilà, il me semblait que j'avais encore la demande quelque part...
Il extirpa une feuille d'engagement qu'il remplit partiellement à la main. Après l'avoir signée, il la tendit à Martel.
- Voilà complétez et...
Indiquant l'emplacement avec le bec de sa pipe.
- ... signez ... ici.
Le FO Martel était heureux et signa sans discuter et surtout sans lire tout le document, notamment la deuxième page que Warwick s'empressa de reprendre.
- Merci Sir, je n'en demandais pas tant, vous êtes chics, je commençais de croire que les Anglais abusaient un peu des volontaires français.
Warwick épongea l'encre de l'épitaphe avec un buvard.
- Bien je suis content que vous ayez accepté de rester dans la RAF. Le commandant du 127 est pour vous, une vieille connaissance, il s'agit du Wing Commander Harry J. Flower. Je crois que vous avez volé avec lui pendant la Bataille d'Angleterre. Vous le rejoindrez dans 3 jours à Huddersfield près de Manchester.
Martel fut un peu surpris.
- Huddersfield? Près de Manchester? Mais c'est tout au Nord du pays ça?
Warwick sembla un peu gêné.
- Oui heu.. c'est que vous allez toucher de nouveaux avions, des Spitfire je vous rassure, et qu'il y une petite conversion à faire et du matériel spécifique à toucher avant d'être opérationnel.
Alors qu'il allait quitter le bureau. Warwik le rappela:
- Ah oui, j'allais oublier, je vous remercie sincèrement d'avoir accepté ce poste. Nous avions de la peine à trouver des volontaires pour cette escadrille...
Martel se figea instantanément:
- Comment ça des volontaires???
Warwick fit des yeux étonnés.
- Ah... je ne vous l'avais pas dit... ça a dû m'échapper... le squadron 127 fait partie du Wing 76 stationné en Afrique du Nord.
Martel, réalisant qu'il avait été dupé, s'emporta:
- Quoi! Comment ça en Afrique? Vous voulez dire que je pars en Afrique, c'est bien ça.
René était un gars calme et intelligent, mais il n'était pas du genre à être abusé et pris pour un idiot sans réagir.
- Sir! Lorsque vous m'avez parlé du squadron 127, il n'a jamais été question d'Afrique! Vous m'avez trompé! Rendez-moi immédiatement mon ordre de transfert!
Il s'avança menaçant vers le bureau de Warwick. Celui-ci alluma sa pipe nonchalamment.
- Voyons, voyons Martel, calmez-vous, je vous en prie. Vous ne voudriez quand même pas rejoindre Le Caire à fond de cales non?
René Martel s'immobilisa hésitant. Il n'allait quand même pas frapper un officier supérieur de sa Gracieuse Majesté. Warwick poursuivit:
- De quoi vous plaignez-vous Martel, vous n'allez plus en Birmanie, vous conservez votre Spitfire et vous vous rapprochez de l'escadrille française que De Gaule est entrain de mettre en place.
Le pilote français resta un moment silencieux. Warwick n'avait pas tout tort.
- C'est... c'est dégueulasse, vous m'avez abusé. Si vous vouliez que je rejoigne le 127, il y avait qu'à me présenter les choses honnêtement, certainement que j'aurais accepté...
Et il s'en alla en tapant violemment la porte. La tête émaciée du Lieutenant Scrodge, la secrétaire particulière de Warwick, apparu au guichet, la cinquantaine tapante, les cheveux colorés en gris argent avec reflets bleutés, la plus ancienne WAAF de la base faisait assez régulièrement l'objet de quolibets de la part des pilotes. Un rictus sévère soulignait son regard réprobateur.
- Et bien que ce passe t-il ici? En voilà des façons de quitter le bureau d'un officier supérieur de la RAF!
Martel très énervé n'avait pas envie de se confondre en explications. Il s'arrêta à la hauteur du guichet!
- Désolé la vieille chouette. Y avait un vent de révolte qui souffle. Je vous conseille d'ailleurs de réintégrer votre charmant bureau avant que la porte de votre guichet ne se ferme à son tour de manière brutale sur votre joli nez crochu!
Il avait parlé en Français. Miss Scrodge réintégra son bureau sans insister.
C'était jour de repos pour l'escadrille "B" dont faisait partie Martel et ses camarades français. Il rejoignit d'un pas nerveux le mess des officiers et s'assied au bar sans un mot. Emil Volta faisait des mots croisés dans un coin et Louis Kierkegaard s'appliquait, la langue dehors à écrire une lettre. L'arrivée de Martel les intrigua et ils le rejoignèrent au bar. En deux mots René leur expliqua la situation.
- ... et voilà je quitte la base pour Huddersfield dans deux jours.
Le lendemain, après une dernière patrouille ennuyeuse sur le Channel, Le F/O Martel prépara, mélancolique, ses affaires. Trois ans qu'il avait quitté la France pour rejoindre la RAF dans des conditions épiques avec Louis. Qu'il combattait aux côtés de François Devarenne, Louis Kierkegaard et Emil Volta. Trois ans... et en deux jours, deux nouvelles importantes venaient chambouler le train train quotidien de la vie du squadron 615. La visite de Roberts qui lui a remis la lettre de Julie et son transfert vers l'Afrique. Il plissa sa combinaison de vol et la rangea soigneusement dans son sac à effets. Le jour suivant, au petit matin, après un dernier regards sur sa chambre vide, il ferma doucement la porte et dans la brume matinale, se rendit au mess pour un dernier petit déjeuner qu'il englouti rapidement. Il salua le cuisinier et le personnel intendant et pris la direction du quartier général pour annoncer son départ. Sans un mot, les yeux gonflés par la fatigue, le caporal timbra son ordre de départ et René Martel tourna résolument le dos au gros bâtiment gris. Tout en cheminant vers la sortie de la base de Manston, son regard se fixa sur les Spitfire qui avaient été sortis des hangars et que l'on préparait pour la première patrouille du matin. Il s'approcha. Le codé KW- E, son avion attitré était là. On avait effacé ses marques de victoires sous le hood, un autre le prendrait ce matin. Il n'aurait pas cru que cette séparation l'affecterait autant. Les mécaniciens qui le connaissaient le saluèrent et se retiraient quelques instants. Martel caressa l'aile elliptique du chasseur anglais. Il soupira un grand coup:
- ...le prolongement de mon corps... j'espère que ton successeur pourra me rendre autant de service que toi vieux frère.
Les yeux humides, sans un mot, il quitta les abords du taxiway et se dirigea résolument vers la sortie. Il était un peu triste car il n'avait pas pu dire correctement au revoir à ses camarades français. Ceux-ci avaient curieusement disparu le jour avant et Volta qui devait être son ailier dans la patrouille avait même réussi à se faire remplacer. Probablement inquiet de porter la guigne pour un dernier vol, par contre, autant lui que Devarenne et Kierkegaard n'avaient pas apparu au mess le soir alors que normalement, ils ne loupaient jamais l'occasion de venir boire un dernier thé avant d'aller se coucher. C'est ainsi, avec un petit bleu à l'âme qu'il se retrouva de la porte principale de la base, à attendre le camion Austin qui tout les matins conduits les permissionnaires ou les pilotes transférés à la gare de Manston. Bientôt, le bruit d'un véhicule arrivant à vive allure se fit entendre au loin dans la brume. Martel fronça les sourcils. Le son du moteur de cet engin ressemblait plus à celui d'un gros Diesel marin que celui crépitant d'un camion Austin. Bientôt deux gros phares suivis d'un long capot et de deux grandes ailes noires faisaient leur apparition. D'un coup de frein énergique, le conducteur immobilisa la grosse Daimler V12. Martel observait, maintenant, incrédule, le long véhicule de luxe. Le gros échappement laissait échapper un borborygme grave et une odeur qui ne laissait aucun doute quant à l'origine de l'essence utilisée dans le monstre; carburant aviation. La porte arrière s'ouvrit silencieusement et François Devarenne, la veste de sortie ouverte au premier bouton, la casquette de travers, tenant une bouteille de champagne dans la main, quitta l'habitacle:
- Les passagers à destination d' Huddersfield sont priés de monter à bord!
Les yeux ronds d'étonnement, René s'approcha de François, la vitre côté conducteur se baissa et le bras à la portière Emil Volta le regarda avec un petit sourire, tout en tapotant la portière, il s'adressa à Martel.
- Allez mon petit René, tu viens on y va. C'est un prêt d'une gentille dame aisée qui tient une maison hautement recommandée de Canterbury et qui a une attirance particulière pour les beaux pilotes de la RAF, surtout ceux qui parlent français. Elle me l'a prêtée à condition que je lui trouve de l'essence, ce qui ne fut pas difficile tu penses bien, pour un démerde comme moi.
Martel était bouche bée.
- Vous... vous êtes allés dans un lupanar?
Devarenne le regardait avec une petite étincelle lubrique qui brillait dans ses yeux vitreux.
- Ouai et je te dis pas le programme. De la haute voltige avec ma..âme Suzanne. Elle m'a fait des trucs que je pensais même pas que ça existaient... ouai!
René ne savait plus quoi dire:
- Et vous avez demandé une perm pour me conduire à Huddersfield, c'est chic les gars.
Louis Kierkegaard qui était à moitié endormi enfoncé dans les moelleux sièges en velours pourpre de la Daimler émergea de sa cuite:
- Une permission... tu... tu rigoles! On vient avec toi en Afrique Re... René! Hier on est allé voir Warwick, on lui a demandé de nous transférer au squadron 127, comme il a été d'accord, on est parti fêter ça chez Dame Callbridge à Canterbury. Allez monte, je ne peux plus la voir en peinture cette base de Manston, on a de la route à faire et si on veut être à l'heure, faut se dépêcher...
Le F/O Martel ne savait pas s'il devait rire ou pleurer. Emil qui semblait être le seul à peu près en état, sortit de la limousine sportive et ouvrit le coffre partiellement encombré avec une grosse nourrice d'essence. Il lui fit un clin d'oeil.
- C'est que ça boit ce briquet, j'ai dû prévoir un peu de réserve. Vas-y déposes tes bagages. Vu l'état de nos deux gais lurons tu t'assiéras à ma gauche. L'arrière n'est pas encore très fréquentable.
- Vous êtes fous les gars, vous êtes complètement fous, mais je vous adore!
Dernière édition par le Mer 28 Nov 2007 - 0:54, édité 1 fois
615sqn_Harry- Wing Commander
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615sqn_Volta- Group Captain
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Re: René Martel, vive la France Libre
Même si notre René réel est parti et que Volta a rejoint l'armée pour de vrai, la saga de René Martel et de ses camarades Louis Kierkergaard, Emil Volta, François Devarenne, Pyker, Oscar "Bob" Roberts et tous les autres va se poursuivre du côté de la Cyrénaïque...
Ca viendra ces prochains jours
Extrait d'une biographie imaginaire.
Tirée du magasine virtuel et "Aeroplane" tout aussi imaginaire...
: On lit souvent à votre sujet que la période "désert" fut une des plus prolifiques pour vous?
H: Oui c'est vrai, je crois en toute modestie pouvoir dire que j'étais à ce moment au sommet de ma forme. La campagne d'Afrique du Nord a été très dure du fait des éléments. La chaleur et le sable rendaient les choses difficiles. On se battait avant tout contre la météo, après contre les Italiens et les Allemands. Cette situation rendait la guerre plus "humaine" plus chevaleresque. A 17h00, il était de coutume de s'arrêter, c'était l'heure du thé, les deux bords cessaient les combats. En fait, j'adorais cette situation, on était loin de Londres et de la rigueur disciplinaire. C'était la débrouillardise totale, chaque jour apportait son lot de soucis qu'il fallait résoudre.
A: Comment décrivez-vous votre adversaire dans ces conditions particulières?
H: Et bien, il y avait les Italiens et les Allemands. On a souvent dit que les Italiens étaient de piètres soldats, je crois qu'ils étaient surtout mal encadrés. Certains de leurs pilotes étaient très bons et lorsqu'ils étaient bien pilotés, leurs avions étaient capables de nous causer passablement de problèmes. Les Allemands, comme d'habitude avaient un très bon niveau et des avions très performants, meilleurs que les nôtres. Par contre, comme leurs convois étaient constamment harcelés en Méditerranée par nos forces basées à Maltes, ils ont toujours manqués de pièces, de carburants et de pilotes. Leur chasse se battaient en escarmouches mais que pouvaient-ils faire d'autre avec 12 Bf109F face à parfois 30 ou 40 Hurricane ou Tomahawk?
A: On a souvent dit que le Spitfire MkVC à 4 canons était le plus mauvais des Spitfire. Pourtant c'est aux commandes de cet avion que vous avez abattus le plus d'avions ennemis.
H: On reprochait au MkVc l'enrayement de ses canons et ses performances amenuisées à cause de son filtre Voke et du poids engendré par les 2 canons supplémentaires. Mais qui dans le désert n'avait pas des problèmes d'armes enrayées et de filtration sur les moteurs? On a tendance à oublier avec le recul qu'un avion ce n'est pas seulement ses performances pures qui en font un bon avion, mais également et surtout le contexte dans lequel il a été engagé. Alors qu'à partir de 1942 le Hurricane avait pratiquement disparu des premières lignes, en Birmanie il a été utilisé jusqu'à la fin de la guerre...
Ca viendra ces prochains jours
Extrait d'une biographie imaginaire.
Tirée du magasine virtuel et "Aeroplane" tout aussi imaginaire...
: On lit souvent à votre sujet que la période "désert" fut une des plus prolifiques pour vous?
H: Oui c'est vrai, je crois en toute modestie pouvoir dire que j'étais à ce moment au sommet de ma forme. La campagne d'Afrique du Nord a été très dure du fait des éléments. La chaleur et le sable rendaient les choses difficiles. On se battait avant tout contre la météo, après contre les Italiens et les Allemands. Cette situation rendait la guerre plus "humaine" plus chevaleresque. A 17h00, il était de coutume de s'arrêter, c'était l'heure du thé, les deux bords cessaient les combats. En fait, j'adorais cette situation, on était loin de Londres et de la rigueur disciplinaire. C'était la débrouillardise totale, chaque jour apportait son lot de soucis qu'il fallait résoudre.
A: Comment décrivez-vous votre adversaire dans ces conditions particulières?
H: Et bien, il y avait les Italiens et les Allemands. On a souvent dit que les Italiens étaient de piètres soldats, je crois qu'ils étaient surtout mal encadrés. Certains de leurs pilotes étaient très bons et lorsqu'ils étaient bien pilotés, leurs avions étaient capables de nous causer passablement de problèmes. Les Allemands, comme d'habitude avaient un très bon niveau et des avions très performants, meilleurs que les nôtres. Par contre, comme leurs convois étaient constamment harcelés en Méditerranée par nos forces basées à Maltes, ils ont toujours manqués de pièces, de carburants et de pilotes. Leur chasse se battaient en escarmouches mais que pouvaient-ils faire d'autre avec 12 Bf109F face à parfois 30 ou 40 Hurricane ou Tomahawk?
A: On a souvent dit que le Spitfire MkVC à 4 canons était le plus mauvais des Spitfire. Pourtant c'est aux commandes de cet avion que vous avez abattus le plus d'avions ennemis.
H: On reprochait au MkVc l'enrayement de ses canons et ses performances amenuisées à cause de son filtre Voke et du poids engendré par les 2 canons supplémentaires. Mais qui dans le désert n'avait pas des problèmes d'armes enrayées et de filtration sur les moteurs? On a tendance à oublier avec le recul qu'un avion ce n'est pas seulement ses performances pures qui en font un bon avion, mais également et surtout le contexte dans lequel il a été engagé. Alors qu'à partir de 1942 le Hurricane avait pratiquement disparu des premières lignes, en Birmanie il a été utilisé jusqu'à la fin de la guerre...
615sqn_Harry- Wing Commander
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RTA_Oscarbob- Lt Colonel
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Re: René Martel, vive la France Libre
Je suis impatient de lire la suite
615sqn_Pyker- Squadron Leader
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Re: René Martel, vive la France Libre
- Bonjour Messieurs, bienvenue au squadron 127 à Huddersfield. Je suis non seulement là pour souhaiter la bienvenue, mais également pour vous présenter votre nouveau théâtre d'opérations et tout ce qui va avec, soit vos avions, le matériel de corps et votre matériel personnel.
Derrière le Wing Commander Harry Flower, il y avait une carte représentant une partie du Nord de l'Afrique. Sur une table se trouvait une pile d'habits couleur beige, et quelques accessoires. Il continua:
- En Cyrénaïque, avant les Allemands et les Italiens vous rencontrerez trois nouveaux ennemis! le soleil, le sable et le désert! Le désert c'est 50° degrés la journée, 0° degré la nuit! Pas une zone d'ombre, pas d'eau à des milliers de Yard. Le sable s'infiltre partout, dans vos habits, dans vos chaussures, dans les moteurs, les armes de bord. On ne gagne pas une guerre avec le désert, on s'y adapte. Celui qui vaincra les éléments en Cyrénaïque, gagnera la guerre du désert!
Avec une longue baguette, il indiqua une grande tache jaune sur la carte.
- Le Sahara oriental! Des dizaines de milliers de yards carrés de sable et de cailloux. Les habitants de ces contrées sont les scorpions, des serpents venimeux, quelques rongeurs, le chameau et le Fennec. Les tribus touaregs, les hommes bleus, vivent au rythme de cette marre de sable. En cas d'éjection dans ce secteur, sans expérience vous aurez aussi peu de chances de survivre qu'en barbotant dans l'Atlantique Nord en plein mois de février. C'est pourquoi vous êtes ici. Dans les deux semaines qui vont suivre, vous allez être formés à combattre dans ce milieu si particulier. Ca ira de la manière de préserver vos moteurs aux gestes qui sauvent en cas de morsures de serpents en passant sur les us et coutumes locales et l'orientation par les étoiles.
Il s'approcha de la table où étaient empilées les pièces d'uniforme et le matériel qu'il tapota de la main.
- Au terme de cette séance, chacun se rendra individuellement au magasin pour y retirer son paquetage individuel et son uniforme tropical. Ensuite, vous vous trouverez à 16h00 au hangar 4 où votre instructeur vol, le FL Gerry vous présentera l'avion sur lequel vous volerez là bas, le Spitfire MkVc.
Les pilotes quittèrent la salle en discutant jovialement. René Martel se dit que finalement, l'aventure qui se présentait était intéressante. Et puis le Sahara lui rappelait un grand-oncle un peu fou qui avait servi dans la Légion et dont les récits extraordinaires l'avaient captivé alors qu'il était enfant. Les forts de pierres français, les bédouins, les femmes mystérieuses et belles l'avaient fait rêver. Il se présenta le premier au dépôt. Le matériel de chacun avait été préparé à l'avance. Une rapide séance d'essayage et il regagna sa chambre. Il lui restait presque une heure à tuer avant de rejoindre le hangar 4, il se rendit donc au mess où il commanda une pinte de bière étonnamment fraîche. Surpris, il interrogea le barman.
- C'est bien la première fois que je bois une bière si délicate et fraîche en Angleterre.
Le soldat responsable du bar essuyait nerveusement le zinc à grands gestes circulaire. Il maugréa:
- C'est depuis qu'on a ce "Belge" sur la place. Il s'est arrangé pour avoir une de ces armoires refroidissantes que les Américains ont amené avec eux. Il a exigé que toutes les bières servies aux volontaires de la RAF devaient impérativement passer deux bonnes heures dans ce truc avant d'être servies...pfff comme si on ne savait pas servir une bonne bière en Angleterre.
René réfléchissait mais il n'avait pas souvenir d'avoir vu dans son groupe un pilote d'origine belge. Le squadron formait d'ailleurs comme souvent en ces sombres années de guerre, un mélange hétéroclite de pilotes provenant de diverses destinations. Ainsi, le 127 était non seulement composé de quelques pilotes anglais, mais également d'Ecossais, de Néo-Zélandais, de Français et même d'un Hollandais à l'accent à couper au couteau. Alors qu'il allait demander des précisions concernant ce pilote belge, la porte s'ouvrit en fracas sur le FL Pyker.
- Alors ça! Alors ça, on m'avait bien dit que la bande à René avait rejoint notre circus, mais je tenais à le voir de mes propres yeux!
Il traversa la petite salle de débit en trois pas et donna une claque amicale à Martel.
- Ah ben oui, ç'est bien lui! Sacré René, alors qu'es-tu devenu depuis notre escapade en Spit sur le port de Sherness? Tu te souviens la pâtée qu'on avait mis aux Fritz et Lee Marvey, la gueule qu'il avait faite quand Brand lui avait téléphoné en plein sermon!
Il rigola bruyamment. Sans laisser le temps à Martel de répondre, il apostropha le barman.
- Allez Clark, servez-nous deux belles pintes de bière et de la fraîche hein! Allez hop au pas de course, oune deux oune deux!
Les deux hommes échangèrent quelques souvenirs communs. Pyker expliqua qu'il avait été au squadron 11 quelques semaines après le fameux épisode de Sherness. Cette escadrille était attachée à la défense du territoire. Au début, ce groupe volait sur Spitfire MkVb. Avec l'arrivée des FW190 qu'ils ne pouvaient rattraper, le "11" était passé sur Spit à ailes tronquées et moteur spécial. Il y a quelques mois, lorsqu'il avait appris que l'on cherchait des volontaires pour l'Afrique du Nord, il avait saisi l'occasion.
- J'en avais marre de ce brouillard et de cette pluie. Ca faisait trop longtemps que je rêvais de soleil, alors j'ai pas hésité.
La situation était plaisante car la plupart des pilotes étaient des routiniers qui avaient pour certains même combattus ensembles. Le fait de savoir que l'on pouvait compter sur des coéquipiers efficaces étaient rassurants et l'ambiance était excellente.
A 16h00, tous les pilotes se pressaient dans le hangar pour voir leur nouvelle monture. Le FL Gerry présenta l'avion. Un Spitfire MkV au camouflage ocre et brun avec une drôle de prise d'air sous le capot. Dans ses ailes, quatre canons de 20mm dépassaient agressivement.
- Messieurs, autant vous le dire tout de suite, cet avion est un échec. C'est sans doute le pire Spitfire que vous serez amenés à voler et avec l'arrivée des premiers Spitfire MkIX enfin capables d'affronter le FW190, on pourrait effectivement se demander si notre état-major n'est pas un tantinet optimiste de nous faire voler sur ce cageot. Et bien Messieurs, rassurez-vous car il y a une raison, une bonne raison...
Dans l'assistance une rumeur sourde se fait entendre. L'instructeur s'approcha d'un petit pupitre où il saisit quelques feuilles de papiers.
- Je lis ici les derniers résultats du squadron 62 affecté à la base d'El Farouk au Sud Est du Caire après trois mois d'opération. Victoires aériennes: 32, victoires terrestre: plus de 60 véhicules, bâtiment, positions d'artillerie etc... ajoutons encore 3 navires de transports attaqués aux canons. Les pertes s'élèvent en trois mois à 12 pilotes sur 28. Ce squadron comme de nombreux autres bataillant sur ce front, est équipé de... Hurricane MkIIc et de Curtiss P40, des appareils, vous en conviendrez inférieurs à ceux de nos ennemis. Savez-vous pourquoi, ces pilotes s'en sortent aussi bien? Tout simplement, parce que ces chasseurs sont actuellement les seuls à résister au climat du désert! Comme vous la certainement dit le WC Flower lors de votre arrivée, le premier ennemi que vous allez rencontrer c'est le désert, et celui qui s'y adaptera le mieux gagnera cette bataille! Tout comme le Hawker et le Curtiss, le Spitfire MkVc a été étudié pour combattre sous ces latitudes. Il est plus lent qu'un MkVb, mais il est solide et fiable et c'est le premier objectif qu'on lui demande, soit de voler longtemps sans connaître de problème. L'ennemi connaît les mêmes problèmes et actuellement, le meilleur appareil dont disposent les forces de l'Axe en Libye, c'est le Bf109F et encore, leur nombre est restreint. Messieurs, je vous annonce que nous serons les premiers à combattre en Spitfire sous ces latitudes et croyez-moi, nous serons une mauvaise surprise pour les Allemands et les Italiens!
Derrière le Wing Commander Harry Flower, il y avait une carte représentant une partie du Nord de l'Afrique. Sur une table se trouvait une pile d'habits couleur beige, et quelques accessoires. Il continua:
- En Cyrénaïque, avant les Allemands et les Italiens vous rencontrerez trois nouveaux ennemis! le soleil, le sable et le désert! Le désert c'est 50° degrés la journée, 0° degré la nuit! Pas une zone d'ombre, pas d'eau à des milliers de Yard. Le sable s'infiltre partout, dans vos habits, dans vos chaussures, dans les moteurs, les armes de bord. On ne gagne pas une guerre avec le désert, on s'y adapte. Celui qui vaincra les éléments en Cyrénaïque, gagnera la guerre du désert!
Avec une longue baguette, il indiqua une grande tache jaune sur la carte.
- Le Sahara oriental! Des dizaines de milliers de yards carrés de sable et de cailloux. Les habitants de ces contrées sont les scorpions, des serpents venimeux, quelques rongeurs, le chameau et le Fennec. Les tribus touaregs, les hommes bleus, vivent au rythme de cette marre de sable. En cas d'éjection dans ce secteur, sans expérience vous aurez aussi peu de chances de survivre qu'en barbotant dans l'Atlantique Nord en plein mois de février. C'est pourquoi vous êtes ici. Dans les deux semaines qui vont suivre, vous allez être formés à combattre dans ce milieu si particulier. Ca ira de la manière de préserver vos moteurs aux gestes qui sauvent en cas de morsures de serpents en passant sur les us et coutumes locales et l'orientation par les étoiles.
Il s'approcha de la table où étaient empilées les pièces d'uniforme et le matériel qu'il tapota de la main.
- Au terme de cette séance, chacun se rendra individuellement au magasin pour y retirer son paquetage individuel et son uniforme tropical. Ensuite, vous vous trouverez à 16h00 au hangar 4 où votre instructeur vol, le FL Gerry vous présentera l'avion sur lequel vous volerez là bas, le Spitfire MkVc.
Les pilotes quittèrent la salle en discutant jovialement. René Martel se dit que finalement, l'aventure qui se présentait était intéressante. Et puis le Sahara lui rappelait un grand-oncle un peu fou qui avait servi dans la Légion et dont les récits extraordinaires l'avaient captivé alors qu'il était enfant. Les forts de pierres français, les bédouins, les femmes mystérieuses et belles l'avaient fait rêver. Il se présenta le premier au dépôt. Le matériel de chacun avait été préparé à l'avance. Une rapide séance d'essayage et il regagna sa chambre. Il lui restait presque une heure à tuer avant de rejoindre le hangar 4, il se rendit donc au mess où il commanda une pinte de bière étonnamment fraîche. Surpris, il interrogea le barman.
- C'est bien la première fois que je bois une bière si délicate et fraîche en Angleterre.
Le soldat responsable du bar essuyait nerveusement le zinc à grands gestes circulaire. Il maugréa:
- C'est depuis qu'on a ce "Belge" sur la place. Il s'est arrangé pour avoir une de ces armoires refroidissantes que les Américains ont amené avec eux. Il a exigé que toutes les bières servies aux volontaires de la RAF devaient impérativement passer deux bonnes heures dans ce truc avant d'être servies...pfff comme si on ne savait pas servir une bonne bière en Angleterre.
René réfléchissait mais il n'avait pas souvenir d'avoir vu dans son groupe un pilote d'origine belge. Le squadron formait d'ailleurs comme souvent en ces sombres années de guerre, un mélange hétéroclite de pilotes provenant de diverses destinations. Ainsi, le 127 était non seulement composé de quelques pilotes anglais, mais également d'Ecossais, de Néo-Zélandais, de Français et même d'un Hollandais à l'accent à couper au couteau. Alors qu'il allait demander des précisions concernant ce pilote belge, la porte s'ouvrit en fracas sur le FL Pyker.
- Alors ça! Alors ça, on m'avait bien dit que la bande à René avait rejoint notre circus, mais je tenais à le voir de mes propres yeux!
Il traversa la petite salle de débit en trois pas et donna une claque amicale à Martel.
- Ah ben oui, ç'est bien lui! Sacré René, alors qu'es-tu devenu depuis notre escapade en Spit sur le port de Sherness? Tu te souviens la pâtée qu'on avait mis aux Fritz et Lee Marvey, la gueule qu'il avait faite quand Brand lui avait téléphoné en plein sermon!
Il rigola bruyamment. Sans laisser le temps à Martel de répondre, il apostropha le barman.
- Allez Clark, servez-nous deux belles pintes de bière et de la fraîche hein! Allez hop au pas de course, oune deux oune deux!
Les deux hommes échangèrent quelques souvenirs communs. Pyker expliqua qu'il avait été au squadron 11 quelques semaines après le fameux épisode de Sherness. Cette escadrille était attachée à la défense du territoire. Au début, ce groupe volait sur Spitfire MkVb. Avec l'arrivée des FW190 qu'ils ne pouvaient rattraper, le "11" était passé sur Spit à ailes tronquées et moteur spécial. Il y a quelques mois, lorsqu'il avait appris que l'on cherchait des volontaires pour l'Afrique du Nord, il avait saisi l'occasion.
- J'en avais marre de ce brouillard et de cette pluie. Ca faisait trop longtemps que je rêvais de soleil, alors j'ai pas hésité.
La situation était plaisante car la plupart des pilotes étaient des routiniers qui avaient pour certains même combattus ensembles. Le fait de savoir que l'on pouvait compter sur des coéquipiers efficaces étaient rassurants et l'ambiance était excellente.
A 16h00, tous les pilotes se pressaient dans le hangar pour voir leur nouvelle monture. Le FL Gerry présenta l'avion. Un Spitfire MkV au camouflage ocre et brun avec une drôle de prise d'air sous le capot. Dans ses ailes, quatre canons de 20mm dépassaient agressivement.
- Messieurs, autant vous le dire tout de suite, cet avion est un échec. C'est sans doute le pire Spitfire que vous serez amenés à voler et avec l'arrivée des premiers Spitfire MkIX enfin capables d'affronter le FW190, on pourrait effectivement se demander si notre état-major n'est pas un tantinet optimiste de nous faire voler sur ce cageot. Et bien Messieurs, rassurez-vous car il y a une raison, une bonne raison...
Dans l'assistance une rumeur sourde se fait entendre. L'instructeur s'approcha d'un petit pupitre où il saisit quelques feuilles de papiers.
- Je lis ici les derniers résultats du squadron 62 affecté à la base d'El Farouk au Sud Est du Caire après trois mois d'opération. Victoires aériennes: 32, victoires terrestre: plus de 60 véhicules, bâtiment, positions d'artillerie etc... ajoutons encore 3 navires de transports attaqués aux canons. Les pertes s'élèvent en trois mois à 12 pilotes sur 28. Ce squadron comme de nombreux autres bataillant sur ce front, est équipé de... Hurricane MkIIc et de Curtiss P40, des appareils, vous en conviendrez inférieurs à ceux de nos ennemis. Savez-vous pourquoi, ces pilotes s'en sortent aussi bien? Tout simplement, parce que ces chasseurs sont actuellement les seuls à résister au climat du désert! Comme vous la certainement dit le WC Flower lors de votre arrivée, le premier ennemi que vous allez rencontrer c'est le désert, et celui qui s'y adaptera le mieux gagnera cette bataille! Tout comme le Hawker et le Curtiss, le Spitfire MkVc a été étudié pour combattre sous ces latitudes. Il est plus lent qu'un MkVb, mais il est solide et fiable et c'est le premier objectif qu'on lui demande, soit de voler longtemps sans connaître de problème. L'ennemi connaît les mêmes problèmes et actuellement, le meilleur appareil dont disposent les forces de l'Axe en Libye, c'est le Bf109F et encore, leur nombre est restreint. Messieurs, je vous annonce que nous serons les premiers à combattre en Spitfire sous ces latitudes et croyez-moi, nous serons une mauvaise surprise pour les Allemands et les Italiens!
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Re: René Martel, vive la France Libre
Une rumeur de satisfaction parcoura l'assemblée.
Et les jours se déroulèrent d'entraînement en théories qui furent rapidement assimilées. Le jour précédent le départ. Le Wing Commander Flower avait annoncé:
- Bien demain matin à 06h00 départ pour notre embarquement.
Le lieu était tenu secret, mais c'était une habitude de ne divulguer que le minimum d'informations.
Le lendemain, à l'aube, ils s'entassèrent dans quatre camions qui en deux heures les conduisaient au bord de l'Atlantique. Martel et ses camarades découvraient le port de Liverpool et le navire qui allait les transporter jusqu'en Méditerranée, le HMS Illustrious, un imposant porte-avions. En contemplant le navire François Devarenne se grattait la tête.
- Sacré coquille de noix. Tu parles pour passer inaperçu des U-Boot.
Empoignant résolument leur sac à effets, les pilotes se dirigèrent vers la passerelle où les attendaient deux matelots qui vérifièrent leurs ordres de marche. On les conduisit dans leur carré. Plusieurs escadrilles occupaient le navire et dans les soutes du bâtiment, outre leurs Spitfire, les pilotes du squadron 127 découvraient des Beaufighter et des Hurricane montés avec de gros canons sous les ailes.
- Canons de 40mm antichars!
Leur avait annoncé fièrement un jeune pilote britannique. Louis Kierkegaard le regarda un peu désabusé:
- Heu ouai, sont chouettes vos tuyaux de chauffage, mais si un essaim de Fritz vous tombe sur le poil, vous faites quoi avec ces veaux.
Leur interlocuteur parti d'un grand éclat de rire. Fanfaron il poursuivit en leur faisant un grand clin d'œil.
- Mais mon pauvre ami, pour que des Allemands nous tombent dessus, il faudrait qu'il y en ait encore.
Les quatre pilotes français restèrent quelques secondes silencieux devant une telle naïveté. Devarenne s'approcha le sourire moqueur.
- Et bien mon petit, ce n'est plus de la vantardise, mais carrément de l'inconscience. Dépêches toi d'écrire à maman pour lui dire que t'es encore en vie, parce que d'ici quelques semaines ça risque bien de ne plus être le cas.
Le jeune pilote voulu ajouter quelque chose, mais Louis lui fit signe de se taire et les quatre camarades se retirèrent en rigolant.
Malgré les submersibles allemands, le reste du voyage fut sans histoire. Il faut dire que le convoi purement militaire, était peut-être une cible de choix pour les Loups Gris, mais également et surtout une cible dangereuse avec les nombreux destroyers qui encadraient l'Illustrious et le HMS Victorious. Le passage du détroit de Gibraltar se déroula sans problème. Trois jours plus tard, le commandant de bord arpentait nerveusement la passerelle du poste de commandement. La proximité de Malte et des nombreux raids allemands qui se succédaient au quotidien sur l'île engendrait une grande tension dans le kiosque du porte-avions. Le surlendemain, une dépêche urgente alarmait le commandement. Tobrouk était tombé. Après des mois de siège, Rommel avait fini par capturer la ville. Un grand chamboulement dans l'organisation des forces du Commonwealth dans le secteur était à l'ordre du jour. Ainsi, on chuchotait que Churchill s'était déplacé en personne au Caire. Fort mécontent, il avait renvoyé Auchinleck en Angleterre le remplaçant par un jeune commandant, le Maréchal Montgomery. Les missives arrivaient l'une après l'autre au convoi. Dans un premier temps il avait été question de débarquer tout le monde à Malte, puis l'ordre avait été annulé. Le pilotes étaient nerveux, des bruits couraient dans les coursives de l'imposant navire de guerre, que le squadron 127 allaient peut-être devoir décoller du porte-avions. Aucun des pilotes de l'escadrille n'avaient jamais décollé d'un navire, la tension était à son comble lorsque le Wing Commander Flower fit son apparition à la salle de briefing.
- Bien Messieurs, après la chute de Tobrouk, un vent de panique a soufflé un instant dans les rangs de notre état-major au Caire. Winston lui-même est venu mettre un peu d'ordre dans ce merdier.
Flower s'essuya nerveusement le visage.
- Il a donc décidé de mettre les moyens nécessaires pour effectuer une puissante contre offensive, contre offensive dans laquelle nous sommes naturellement impliqué en première ligne. L'Illustrious va devoir faire demi-tour pour rentrer le plus rapidement en Angleterre et récupérer de nouveaux squadron. Winston a décidé de mettre le paquet ce coup-ci! Nous allons donc devoir quitter le bateau dans moins de quatre heures afin d'arriver au Caire avant la nuit. On vous expliquera comment décoller de ce navire, vous verrez ce n'est pas si compliqué que cela. Je vous donne rendez-vous à 17h00 dans cette même salle, ne prenez que le minimum d'affaires, le reste suivra plus tard par voie maritime.
Martel et ses camarades se regardèrent inquiets. Ce qu'ils redoutaient le plus ses derniers jours allaient s'accomplir. Ils rejoignaient leur cabine sans un mot. Rapidement, il préparèrent quelques affaires qui pourraient tenir dans le cockpit étriqué de leur Spitfire.
A 17h00 on expliqua sommairement comme décoller du porte-avions et nerveux, les pilotes rejoignaient le pont inférieur où chaque Spitfire étaient acheminés sur l'ascenseur pour y être monté sur le pont d'envol. René Martel se vit attribuer l'avion codé "E", Flower lui avait confié le groupe vert. On l'appela et il se mit avec deux mécaniciens sur le pont du monte-charge où venait d'être placé son Spitfire flambant neuf. Lorsqu'il apparu sur le pont, la Grande Bleue était calme, au loin le soleil qui commençait de descendre brillait de mille feux. A l'arrière du pont, les 4 premiers Spitfire étaient positionnés prêt à l'envol. Des cales bloquaient les roues. On poussa son chasseur sur l'avant-dernière position. Pendant que les mécaniciens s'efforçaient de ranger ses quelques bagages dans les trappes à batteries et dans l'habitacle, il s'équipa lentement, les embruns fouettaient son visage. Bientôt le dernier Spitfire à faire partie du premier groupe de 8 avions émergeait des entrailles du porte-avions avec, à ses côté, Louis Kierkegaard. Lui aussi, n'était pas très rassuré. Pourtant la méthode était simple, une fois le moteur en température, mettre à fond avec 120 de richesse et 2,5 pouces à l'admission pour tirer le maximum de puissance au moteur. Hélice au pas de combat, volets sortis à 75%, et radiateur complètement ouvert. Bloquer la roulette de queue, et quand le moteur a atteint son plein régime, faire signe au mécaniciens qui alors, retireront les cales. On leur avait indiqué de maintenir au maximum la queue sur le pont car il avait tendance à partir du nez. Dès la moitié du pont parcourue, laisser faire en tenant le cap. Une fois en l'air ne pas traîner pour rentrer le train, puis ramener les volets progressivement, ensuite, méthode de vol habituelle. Facile à dire, à faire ça sera une autre paire de manches, se dit René alors que les mécaniciens l'aidaient à se sangler.
le moteur Merlin du premier Spitfire s'ébroua et les fumées évacuées par les échappements s'évanouirent rapidement dans le vent. Le cockpit sentait bon la peinture fraîche et le cuir neuf. Les sangles neuves lui faisaient mal sur sa fine combinaison de vol et il les détendit un peu. Quelques minutes plus tard, les 8 moteurs Merlin cahotaient en cadence, prenant leur température. René savait que sur les coursives, les camarades du squadron les observaient anxieusement. L'Illustrious s'était maintenant placé dans le vent à pleine vapeur. Le moteur du premier Spitfire, celui de Flower, monta en régime. Le bruit était terrifiant, par le cockpit ouvert, René pouvait ressentir le souffle puissant de l'hélice. Le Wing Commander leva le bras, le tissus de sa combinaison de vol flottait dans les remous, les deux mécaniciens retiraient simultanément les cales le chasseur se mis en mouvement. Vu de l'arrière tout semblait très simple. le Spitfire roula sur le pont, puis lentement la queue se leva et l'avion quitta le pont sans le moindre problème. Les trois chasseurs suivants firent de même et vint le tour de Martel. S'efforçant de rester calme, il répéta les gestes de ces camarades. D'un seul coup, libéré de ses cales, son Spitfire se mis en mouvement. Il avait l'impression qu'il était affreusement lent, mais ce n'était qu'un impression car le porte-avions naviguait à bonne vitesse. A la moitié de sa course, il relâcha la pression sur le manche, l'arrière de l'avion quitta instantanément le sol d'acier. Le pilote français contra instinctivement le couple, le chasseur resta en ligne jusqu'au bout du pont. Martel s'efforça de ne pas regarder vers la mer. Mais c'est à peine s'il ressenti une secousse lorsque son Spitfire quitta l'Illustrious. L'avion paru quelque peu hésiter, puis le train rentré, il devint moins instable. A 160 nœuds, Martel ramena ses volets à 25%, puis à enfin, il les rentra complètement. Il donna un peu de manche pour prendre de la vitesse, immédiatement le Spitfire accéléra. René Martel rejoignit la formation. Voler avec le hood ouvert conférait une drôle de sensation, les odeurs d'échappements mélangés à l'air salin avait un goût d'aventure. Il procéda aux bons réglages moteurs et plaça son groupe à droite du Flight de son leader en hippodrome d'attente droit au-dessus de l'Illustrious. Lorsque Louis Kierkegaard se plaça à sa droite, Flower prit sans attendre le cap de l'Egypte.
Et les jours se déroulèrent d'entraînement en théories qui furent rapidement assimilées. Le jour précédent le départ. Le Wing Commander Flower avait annoncé:
- Bien demain matin à 06h00 départ pour notre embarquement.
Le lieu était tenu secret, mais c'était une habitude de ne divulguer que le minimum d'informations.
Le lendemain, à l'aube, ils s'entassèrent dans quatre camions qui en deux heures les conduisaient au bord de l'Atlantique. Martel et ses camarades découvraient le port de Liverpool et le navire qui allait les transporter jusqu'en Méditerranée, le HMS Illustrious, un imposant porte-avions. En contemplant le navire François Devarenne se grattait la tête.
- Sacré coquille de noix. Tu parles pour passer inaperçu des U-Boot.
Empoignant résolument leur sac à effets, les pilotes se dirigèrent vers la passerelle où les attendaient deux matelots qui vérifièrent leurs ordres de marche. On les conduisit dans leur carré. Plusieurs escadrilles occupaient le navire et dans les soutes du bâtiment, outre leurs Spitfire, les pilotes du squadron 127 découvraient des Beaufighter et des Hurricane montés avec de gros canons sous les ailes.
- Canons de 40mm antichars!
Leur avait annoncé fièrement un jeune pilote britannique. Louis Kierkegaard le regarda un peu désabusé:
- Heu ouai, sont chouettes vos tuyaux de chauffage, mais si un essaim de Fritz vous tombe sur le poil, vous faites quoi avec ces veaux.
Leur interlocuteur parti d'un grand éclat de rire. Fanfaron il poursuivit en leur faisant un grand clin d'œil.
- Mais mon pauvre ami, pour que des Allemands nous tombent dessus, il faudrait qu'il y en ait encore.
Les quatre pilotes français restèrent quelques secondes silencieux devant une telle naïveté. Devarenne s'approcha le sourire moqueur.
- Et bien mon petit, ce n'est plus de la vantardise, mais carrément de l'inconscience. Dépêches toi d'écrire à maman pour lui dire que t'es encore en vie, parce que d'ici quelques semaines ça risque bien de ne plus être le cas.
Le jeune pilote voulu ajouter quelque chose, mais Louis lui fit signe de se taire et les quatre camarades se retirèrent en rigolant.
Malgré les submersibles allemands, le reste du voyage fut sans histoire. Il faut dire que le convoi purement militaire, était peut-être une cible de choix pour les Loups Gris, mais également et surtout une cible dangereuse avec les nombreux destroyers qui encadraient l'Illustrious et le HMS Victorious. Le passage du détroit de Gibraltar se déroula sans problème. Trois jours plus tard, le commandant de bord arpentait nerveusement la passerelle du poste de commandement. La proximité de Malte et des nombreux raids allemands qui se succédaient au quotidien sur l'île engendrait une grande tension dans le kiosque du porte-avions. Le surlendemain, une dépêche urgente alarmait le commandement. Tobrouk était tombé. Après des mois de siège, Rommel avait fini par capturer la ville. Un grand chamboulement dans l'organisation des forces du Commonwealth dans le secteur était à l'ordre du jour. Ainsi, on chuchotait que Churchill s'était déplacé en personne au Caire. Fort mécontent, il avait renvoyé Auchinleck en Angleterre le remplaçant par un jeune commandant, le Maréchal Montgomery. Les missives arrivaient l'une après l'autre au convoi. Dans un premier temps il avait été question de débarquer tout le monde à Malte, puis l'ordre avait été annulé. Le pilotes étaient nerveux, des bruits couraient dans les coursives de l'imposant navire de guerre, que le squadron 127 allaient peut-être devoir décoller du porte-avions. Aucun des pilotes de l'escadrille n'avaient jamais décollé d'un navire, la tension était à son comble lorsque le Wing Commander Flower fit son apparition à la salle de briefing.
- Bien Messieurs, après la chute de Tobrouk, un vent de panique a soufflé un instant dans les rangs de notre état-major au Caire. Winston lui-même est venu mettre un peu d'ordre dans ce merdier.
Flower s'essuya nerveusement le visage.
- Il a donc décidé de mettre les moyens nécessaires pour effectuer une puissante contre offensive, contre offensive dans laquelle nous sommes naturellement impliqué en première ligne. L'Illustrious va devoir faire demi-tour pour rentrer le plus rapidement en Angleterre et récupérer de nouveaux squadron. Winston a décidé de mettre le paquet ce coup-ci! Nous allons donc devoir quitter le bateau dans moins de quatre heures afin d'arriver au Caire avant la nuit. On vous expliquera comment décoller de ce navire, vous verrez ce n'est pas si compliqué que cela. Je vous donne rendez-vous à 17h00 dans cette même salle, ne prenez que le minimum d'affaires, le reste suivra plus tard par voie maritime.
Martel et ses camarades se regardèrent inquiets. Ce qu'ils redoutaient le plus ses derniers jours allaient s'accomplir. Ils rejoignaient leur cabine sans un mot. Rapidement, il préparèrent quelques affaires qui pourraient tenir dans le cockpit étriqué de leur Spitfire.
A 17h00 on expliqua sommairement comme décoller du porte-avions et nerveux, les pilotes rejoignaient le pont inférieur où chaque Spitfire étaient acheminés sur l'ascenseur pour y être monté sur le pont d'envol. René Martel se vit attribuer l'avion codé "E", Flower lui avait confié le groupe vert. On l'appela et il se mit avec deux mécaniciens sur le pont du monte-charge où venait d'être placé son Spitfire flambant neuf. Lorsqu'il apparu sur le pont, la Grande Bleue était calme, au loin le soleil qui commençait de descendre brillait de mille feux. A l'arrière du pont, les 4 premiers Spitfire étaient positionnés prêt à l'envol. Des cales bloquaient les roues. On poussa son chasseur sur l'avant-dernière position. Pendant que les mécaniciens s'efforçaient de ranger ses quelques bagages dans les trappes à batteries et dans l'habitacle, il s'équipa lentement, les embruns fouettaient son visage. Bientôt le dernier Spitfire à faire partie du premier groupe de 8 avions émergeait des entrailles du porte-avions avec, à ses côté, Louis Kierkegaard. Lui aussi, n'était pas très rassuré. Pourtant la méthode était simple, une fois le moteur en température, mettre à fond avec 120 de richesse et 2,5 pouces à l'admission pour tirer le maximum de puissance au moteur. Hélice au pas de combat, volets sortis à 75%, et radiateur complètement ouvert. Bloquer la roulette de queue, et quand le moteur a atteint son plein régime, faire signe au mécaniciens qui alors, retireront les cales. On leur avait indiqué de maintenir au maximum la queue sur le pont car il avait tendance à partir du nez. Dès la moitié du pont parcourue, laisser faire en tenant le cap. Une fois en l'air ne pas traîner pour rentrer le train, puis ramener les volets progressivement, ensuite, méthode de vol habituelle. Facile à dire, à faire ça sera une autre paire de manches, se dit René alors que les mécaniciens l'aidaient à se sangler.
le moteur Merlin du premier Spitfire s'ébroua et les fumées évacuées par les échappements s'évanouirent rapidement dans le vent. Le cockpit sentait bon la peinture fraîche et le cuir neuf. Les sangles neuves lui faisaient mal sur sa fine combinaison de vol et il les détendit un peu. Quelques minutes plus tard, les 8 moteurs Merlin cahotaient en cadence, prenant leur température. René savait que sur les coursives, les camarades du squadron les observaient anxieusement. L'Illustrious s'était maintenant placé dans le vent à pleine vapeur. Le moteur du premier Spitfire, celui de Flower, monta en régime. Le bruit était terrifiant, par le cockpit ouvert, René pouvait ressentir le souffle puissant de l'hélice. Le Wing Commander leva le bras, le tissus de sa combinaison de vol flottait dans les remous, les deux mécaniciens retiraient simultanément les cales le chasseur se mis en mouvement. Vu de l'arrière tout semblait très simple. le Spitfire roula sur le pont, puis lentement la queue se leva et l'avion quitta le pont sans le moindre problème. Les trois chasseurs suivants firent de même et vint le tour de Martel. S'efforçant de rester calme, il répéta les gestes de ces camarades. D'un seul coup, libéré de ses cales, son Spitfire se mis en mouvement. Il avait l'impression qu'il était affreusement lent, mais ce n'était qu'un impression car le porte-avions naviguait à bonne vitesse. A la moitié de sa course, il relâcha la pression sur le manche, l'arrière de l'avion quitta instantanément le sol d'acier. Le pilote français contra instinctivement le couple, le chasseur resta en ligne jusqu'au bout du pont. Martel s'efforça de ne pas regarder vers la mer. Mais c'est à peine s'il ressenti une secousse lorsque son Spitfire quitta l'Illustrious. L'avion paru quelque peu hésiter, puis le train rentré, il devint moins instable. A 160 nœuds, Martel ramena ses volets à 25%, puis à enfin, il les rentra complètement. Il donna un peu de manche pour prendre de la vitesse, immédiatement le Spitfire accéléra. René Martel rejoignit la formation. Voler avec le hood ouvert conférait une drôle de sensation, les odeurs d'échappements mélangés à l'air salin avait un goût d'aventure. Il procéda aux bons réglages moteurs et plaça son groupe à droite du Flight de son leader en hippodrome d'attente droit au-dessus de l'Illustrious. Lorsque Louis Kierkegaard se plaça à sa droite, Flower prit sans attendre le cap de l'Egypte.
Dernière édition par le Lun 28 Jan 2008 - 20:25, édité 2 fois
615sqn_Harry- Wing Commander
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